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Solène Delinger
L'Éducation Nationale célèbre, ce jeudi, le 116e anniversaire de la promulgation de la loi 1905 de la séparation de l'Église et de l'État. Les établissements scolaires sont en première ligne pour faire comprendre la laïcité aux élèves, une tâche loin d'être évidente. Selon une nouvelle enquête de l'Ifop pour le compte de la Licra, 40 % des lycéens estiment que les normes et règles de leur religion sont plus importantes que les lois de la République. 
INTERVIEW

La journée de la laïcité à l'école a lieu ce jeudi, à l'occasion du 116e anniversaire de la promulgation de la loi 1905 de la séparation de l'Église et de l'État. Parmi les lieux où la laïcité pose problème : l'école, où le nombre d'atteintes à ce principe républicain a augmenté de plus de 10% ce trimestre, selon une nouvelle enquête de l'Ifop pour le compte de la Licra. Quelles sont-elles ? Comment se manifestent-elles ? Et comment expliquer ce phénomène ? François Kraus, directeur du pôle politique et actualités à l'Ifop, livre son analyse au micro d'Europe 1. 

Des atteintes en hausse au collège

D'après cette enquête, un lycéen sur deux a remis en cause des enseignements au nom de la religion. On compte 614 signalements, soit 67 de plus que lors du dernier recensement, en avril dernier. Cette augmentation se voit surtout au collège, où cela représente 51% des faits recensés. Ce chiffre diminue en revanche au primaire, alors qu'il avait tendance à augmenter ces dernières années. Ces atteintes sont majoritairement le fait des élèves, via des provocations verbales. Alors qu'il s'agissait auparavant de contestations de la part des parents. Géographiquement, ces incidents sont concentrés pour moitié dans l'académie de Versailles, Créteil, Lille, Nice, Toulouse et Nantes. 

Parmi les chiffres les plus frappants de l'enquête : 40% des lycéens estiment que les normes et règles de leur religion sont plus importantes que les lois de la République. Un chiffre nettement supérieur à la moyenne française, 23%.

Contestation du principe de neutralité religieuse

Comment se manifestent ces atteintes ? "La moitié des lycéens dans le public ont déjà constaté des demandes, qu'ils soient servis des menus conformes à des pratiques confessionnelles, mais aussi un peu près un tiers ont déjà observé des absences de jeunes filles à des cours de natation ou des cours d'éducation physique au nom de convictions religieuses", explique François Kraus au micro d'Europe 1. "Donc, on a non seulement une contestation du contenu [de l'enseignement], par exemple ceux liés à l'histoire ou à l'instruction civique, mais aussi une contestation du principe de neutralité religieuse", affirme le directeur du pôle politique et actualités à l'Ifop. 

Des atteintes plus nombreuses dans les ZEP

Ces atteintes touchent davantage les lycées de zones prioritaires (ZEP). "Les deux tiers des lycéens qui sont classés en établissement prioritaire ont déjà observé, au moins une fois durant leur scolarité, une forme d'expression du religieux qui peut aller vers des formes d'entre-soi durant certains moments de la vie scolaire. On a quand même la moitié d'entre eux qui ont déjà observé, par exemple, le refus de donner la main à quelqu'un qui n'est pas de sa religion. Un tiers ont déjà vu l'organisation de la table à la cantine en fonction de la religion". 

 

Une augmentation liée au décès de Samuel Paty

 

60% des lycéens acceptent qu'on montre des caricatures religieuses en cours. Le chiffre tombe à 19% pour les élèves musulmans. "La question du droit à la critique des religions à l'école met en exergue le fossé qui existe entre les élèves musulmans et les autres sur ces sujets", observe François Kraus. Le ministre de l'Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, explique que cette augmentation des atteintes à la laïcité est aussi liée à la commémoration de la mort de Samuel Paty. Et le spécialiste de conclure : "Les cérémonies, ont occasionné plus de 200 incidents, avec quand même 91 faits d'apologie du terrorisme. C'était beaucoup moins l'an dernier, juste après la mort du professeur".