Les professionnels de santé seront formés pour mieux détecter les violences infligées aux enfants. 2:37
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Zoé Pallier
Même auprès des professionnels de santé, la maltraitance infantile est rarement détectée à temps. Pour y remédier, des unités dédiées voient le jour dans sept hôpitaux de France : pédiatres, psychologues et assistantes sociales aident leurs confrères à distinguer un bleu d’un coup et les épaulent dans la procédure de signalement.

"En France, au moins un enfant sur dix est victime de maltraitances. Il faut marteler ce chiffre, trop peu connu". Céline Gréco est médecin en soins palliatifs pédiatriques à l’hôpital Necker. Elle-même ancienne victime, elle a mis en place des "équipes mobiles" spécialisées dans la détection de la maltraitance. Nées grâce au financement de la Fondation des hôpitaux de France, elles sont en cours de déploiement dans sept hôpitaux.

Formées de pédiatres, de psychologues et d’assistantes sociales, elles aident les praticiens à distinguer un bleu lié à une chute de traces de coups, et les accompagnent dans la rédaction de formulaires de signalement. Objectif : réduire le fossé entre le nombre d’enfants victimes et celui des cas détectés.

Former les professionnels au contact avec les enfants

En effet, ces violences passent souvent inaperçues, même auprès du corps médical. Dans les hôpitaux pédiatriques parisiens par exemple, on estime à 25.000 le nombre d’enfants victimes de maltraitance qui passent chaque année par les urgences. Dans ce flot de jeunes patients, les médecins en signalent moins de 600, soit environ 2%.

Parmi les freins au repérage : le manque de formation des professionnels de santé. "Moi, petite, j’ai attendu plus de dix ans pour que quelqu’un détecte que quelque chose n’allait pas", raconte le Dr Gréco. "Je n’ai eu qu’une heure de formation sur la maltraitance durant toutes mes études de médecine."

"Il ne faut jamais rester seul"

A l’hôpital Trousseau, l’équipe mobile se constitue progressivement. Un infirmier et une assistante sociale rejoindront bientôt Solène Loschi, médecin, référente en protection de l’enfance de l’hôpital. Elle reçoit pour l’instant quatre appels par jour de la part de ses confrères qui, face à un cas suspect, ont besoin d’un avis extérieur.

"Evidemment que j’ai laissé passer des cas", confie l’urgentiste Nathalie De Suremain. "C’est compliqué aussi, la charge émotionnelle. Donc face à un cas suspect, il ne faut jamais rester seul ! C’est bien de pouvoir de pouvoir en parler à deux."

Prévenir les violences

Une fracture alors que le bébé ne se déplace pas encore, un bleu sur des zones couvertes par des vêtements, des pleurs inexpliqués : autant d’indices de maltraitance que ces médecins lèvent ou confirment avec des examens complémentaires. "Si on ne se pose pas la question de la maltraitance, on ne va pas aller chercher des fractures sous-jacentes ou des lésions cérébrales parce que le bébé a été secoué", explique le Dr Loschi.

"Nous travaillons avec les familles pour leur venir en aide", précise le Dr De Suremain. Les spécialistes le savent : s’ils arrivent à détecter les risques de violences à temps, toute une batterie de suivis - médical, social, psychologique - pourra être mise en place pour prévenir les violences et ainsi de permettre aux enfants de rester dans leurs familles le plus longtemps possible.