Afghanistan 2:44
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Marion Gauthier, édité par Manon Fossat
Une centaine d'employés de l'armée française est toujours bloquée en Afghanistan, en proie aux talibans. Pour les aider à rentrer le plus rapidement possible, les avocats de ces anciens auxiliaires s’activent en coulisses. Car chaque heure compte pour ceux qui sont considérés comme des traîtres.
DÉCRYPTAGE

Le président Emmanuel Macron s’est engagé à les protéger, lors de son allocution, lundi soir : les interprètes, magasiniers, cuisiniers ou chauffeurs employés par l’armée française lors de ses opérations en Afghanistan. Car ces derniers sont particulièrement menacés depuis le retour des talibans au pouvoir et l'inquiétude grandit sur place. Ils seraient en effet au moins une centaine, en lien avec l’Association des anciens auxiliaires de l’armée française. Et c’est sans compter ceux qui ont déjà été tués, ceux partis sur les routes migratoires ou encore ceux qui se sont terrés, éloignés des réseaux de solidarité.

"On est des abandonnés, on n’a rien, même pas de visa", déplore un père de famille qui a exercé comme traducteur pendant quatre ans aux cotés des soldats français. Une "trahison" pour les talibans. "J’espère que la France va nous aider. C’est urgent. Si elle ne nous aide pas maintenant, ce sera trop tard, on sera tués par les talibans. On ne peut rien faire, il faut qu’on attende et qu'on espère", souffle-t-il.

"Ils ne savent que tuer"

Mais les minutes paraissent des heures depuis l’allocution du chef de l'État, lundi. Cloitrée chez elle, son portable toujours à portée de main, cette jeune médecin qui a un jour travaillé pour l’armée française voit les avions militaires s'envoler avec son espoir. "Je reste à la maison. J’attends l’appel de l’ambassade française, sa décision. La nuit, je ne dors pas parce que j’ai peur. Les talibans passent dans chaque maison, s’ils trouvent quelqu’un qui a travaillé avec l’armée française, ils le tuent. Ce sont des animaux, ils ne savent que tuer, et surtout les femmes", craint-elle.

Alors pour les aider, ce sont surtout les avocats des anciens auxiliaires qui s’activent. Ils établissent des listes, sans cesse mises à jour : noms des Afghans à exfiltrer, ceux de leur famille ou encore leur numéro de téléphone. "Ça bouge", se réjouit Nathalie Goulet. Contactée par le ministère des Armées, la sénatrice UDI de l’Orne a dû elle aussi réunir des noms que la France soustraira peut-être aux représailles des Talibans.

"On écrit des mains tremblantes parce que si ces listes sont à l’image des listes de Schindler, on va sauver des gens", poursuit la parlementaire. "Ils sont menacés de mort, il n’y a aucun doute sur leur sort. Hier on m’a envoyé le témoignage d’une ancienne cuisinière. Les talibans ont enlevé deux de ses enfants en ont rendu un coupé en morceaux. On n’a que trop tardé", appelle-t-elle. Chaque heure compte, insiste également de son côté le collectif des avocats des auxiliaires. Pour le moment, aucun de leurs clients n’a été appelé par l’ambassade de France à Kaboul.