Loi Travail : entre 70.000 et 200.000 manifestants dans toute la France

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Très encadrées par les forces de l'ordre, les manifestations organisées jeudi en province et à Paris se sont déroulées dans le calme.

Pour la dixième fois depuis le début de l'année, les opposants à la loi Travail sont descendus dans la rue. L'intersyndicale a organisé des manifestations à travers toute la France, mais c'est à Paris que le défilé fut le plus scruté : redoutant de nouvelles violences, les autorités avaient décidé d'interdire ce rassemblement, avant de finalement l'autoriser.

Les principales informations à retenir : 

• Les manifestation se sont déroulées dans le calme en province, à l'exception de Rennes et Clermont-Ferrand

• Les autorités ont compté environ 70.000 manifestants dans toute la France, la CGT 200.000. La CGT et FO annoncent 60.000 manifestants à Paris, la préfecture entre 19.000 et 20.000 participants

• A Paris, un très important dispositif de sécurité a été déployé, 113 personnes ont été interpellées

• Sur le fond de la loi Travail, les discussions sont dans l'impasse

A Paris, un défilé qui tourne en rond. Le défilé parisien s'est élancé à 14h30 de la place de la Bastille pour longer le bassin de l'Arsenal avant de revenir sur la place de la Bastille. Une dizaine de minutes après son départ, le cortège avait déjà effectué la moitié du parcours. Le rassemblement s'est terminé vers 16 heures, sans débordement. Une prochaine journée de mobilisation est déjà prévue, le 28 juin prochain.

Si aucune violence n'a été signalée, les manifestants ont rapidement entonné le refrain "Tout le monde déteste le police". Certaines personnes ont également fustigé les syndicats et scandé "Manifester, ce n'est pas tourner en rond". Quelques minutes plus tard, une formule semblait mettre tout le monde d'accord : "tout le monde déteste tourner en rond", selon les images tournées en direct par le périscopeur Rémy Buisine, qui suit la mobilisation depuis le début.

23.06.Manifestation Paris Loi Travail CGT Martinez FO Mailly.DOMINIQUE FAGET  AFP.1280.640

Dans la soirée jeudi, une centaine de personnes, réunies lors d'une manifestation non autorisée, ont dégradé la façade du siège de la CFDT à Paris. Une personne parmi les casseurs a été blessée à la tête. Les forces de l'ordre sont parvenues à disperser les manifestants, et neuf personnes ont été interpellées.

Quelle participation ? Les premiers chiffres sont venus de Marseille, où la manifestation a eu lieu en fin de matinée. Les organisateurs ont revendiqué 45.000 manifestants, tandis que la police en dénombre 2.840, selon le quotidien régionale La Provence. A Lyon, les organisateurs ont revendiqué 8.000 manifestants, tandis que la préfecture a évoqué 3.200 participants, selon Le Progrès.

A Paris, le décompte s'annonçait encore plus compliqué : en raison d'un parcours très court, les manifestants pouvaient effectuer plusieurs tours et être comptabilisés plusieurs fois. Selon la CGT et FO, cette manifestation a réuni 60.000 participants. La préfecture a annoncé de son côté entre 19.000 et 20.000 participants. Au total, près de 70.000 personnes ont défilé dans toute la France, selon les autorités, la CGT estimant de son côté qu'ils étaient 200.000.

La sécurité érigée en priorité. Les mesures de sécurité ont été sensiblement renforcées : plus de 2.000 policiers ont été mobilisés sur la manifestation parisienne, pour laquelle des mesures d'"interdiction de paraître" ont été prises contre une centaine de personnes. Un préfiltrage a également été instauré : aucune personne ne pouvait accéder au rassemblement sans être fouillé pour éviter toute introduction d'armes ou de projectiles. Les casques et masques à gaz ont également été confisqués, y compris pour les journalistes. Deux journalistes indépendants ont d'ailleurs été interpellés car ils détenaient des lunettes et du sérum physiologique, rapporte Libération.

Lors de ce préfiltrage, la préfecture de police de Paris a annoncé l'arrestation de 113 personnes, dont au moins deux avaient été interdites de manifestation. Plusieurs photographies de ce dispositif ont été publiées sur Twitter : 

Toute la zone avait fait l'objet d'une préparation spéciale : des agents de l'équipementier JC Decaux ont démonté les vitres des abribus et protégé les panneaux publicitaires tout le long du défilé. Les agents du service des espaces verts de la Ville de Paris ont également retiré les pieux en bois servant à clôturer ces espaces.

Des manifestations plus matinales en province. Les premiers rassemblements ont débuté en fin de matinée en province, à Rennes, Toulouse, Bordeaux, Lille, Lyon, Grenoble ou encore Marseille. Aucun débordement n'a été signalé à Montpellier, Toulouse, Saint-Brieuc ou encore Besançon : 

Encore des dégradations à Rennes. En revanche, la situation a dégénéré à Rennes, l'un des principaux foyer de contestation et où les débordements sont fréquents depuis le mois de mars. Une "manifestation sauvage" de près d'un millier de personnes a poursuivi, hors parcours déclaré, son défilé dans les rues, en début d'après-midi, selon l'AFP. De nombreuses agences bancaires, immobilières ou d'assurances ont d'abord été taguées, puis, dans un deuxième temps, certains manifestants s'en sont pris aux vitrines, les brisant à l'aide de marteaux. Parmi les tags: "ça passe et ça casse", "Re-péter", ou "Et ma prime à la casse?". 

Lors des bris de vitrines, des manifestants se sont interposés pour empêcher les journalistes de prendre des images. Un journaliste de France 3 Bretagne a néanmoins réussi à prendre un cliché :

Des dégradations ont également eu lieu à Clermont-Ferrand, une nouvelle fois à la fin du rassemblement : un groupe d'individus s'est introduit dans le hall d'accueil du conseil départemental du Puy-de-Dôme, rapporte La Montagne.

Les discussions sur la loi Travail restent compliquées. Les syndicats manifestent toujours pour obtenir des modifications du projet de loi porté par Myriam El Khomri, certains allant jusqu'à réclamer son retrait pur et simple. Un point du texte cristallise particulièrement les tensions, l'article 2 qui instaure une inversion des normes : en clair, alors qu'aujourd'hui un accord conclu au niveau d'une entreprise doit respecter l'accord de branche qui régit tout le secteur, la loi Khomri permettrait d'inverser cette hiérarchie pour accorder davantage de libertés aux entreprises. 

Sauf que le gouvernement a déjà beaucoup revu sa copie et rechigne à une nouvelle reculade. D'autant plus que les syndicats qui soutiennent actuellement le projet de loi - notamment la CFDT - pourraient entrer en dissidence à leur tour. Dans ce contexte, les négociations entre le gouvernement et les syndicats restent tendues. Invité d'Europe 1 jeudi, le secrétaire général de FO n'a rien dit d'autre : "on demande au gouvernement d'accepter un vrai dialogue", a-t-il déclaré.


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En face, le gouvernement se veut lui aussi ferme : "sur ce projet de loi, nous irons jusqu'au bout", a affirmé jeudi François Hollande.