Après les fortes chaleurs, les refuges des Alpes déjà en manque d'eau
Dans le massif des Alpes, les fortes chaleurs ont avancé la période de sécheresse d'au moins un mois. Conséquence directe : les refuges au cœur des montagnes manquent déjà d'eau. Dans ces milieux naturels, le changement climatique est presque deux fois plus important qu'au niveau mondial.
L'eau et la neige manquent déjà dans les Alpes. Les périodes de fortes chaleurs ont entraîné une fonte des neiges accélérée sur les glaciers et un manque d'eau dans les refuges. Les glaciologues s'inquiètent des conséquences de cette sécheresse qui s'amplifie d'année en année.
"Ça devient inquiétant"
À 2.700 mètres d'altitude, le refuge Albert 1er en Haute-Savoie est alimenté en eau par un névé, une neige compacte qui s'accumule en hiver. Mais cette année, la fonte de cette neige a commencé plus tôt que d'habitude et la réserve en eau diminue déjà.
"La vague de chaleur qui a touché toute la France, il y a trois semaines, a vraiment fait fondre le manteau neigeux. Cette année, c'est particulièrement sec puisqu'il y a eu peu de précipitations neigeuses durant la période hivernale. S'il n'y a pas de précipitations pluvieuses, pas de neige et grand soleil, là, ça devient inquiétant", explique Clément Fay, le responsable adjoint du refuge. Pour anticiper une pénurie d'eau, le refuge s’est équipé dès 2022 de deux cuves de secours de 15 m³, qui se remplissent lors des précipitations.
Cette fonte de plus en plus précoce du manteau neigeux est l'un des effets du réchauffement climatique. "Comme il fait plus chaud pendant l'hiver, il y a beaucoup d'eau qui va être sous forme de pluie et non pas de neige. Cela fait moins de neige disponible en stockage durant l'hiver. Et puis, un mois de juin qui n'est pas caniculaire, mais qui est chaud tout le temps, d’un ou deux degrés supplémentaires, sans forcément atteindre les 40 degrés permet de faire fondre très rapidement le manteau neigeux", indique Nicolas Champollion, glaciologue et chercheur au CNRS, spécialiste de l’évolution future des glaciers de montagne.
Les scientifiques estiment que le changement climatique est presque deux fois plus rapide dans les Alpes qu'au niveau mondial. D'ici 2050, les glaciers des Alpes européennes auront perdu entre 30% et 50% de leur volume, selon le scénario climatique retenu, précise Nicolas Champollion. Si les objectifs de l’Accord de Paris sont respectés, c’est-à-dire limiter le réchauffement climatique moyen mondial à 1,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels, la perte se situerait autour de 30 %.
La trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique (TRACC) considère un réchauffement dû aux activités humaines de +2,7 °C par rapport à la période préindustrielle. Dans ce scénario, la fonte des glaciers pourrait atteindre jusqu’à 50 % de leur volume, conclut le glaciologue.
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