Secours populaire Coronavirus 1:45
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, avec Stéphane Frangy
Enfants à nourrir faute de cantine, prix en hausse… Les associations tentent de lutter contre la paupérisation des catégories populaires pendant le confinement, mais la baisse des recettes met à mal la solidarité nationale.

C'est l'une des conséquences du confinement décidé pour lutter contre l'épidémie de coronavirus : la fracture alimentaire entre les Français se creuse jour après jour. Certains parents en situation précaire n'arrivent plus à faire face aux dépenses alimentaires qui augmentent mécaniquement avec le temps passé au domicile. Pour réduire la précarité des catégories populaires confinées, des associations se mobilisent.

C'est notamment le cas à Marseille, ville traversée par de nombreuses fractures sociales. "On a une grande paupérisation dans mon collège, avec beaucoup de familles monoparentales en situation de grande pauvreté", explique au micro d'Europe 1 Véronique Michaud, professeur de français au collège Vieux-Port.

"On a bientôt plus à manger"

L'enseignante a collecté 2.600 euros pour lutter contre la précarité des familles de son établissement, qu'elle a découvert au hasard en passant des coups de téléphone aux parents. "Des familles disent que c'est la galère, qu'elles n'ont bientôt plus à manger. C'était la phrase : 'On a bientôt plus à manger'", insiste-t-elle. "Pour moi, ça a été un choc. Soit on donne de l'argent, soit on fait des courses, comme par exemple des couches pour bébés, qui coûtent une fortune."

 

"La France compte 9 millions de pauvres qui n'ont pas disparu avec le confinement", rappelle Thierry Robert, ​directeur général du​ ​Secours populaire. "Pour ces personnes, la situation est encore plus dramatique. Pour des familles qui ont les enfants à la maison qu'il faut nourrir, il n'y a plus les cantines, pour des prix qui parfois augmentent."

À Marseille, plus de 15.700 familles bénéficient d'une gratuité totale ou partielle de la cantine, par exemple. "C'est extrêmement préoccupant, plus le confinement dure, plus c'est financièrement problématique", alerte Virginie Akliouat, du syndicat enseignant SNUipp. "Plusieurs cagnottes ont vu le jour sur les plateformes. Dans certains endroits, c'est le don de denrées alimentaires qui prévaut. À ma connaissance, j'ai plus d'une dizaine d'endroits où c'est le cas."

De nouveaux précaires

Dans la ville marseillaise, "nous avons neuf antennes d'urgence et le nombre de personnes que nous aidons a doublé", souligne le directeur général du Secours populaire. "Dans une antenne, c'est 20 personnes nouvelles par jour qui viennent demander de l'aide au Secours populaire." Face à cette situation, la mairie va proposer une compensation financière qui sera versée aux familles par les Caisses d'allocations familiales.

Mais cela ne fera pas tout, car le nombre de personnes dans le besoin a augmenté avec la crise. "Les travailleurs indépendants, les intérimaires et les personnes isolées qui jusque là n'avaient pas besoin de l'activité d'une association comme la nôtre viennent frapper à nos portes", affirme Thierry Robert.

Conséquence logique : "La situation financière est estimée à 10 millions d'euros de manque de moyens, soit de pertes, soit de besoins supplémentaires pour des dépenses nouvelles", déplore le directeur général de l'association caritative. "Nous avons estimé à 3 millions d'euros le montant de recettes en moins dans nos collectes, par mois, pendant cette période de confinement."