Comment rendre les trains de nuit rentables ?

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La ligne de nuit Paris-Nice a rouvert dans la nuit de jeudi à vendredi après quatre ans de fermeture, signe de la volonté du gouvernement de pérenniser ce type de ligne. Pour Arnaud Aymé, expert transports à Sia Partners, si la rentabilité à court terme est illusoire, il existe des moyens de tendre vers des profits à moyen terme.

Le train de nuit Paris-Nice a repris du service. Signe de la volonté du gouvernement d’en faire un événement, le Premier ministre Jean Castex figurait parmi les passagers. L’exécutif compte multiplier ce type de transport à l’avenir. Même si la rentabilité n’est pas pour demain, prévient vendredi sur Europe 1 Arnaud Aymé, expert transports au sein du cabinet Sia Partners, il est possible de faire de ce moyen de transport une source de profits à l’avenir.

"Si on raisonne sur le court terme, le fait de rouvrir ces deux lignes, à court terme, il est fort probable que ça génère à nouveau des pertes d'exploitation pour la SNCF, parce que ce n’est pas facile de remplir ces trains-là", explique Arnaud Aymé. "Ces lignes qui étaient déficitaires jusqu'à la fin 2017, il n'y a aucune raison qu'elle ne soit pas déficitaire avec cette réouverture. Si la SNCF les avait fermées, c'est que la SNCF perdait de l'argent et qu'il n'y avait aucune collectivité, ni l'Etat, qui n'avaient envie à l'époque de subventionner cette activité-là."

"Faire jouer l'effet réseau"

Mais la donne a changé. L’Etat a promis 100 millions d’euros pour renouveler le matériel roulant et améliorer les conditions d’accueil des voyageurs. "Le projet du gouvernement, à moyen terme, peut prendre tout son sens. Deux lignes toute seule qui se battent en duel, ça va être difficile de rentabiliser l'utilisation du matériel roulant. Par contre, avec une dizaine de lignes à moyen terme en 2030, on peut faire jouer l'effet réseau", reprend l’expert. "D'une part pour mieux utiliser le matériel roulant, les conducteurs, faire en sorte qu'ils soient utilisés tout le temps, et d'autre part, que l'offre devienne plus attractive pour les voyageurs."

Et un cercle vertueux peut se mettre en place. "S'il y a des logiques de correspondance qui se mettent en place, c'est peut-être plus avantageux pour les voyageurs. Et puis, plus il y a de lignes, plus il y a d'offres et plus le service est connu des voyageurs. Ça augmente sa visibilité", explique Arnaud Aymé.

Lignes internationales et montée en gamme

Autre solution : exploiter des lignes longues, en dépassant si besoin les frontières de l’Hexagone. "Pour la France, ça vaudra le coup d'avoir des lignes internationales parce que c'est sur des lignes longues que le train de nuit fait le plus sens", précise l’expert. "Si on arrive à destination à 4 heures du matin, ça ne vaut pas forcément le coup. Par contre, si on parcourt 1.000 km comme c'est le cas pour Paris-Nice, ça vaut le coup. Ça vaudra le coup aussi, si on le fait entre Paris et l'Allemagne ou entre Paris et l'Espagne, par exemple."

Enfin, le salut passe peut-être aussi par la montée en gamme. "Aujourd'hui, l’exemple vient notamment des chemins de fer suisses. Et force est de constater qu'ils ont trouvé une clientèle qui peut parfois être à forte contribution, c'est-à-dire des gens qui peuvent payer cher, parce qu'ils offrent une diversité de niveaux de service", détaille Arnaud Aymé. "Il y a certes des places assises avec des sièges inclinables, mais il y a aussi des vrais wagons couchettes qui attirent une clientèle plus aisée, qui a envie d’une expérience et de dépaysement avec ce type de voyage par rapport à l'avion."