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Laetitia Drevet , modifié à
Pour Philippe Meirieu, chercheur en pédagogie spécialiste de l'éducation, le développement de l'enseignement à distance peut être complémentaire à l'apprentissage en classe, mais ne doit pas le remplacer. "On l'a vu pendant le confinement : les élèves décrochent quand il n'y a plus de collectif", affirme-t-il lundi au micro d'Europe 1.

"Les enfants ne peuvent pas se satisfaire de l’école à distance." À la suite de la crise du coronavirus, certains élèves français n'ont toujours pas retrouvé le chemin de l'école, ou n'y suivent que quelques heures de cours par semaine. Une situation problématique pour Philippe Meirieu, chercheur en pédagogie spécialiste de l'éducation, qui remet en cause l'efficacité de l'école à distance. "Les élèves ont besoin les uns des autres, ils ont besoin d'entraide, de coopération, et de voir leur enseignant présent avec eux dans l'espace classe", soutient-il lundi au micro d'Europe 1, dénonçant un dangereux "engrenage". 

Un apprentissage complémentaire, mais pas interchangeable

D'après lui, le développement de l'enseignement à distance peut être complémentaire à l'apprentissage en classe mais ne doit surtout pas le remplacer. "Si on doit développer l'enseignement à distance à la rentrée prochaine pour aider chacun plus individuellement, il faut que ce soit en complément d’un enseignement en présentiel obligatoire... On l'a vu pendant le confinement : les élèves décrochent quand il n'y a plus de collectif", affirme-t-il.

À ceux qui pointent la réussite des élèves inscrits au Cned, dont la scolarité entière peut se dérouler loin des salles de classes et des cours de récré, il rétorque : "Il s'agit d'élèves qui sont mobilisés, motivés, et qui ont une interaction personnelle avec chaque enseignant qui les suit... On ne peut pas généraliser cela à tous les élèves français." 

"On va rouvrir les cinémas... Pourquoi pas les amphis ?"

Un raisonnement qu'il applique aussi aux universités, fermées depuis mars et qui le resteront au moins jusqu'en septembre. Certaines facultés s'interrogent en ce moment sur le maintien, ou non, des cours en amphithéâtres à la rentrée. "On va rouvrir les cinémas... Pourquoi pas les amphis ?", pointe Philippe Meirieu.

Il redoute que l'enseignement à distance ne creuse des inégalités déjà visibles à l'université. "Les étudiants qui peuvent suivre un enseignement à distance, en autonomie, ont acquis, en raison de leur environnement culturel, familial et social, des capacités de travail, d’initiative, et de recherches personnelles qui ne sont pas acquises par tous les élèves...", souligne-t-il. Et conclut : "Avec les cours à distance, certains élèves seront laissés sur le bord du chemin."