Kerviel : le témoignage qui change tout ?

Philippe Houbé, longtemps présenté comme "témoin mystère", a été entendu jeudi matin par le tribunal.
Philippe Houbé, longtemps présenté comme "témoin mystère", a été entendu jeudi matin par le tribunal. © Maxppp
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avec AFP , modifié à
Philippe Houbé, longtemps présenté comme "témoin mystère", a été entendu jeudi matin.

Il assure avoir accepté de témoigner par souci de "justice". Le "témoin mystère" annoncé depuis plusieurs semaines par l'avocat de Jérôme Kerviel, Me David Koubbi, est sorti de l'ombre jeudi. Philippe Houbé, un chargé de compte pour la société de courtage Newedge (anciennement Fimat), filiale de la Société Générale, a été entendu par le tribunal. Il a dénoncé l'attitude de la banque vis-à-vis du trader déchu.

La Société Générale "insulte la profession"

Costume gris sombre et carnet, dans lequel il a consigné des notes, à la main, Philippe Houbé explique pourquoi il témoigne. "C'est un cas de conscience... J'ai connu l'injustice, je sais ce que c'est, je la supporte assez difficilement", assure-t-il. Pour lui, la manière dont la Société Générale a présenté l'affaire Kerviel "insulte la profession, le bon sens et la justice".

Dans cette affaire, "les représentants de la direction n'ont pas assumé leurs responsabilités", juge-t-il. Ils ont selon lui "sali" l'entreprise et son personnel "pour garder leurs postes et les avantages qui vont avec". Pour lui, il est "impossible" que sa hiérarchie n'ait rien vu des prises de positions massives de Jérôme Kerviel, comme l'affirme la banque. "Des choses énormes soi-disant dissimulées par des petites bidouilles ?", c'est impossible, a insisté Philippe Houbé.

Une théorie du complot "complètement délirante"

En face, la banque a expliqué que Philippe Houbé n'a eu en main que des données partielles, ne lui permettant pas d'avoir une vue d'ensemble des positions de Jérôme Kerviel. Devant la cour, Philippe Houbé a par ailleurs affirmé que la Société Générale avait alourdi la perte imputée à Jérôme Kerviel, manoeuvre destinée à alléger ses propre pertes dues à la crise des subprimes.

La banque, mais également Maxime Kahn - le chef trader de la SocGen qui avait liquidé les positions prises par Kerviel en janvier 2008 - entendu avant lui, ont déjà nié ces allégations. Maxime Kahn a affirmé avoir débouclé ni plus, ni moins, que les 50 milliards de positions de Jérôme Kerviel. L'opération, a-t-il dit, devait rester "confidentielle" : si le marché l'avait su, la banque n'aurait "plus (été) solvable". Il a en outre qualifié de "complètement délirante" la théorie du complot brandie depuis le début du procès par le camp Kerviel.

Une plainte pour faux et usage de faux déposée par Jérôme Kerviel avant son procès en appel, pour une affaire d'enregistrements qu'il affirme trafiqués, a par ailleurs été évoquée jeudi à l'audience. L'avocat du trader a prévu d'évoquer cette plainte lors de sa plaidoirie. Une enquête préliminaire est ouverte sur ce point.