Jean Tirole espère une vision économique de long terme des dirigeants et des populations à la fin de la crise sanitaire. 2:06
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Antoine Cuny-Le Callet
La crise sanitaire du coronavirus sera également un choc économique de grande ampleur. Invité d'Europe 1 dimanche, le prix Nobel d'économie Jean Tirole a partagé ses espoirs pour l'après crise. Cette-dernière va, selon lui, forcer à un changement des mentalités pour "mieux envisager l'avenir" et rejeter les visions court-termistes.
INTERVIEW

Selon l'Insee, le confinement dû à l'épidémie de coronavirus a déjà fait chuter d'un tiers l'activité économique et chaque mois de confinement représenterait une perte de trois points de PIB. Le prix Nobel d'économie Jean Tirole réagissait, dimanche au micro d'Europe 1, à ces chiffres vertigineux. Évoquant le sérieux de la crise, il a affiché son soutien aux mesures économiques actuelles tout en affirmant que cet événement devrait précipiter un changement des mentalités. "Il faut moins de court-termisme [...] envisager l'avenir plutôt que de consommer."

"Aujourd'hui, il faut dépenser, sauver l'économie, protéger les particuliers qui sont fragiles." Pour Jean Tirole, les pompiers de l'économie doivent préférer le canadair à la lance à eau. Le sauvetage des entreprises par les gouvernements et l'émission de liquidités par la Banque centrale européenne sont nécessaires. L'économiste anticipe, malgré quelques réticences, plus d'empathie et de solidarité entre les pays européens en cette période de guerre.

Une dette qu'il faudra éponger

Tout en louant la politique économique, il regrette des vision de court terme : "On s'est mis dans une situation où on pourrait avoir des difficultés en disant 'la dette c'est pas grave'." La dette des pays européens devrait en effet exploser, et la question du partage de son poids n'est pas sans faire naître quelques tensions.

Aussi, Jean Tirole souligne au micro de Patrick Cohen la nécessité d'un soutien de la population, pour que les mesures du gouvernement soient suivies d'effets. "On le voit avec le climat", déclare-t-il. "Si la population ne veut pas de tarification du carbone, c'est très difficile de la mettre en œuvre." L'économiste fustige par ailleurs la rhétorique anti-mondialisation dont l'application politique aurait, selon lui, des conséquences dramatiques sur le pouvoir d'achat.