Face à leur multiplication, les micro-brasseurs en pénurie de houblon

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Justin Morin, édité par Grégoire Duhourcau , modifié à
Les micro-brasseurs, toujours plus nombreux, doivent faire face à une pénurie de houblon. Certains agriculteurs se sont engouffrés dans la brèche pour se mettre à la culture de cette fleur, matière première de la bière.
REPORTAGE

C'est un décor auquel les Bretons n'étaient pas habitués. Aujourd'hui, c'est un champ dans lequel se trouvent 150 poteaux en bois, un peu comme des poteaux électriques qui quadrillent la plantation et des milliers de ficelles qui pendent, accrochées à des câbles à plus de 7 mètres de haut. L'été prochain, ce sera la jungle. Une jungle de houblon breton. Dans le Morbihan, près de Redon, Romain Chemin s'est lancé dans cette culture très atypique il y a seulement un an.

Certains "ont pensé" à de la drogue. En Bretagne, ils ne sont que trois à produire cette fleur, matière première de la bière. Au départ, ce drôle de champ était donc au centre de nombreuses rumeurs. "Une grande serre, un parc animalier, il y a beaucoup de choses beaucoup plus surprenantes", explique Romain Chemin au micro d'Europe 1. Certains "ont pensé" qu'il voulait cultiver de la drogue, par exemple. "Il y en a qui voulaient que je fasse un grand bar, mais un bar d'un hectare, on ne l'a encore jamais vu au monde."

Si la culture du houblon s'invite en Bretagne, c'est à cause du nombre de micro-brasseries qui explose, et par conséquent la demande en houblon aussi. Dans les années 1980, il n’y en avait qu’une trentaine en France. Aujourd’hui, plus de 1.200 micro-brasseurs sont à la recherche de houblons de plus en plus spécifiques pour faire des bières artisanales au goût unique. Il existe près de 230 variétés avec à chaque fois des arômes particuliers, plus amers, plus fruités, plus fleuris. C'est le cas des bières IPA, très à la mode en ce moment.

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"Tout ce que j'ai produit l'année dernière a été vendu." Pour sa première récolte, Romain, lui, a cultivé une dizaine de variétés différentes : "On répond à leurs besoins immédiatement. Tout ce que j'ai produit la première année a été vendu, toutes les semaines j'ai des clients qui m'appellent pour savoir si j'ai encore du houblon à vendre. Là, malheureusement, je n'en ai pas. Pour l'année prochaine, on commence déjà à parler de volumes pour certaines variétés."

Mais cette production très locale ne suffit pas à répondre à la demande. Ces houblons aromatiques continuent d’être majoritairement importés de l’étranger, des Etats-Unis ou de Nouvelle-Zélande principalement. L’Alsace et le Nord, territoire historique du houblon s’y sont mis aussi mais la quantité reste insuffisante. Romain Chemin, de son côté, veut mettre en avant la qualité de son houblon, local et bio.

"C'est une plante très résistante." Une tendance qui plait aux micro-brasseurs, qui cherchent à créer et vendre en circuit court, et dont Romain Chemin est très fier. "Dans le champ, il y a de l'herbe donc ça veut dire que ça vit. C'est une plante très résistante. Devant, il y a quelques bourgeons qui peuvent ressortir dès maintenant. Au printemps prochain, les premiers bourgeons vont développer la première liane et monter jusqu'à 7 mètres", explique-t-il. A l'heure actuelle les bourgeons sont "tous petits" mais le Breton se réjouit de souligner leur "gros potentiel". Un potentiel que l'on peut par exemple retrouver dans la Smash Harvest, une bière brassée avec le houblon de Romain Chemin, à seulement 25 minutes du champ où il est cultivé.