émeutes champs élysées 8:17
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avec AFP / Crédit photo : CHARLY TRIBALLEAU / POOL / AFP , modifié à
La vague de violences déclenchée dans de nombreuses villes de France par la mort du jeune Nahel, tué par un policier mardi à Nanterre lors d'un contrôle routier, a marqué le pas dans la nuit de samedi à dimanche, quelques heures après l'enterrement du jeune homme à l'abri des caméras.

La violente attaque à la voiture-bélier qui a visé le domicile du maire de L'Haÿ-les-Roses (Val-de-Marne) a provoqué dimanche une indignation unanime en France, alors que la grand-mère du jeune Nahel, dont la mort a suscité cinq nuits consécutives d'émeutes, a appelé au calme. Le choc causé par l'agression visant l'élu de cette commune d'ordinaire tranquille de 30.000 habitants de la banlieue sud de Paris a fait passer au second plan la décrue des violences constatées lors de la cinquième nuit d'affilée dans de nombreuses villes de France. "Nous ne laisserons rien passer, nous serons aux côtés des maires", a promis la Première ministre Elisabeth Borne en venant apporter son soutien au maire Vincent Jeanbrun (LR) dans sa ville. Le gouvernement ne "laissera passer aucune violence" et prendra des sanctions avec "la plus grande fermeté", a-t-elle ajouté.

Dans un contexte de recrudescence des attaques visant les élus, le président de l'Association des maires de France (AMF) David Lisnard (LR) a appelé la population à se rassembler lundi à midi toutes les mairies. Le patron de l'AMF a fait état auprès de l'AFP de "150 mairies ou bâtiments municipaux attaqués depuis mardi, une première dans l'histoire du pays". Le président Emmanuel Macron, qui n'a pas immédiatement réagi à l'attaque, doit faire un "point de situation" à l'Elysée à 19H30 avec plusieurs membres de son gouvernement. Les faits se sont déroulés vers 01H30 du matin, lorsqu'une voiture-bélier garnie de produits incendiaires a pénétré dans l'enceinte du domicile du premier magistrat de L'Haÿ-les-Roses, qui se trouvait alors dans sa mairie.

Les informations principales :

  • 719 personnes ont été interpellées dans tout le pays, selon les premiers chiffres du ministère de l'Intérieur.
  • 45.000 policiers et gendarmes étaient sur le terrain tout au long de la nuit dans l'ensemble du pays.
  • Le domicile du maire de L'Haÿ-les-Roses, dans le Val-de-Marne, a été attaqué à la voiture-bélier dans la nuit, sa femme et l'un de ses enfants blessés.
  • Emmanuel Macron fera un "point de situation" dimanche soir avec plusieurs membres du gouvernement sur les violences.
  • Elisabeth Borne et Gérald Darmanin se rendent à L'Haÿ-les-Roses dans le Val-de-Marne après l'attaque à la voiture-bélier chez le maire de la ville.
  • La grand-mère de Nahel a lancé dimanche un appel au calme après une cinquième nuit consécutive d'émeutes urbaines.
  • Le chancelier allemand s'est dit "préoccupé" dimanche par la poursuite des émeutes urbaines en France.

"Tentative d'assassinat"

Le portail d'entrée et la voiture de la famille ont été brûlés. "Les premières constatations nous laissent présumer que le véhicule a été lancé pour brûler le pavillon", a détaillé le procureur de la République de Créteil Stéphane Hardouin, en dénonçant des faits d'une "extrême gravité". Le magistrat a annoncé l'ouverture d'une enquête pour "tentative d'assassinat", confiée à la police judiciaire. En prenant la fuite avec ses deux enfants âgés de cinq et sept ans, l'épouse de Vincent Jeanbrun s'est fracturé le tibia, selon le procureur. "Cette nuit, un cap a été franchi dans l'horreur et l'ignominie", a réagi le maire.

Dans son quartier pavillonnaire des Blondeaux, habitants et passants étaient scandalisés. "Une ligne rouge a été franchie", déplore Dorin, un Roumain de 38 ans qui n'a pas souhaité donner son patronyme par peur de "représailles". "Il y a eu un drame (avec la mort de Nahel, NDLR), mais le policier est mis en examen (et écroué, NDLR), je ne comprends pas que ça continue", a déploré Joanna, une enseignante de 42 ans voisine du domicile du maire.

La grand-mère de Nahel appelle au calme

Dimanche, la grand-mère de Nahel a lancé un appel au calme aux jeunes émeutiers. "Qu'ils ne cassent pas les vitrines, qu'ils ne cassent pas les écoles, pas les bus", a exhorté Nadia sur BFMTV. "Arrêtez, c'est des mamans qui prennent les bus (...) On veut que ces jeunes-là restent tranquilles". Fatiguée et dévastée, elle a demandé que le policier auteur du tir mortel paye pour son geste "comme tout le monde", en assurant avoir "confiance en la justice".

La nuit de samedi à dimanche a été plus calme que la précédente, aussi bien à Paris et dans sa banlieue qu'à Marseille et Lyon, les deux agglomérations les plus touchées la veille par les heurts, les destructions et saccages de bâtiments publics et les pillages de commerces.

45.000 policiers et gendarmes mobilisés dimanche soir pour la 3e nuit consécutive

Gérald Darmanin a annoncé la reconduction du dispositif de maintien de l'ordre dimanche soir, avec, pour la troisième nuit consécutive, 45.000 policiers et gendarmes mobilisés pour faire face aux émeutiers qui agitent le pays depuis la mort du jeune Nahel mardi à Nanterre. Le ministre de l'Intérieur a donné des "consignes de fermeté" et a demandé "comme précédemment que des interpellations soient menées, dès que possible", a précisé son entourage.

719 personnes interpellées

Selon le ministère, 719 personnes ont été interpellées dans la nuit de samedi à dimanche, dont 315 à Paris et en proche banlieue. La nuit précédente, les forces de l'ordre avaient procédé à plus de 1.300 arrestations. Par ailleurs, 45 policiers et gendarmes ont été blessés. Deux policiers ont ainsi été touchés à Paris "par ce qui pourrait s'apparenter à des tirs de plomb", selon une source policière, et un de leur collègues, visé à Nîmes par un tir d'arme à feu, a été protégé par son gilet pare-balles.

Le chancelier allemand "préoccupé" par les émeutes en France

Le chancelier allemand s'est dit "préoccupé" dimanche par la poursuite des émeutes urbaines en France, qui ont conduit à l'annulation de la visite d'Etat prévue en Allemagne du président Emmanuel Macron. "Nous avons des liens d'amitié avec la France et formons un couple pour faire en sorte que l'Union européenne, si importante pour notre avenir, fonctionne bien, c'est pourquoi nous observons bien sûr avec préoccupation" ce qui se déroule dans le pays, a déclaré Olaf Scholz dans une interview à la chaîne de télévision publique ARD. "J'espère beaucoup, je suis totalement persuadé, que le chef de l'Etat français trouvera les moyens de faire en sorte que la situation s'améliore rapidement", a-t-il ajouté.

Emmanuel Macron devait débuter ce dimanche une visite d'Etat en Allemagne pour relancer les relations entre les deux pays, qui s'opposent sur plusieurs dossiers, en matière de défense, d'énergie ou de discipline budgétaire en Europe. Mais il l'a reportée en raison des émeutes en France. Les scènes de pillage et destruction et violence se multipliées à travers le pays depuis plusieurs jours après la mort de Nahel M., un jeune de 17 ans tué mardi à bout portant par un policier lors d'un contrôle routier auquel il tentait d'échapper alors qu'il était au volant d'une puissante voiture dans la banlieue ouest de Paris.

Elisabeth Borne "condamne ces faits intolérables", après l'attaque du domicile du maire de L'Haÿ-les-Roses

La Première ministre Elisabeth Borne s'est élevée dimanche contre des "faits intolérables", après l'attaque à la voiture-bélier dans la nuit du domicile du maire de L'Haÿ-les-Roses (Val-de-Marne), promettant que "les coupables seront poursuivis avec la plus grande fermeté". "La Première ministre condamne ces faits intolérables et apporte tout son soutien au maire de L'Haÿ-les-Roses et à ses proches. Elle a adressé un message au maire et à sa famille qui sont encore sous le choc. Les coupables seront poursuivis avec la plus grande fermeté", a indiqué Matignon dans un communiqué.

65 arrestations dans les Bouches-du-Rhône

Sur la célèbre Canebière notamment, d'importants effectifs de forces de l'ordre, épaulées par les unités d'élite du Raid et du GIGN (gendarmerie) sont parvenus à disperser les groupes de jeunes qui avaient semé le chaos la veille, ont constaté des journalistes de l'AFP. Dimanche matin, le calme est revenu sur la cité phocéenne. Beaucoup de commerçants ont barricadé leurs vitrines, pour anticiper la cinquième nuit d'émeutes, avec des cartons pour cacher ce que renferment les magasins. Ou bien avec des grandes planches vissées hier, dès le milieu de l'après-midi. "On n'assiste pas du tout aux scènes de pillage d'hier", a commenté la préfecture de police des Bouches-du-Rhône.

Dans d'autres parties de la ville, les émeutiers ont tout de même pris pour cible les centres commerciaux des quartiers sud et nord. 65 interpellations ont eu lieu avec deux policiers blessés, dont un envoyé à l'hôpital.  À Paris, un important dispositif a été déployé le long des Champs-Élysées, où des appels à se rassembler circulaient depuis vendredi sur les réseaux sociaux, a constaté une journaliste de l'AFP. Tout au long de l'avenue, des petits groupes de jeunes vêtus de noirs ont déambulé sous les yeux de CRS devant les commerces, dont les devantures étaient protégées de planches de bois. Derrière des grilles noires, le célèbre restaurant Le Fouquet's a accueilli normalement ses clients pour le dîner. Les derniers groupes ont été évacués avant 2 heures.