"Martyre de l'A10" : les parents d'Inass s'accusent mutuellement de "violences" sur la fillette

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Le procureur de la République de Blois a confirmé l'identité de la fillette, non identifiée depuis sa mort en 1987, jeudi. Retrouvés grâce à l'ADN, ses parents ont été mis en examen et écroués, jeudi. 

"L'évolution de l'enquête a été longue mais le temps n'a jamais couru contre nous." Plus de trente ans après la mort d'une fillette non identifiée, retrouvée le long de l'autoroute A10 en 1987, ses parents, retrouvés grâce à l'ADN, ont été mis en examen pour meurtre sur mineur de moins de 15 ans, recel de cadavre et violences volontaires habituelles sur mineur de moins de 15 ans, a indiqué jeudi soir le procureur de la République de Blois, Frédéric Chevallier. Ils ont ensuite été écroués. Le parquet confirme également l'identité de la fillette, Inass T.. 

"Une existence légale et juridique". L'enfant est née en juillet 1983 à Casablanca, au Maroc, où elle a vécu pendant 18 mois avec sa grand-mère maternelle, selon le procureur. Elle a ensuite rejoint ses parents en région parisienne, à Puteaux, fin 1985. "Elle a été inscrite en maternelle mais jamais scolarisée", a précisé Frédéric Chevallier. Inass, troisième d'une fratrie de sept enfants, était aussi "déclarée dans les fichiers de la Caf (caisse d'allocations familiales, ndlr) et avait "une existence légale et juridique". 

Le père dit avoir vécu un "enfer". Interpellés mardi dans l'Aisne et en région parisienne, ses parents, aujourd'hui âgés de 66 et 64 ans, vivent séparés depuis 2010. L'homme dit avoir "vécu un enfer avec son épouse", affirmant "que celle-ci était violente à son égard comme à l'égard des trois filles" et qu'il vivait "sous sa domination", a indiqué le procureur. Il raconte avoir trouvé la fillette morte en rentrant à son domicile le 10 août 1987 et avoir été "suffisamment lâche pour ne pas faire autre chose que de partir vers le Maroc", abandonnant le corps enmailloté sur la route "au petit matin", alors que ses autres enfants se trouvaient dans la voiture. 

La mère nie le meurtre. La version de son épouse a, elle, évolué au fil des auditions. En garde à vue, elle a d'abord indiqué "ne plus avoir de souvenirs" et "que sa fille n'était pas décédée", selon Frédéric Chevallier. Mais lors de sa première comparution devant le juge d'instruction, la sexagénaire a changé de discours, affirmant qu'elle était "elle-même victime de violences". Elle a alors reconnu qu'elle pouvait aussi "parfois être violente", tout en niant toute implication dans la mort de sa fille. 

Trente ans d'enquête. L'enquête sur la mort de "la petite martyre de l'A10", ainsi surnommée par les médias, dure depuis plus de trente ans. Jusqu'à l'arrestation de ses parents cette semaine, les gendarmes ignoraient tout de l'enfant : son âge, son nom et les circonstances de sa mort. Personne n'avait signalé sa disparition et les multiples appels à témoins, portraits-robots et vérifications des enquêteurs n'avaient jamais permis d'identifier une piste sérieuse. C'est finalement un prélèvement ADN réalisé après "une procédure délictuelle", sur un homme qui s'est avéré être son frère, qui a permis de relancer l'enquête.