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Grégoire Duhourcau , modifié à
Gaëtan souffre d'hémophilie et aujourd'hui, il n'a "plus le droit de courir ni de sauter". "Quand j'étais petit, on me disait qu'il fallait éviter au maximum de pratiquer une activité physique", raconte-t-il à Olivier Delacroix sur Europe 1. Pourtant, le sport est quelque chose de "primordial" dans un cas comme le sien.
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Gaëtan, 31 ans, est atteint d'une forme sévère d'hémophilie. Cette maladie "provoque des dégénérescences au niveau articulaire". "J'ai 31 ans et lorsque je passe une radio, mes chevilles correspondent à celles d'une personne qui a plus de 85 ans", confie-t-il à Olivier Delacroix sur Europe 1. Il explique que la pratique d'une activité physique est quelque chose "d'autant plus primordial" dans le cas d'une maladie comme la sienne pour "essayer de faire ralentir les choses".

"L'hémophilie est un trouble de coagulation. C'est-à-dire que lorsque l'on saigne, le sang s'échappe d'un vaisseau. Il faut un système qui s'appelle la coagulation pour permettre au vaisseau de se boucher. Dans le cas des hémophiles ou des autres maladies hémorragiques rares, on a des difficultés à fermer ce vaisseau et du sang se diffuse. Un hémophile n'est pas quelqu'un qui peut mourir en se coupant et en se vidant de son sang, parce que l'on a des médicaments extrêmement efficaces aujourd'hui. La grosse particularité de cette maladie est qu'elle provoque des dégénérescences au niveau articulaire, à cause des saignements qui ont lieu dans les articulations. Très concrètement, j'ai 31 ans et lorsque je passe une radio, mes chevilles correspondent à celles d'une personne qui a plus de 85 ans.

"Quand j'étais petit, on me disait qu'il fallait éviter au maximum de pratiquer une activité physique"

Quand j'étais petit, on me disait qu'il fallait éviter au maximum de pratiquer une activité physique. Pour beaucoup de gens, et même les professionnels jusqu'à il y a encore quelques années, l'hémophilie était une maladie avec laquelle il fallait faire attention. C'est l'enfant fragile, c'est l'enfant qu'il faut éviter de mettre en contact avec les autres. Quand j'étais petit je n'avais pas trop le droit de faire du sport et aujourd'hui, on dit tout l'inverse. On dit que, pour protéger au mieux ses articulations, il faut faire du sport parce que les médicaments que l'on reçoit nous permettent d'avoir une vie qui est à peu près similaire à la normale et sans activité physique, sans sport, on détériore quand même nos articulations.

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L'enjeu de faire du sport est phénoménal. Pour faire très simple, j'ai des difficultés et je n'ai plus le droit de courir ni de sauter, alors que j'ai juste 30 ans. La dégénérescence des articulations fait qu'il y a de grosses douleurs qui sont difficiles à gérer au quotidien et sur lesquelles il faut faire beaucoup de kiné, tout au long de sa vie. Il faut aussi avoir une activité physique et une hygiène de vie qui soit assez contraignante. Je fais attention à ce que je fais et je ne fais jamais dans l'excès. Je peux pratiquer presque tous les sports, mais en faisant attention à ce que je peux faire.

Quand j'étais petit, [je faisais du basket], on me disait 'reste sur le banc de touche' ou 'fais l'arbitre'. Ce n'était pas quelque chose qui était très facile à vivre et dès que j'avais la possibilité, dès que mes parents avaient le dos tourné, je prenais mon ballon de basket et je partais avec mes amis. On jouait au basket un petit peu partout, et c'est ce qui m'a permis de me dépenser quand j'étais enfant et quand j'étais ado. Aujourd'hui, il faut adapter. Le basket fauteuil par exemple, c'est une des versions qui pourrait être intéressante pour moi.

Le principal frein, ce ne sont pas les risques que j'encours, c'est le regard des autres. Ce sont les autres parce qu'ils ne veulent pas vous faire la passe quand vous jouez au foot, ce sont les autres qui ne veulent pas aller vers vous. Tout le monde sait, quand vous arrivez quelque part, qu'il y a une étiquette collée sur votre front et du coup, tout le monde fait plus ou moins attention. C'est très difficile d'essayer de s'intégrer et d'essayer de faire comme les autres quand c'est comme ça. Je pense que l'idée est de dire que l'on peut un peu tout faire et ce sont les personnes qui savent s'adapter parce qu'ils ont eu une éducation. Moi je suis né avec cette maladie et je l'aurai tout au long de ma vie et je sais faire les choses, je sais m'adapter en fonction des choses.

Faire du sport est "d'autant plus primordial lorsque l'on a une maladie chronique"

J'ai eu beaucoup de chance quand j'étais petit parce que mes parents étaient très actifs dans une association qui s'appelle 'L'association française des hémophiles'. Il y avait d'autres personnes avec la même maladie rare que moi qui m'ont beaucoup appris sur ce qu'il fallait faire et ce qu'il ne fallait pas faire. C'est même un devoir de pratiquer une activité physique et de faire du sport, parce que c'est un bénéfice pour tout le monde, mais c'est d'autant plus primordial lorsque l'on a une maladie chronique. On peut essayer de faire ralentir les choses.

Les dégénérescences au niveau articulaire, elles sont inéluctables mais on peut les ralentir au maximum. Les troubles articulaires surviennent chez n'importe qui vers 50 ou 60 ans. Si on peut attendre 50 ou 60 ans pour une personne hémophile, je pense que l'on aura atteint quelque chose qui est de l'ordre de la normale. J'ai eu des troubles articulaires quand j'avais 15 ou 16 ans et je suis un petit peu en difficulté aujourd'hui, même si j'essaye de m'adapter au mieux."