Chirac condamné: quelles conséquences?

Pour Me Eolas, avocat et blogueur, la condamnation de l’ancien président à deux ans de prison avec sursis dans l’affaire des emplois fictifs de la Ville de Paris est "symbolique".
Pour Me Eolas, avocat et blogueur, la condamnation de l’ancien président à deux ans de prison avec sursis dans l’affaire des emplois fictifs de la Ville de Paris est "symbolique". © REUTERS
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Europe1.fr fait le point sur ce qu’implique une telle condamnation pour l’ancien président.

"Jacques Chirac n’a rien à craindre pour son statut". Me Eolas, avocat et blogueur, est formel, la condamnation de l’ancien président à deux ans de prison avec sursis dans l’affaire des emplois fictifs de la Ville de Paris est purement "symbolique".

"Symbolique mais sévère", reconnaît l’avocat contacté par Europe1.fr. Pour autant, les nombreux avantages dont bénéficie Jacques Chirac en tant qu’ancien chef de l’État ne sont pas remis en cause.

Alors que certains évoquent un possible retrait de la légion d’honneur, et qu'Eva Joly réclame sa démission du Conseil constitutionnel, Europe1.fr fait le point sur ce que risque Jacques Chirac.

Chirac exclu du Conseil constitutionnel ? "Il me semble que le Conseil constitutionnel ne peut pas fonctionner avec un membre qui est condamné à deux ans avec sursis pour prise illégale d'intérêt et abus de confiance". La phrase est signée Éva Joly, interrogée jeudi sur BFMTV, en réaction à la condamnation de Jacques Chirac. La candidate à la présidentielle d’Europe-Ecologie Les-Verts estime que l’ancien président doit "tirer les conséquences de sa condamnation" en démissionnant.

Une proposition vaine puisque, formellement, aucun membre de droit du Conseil constitutionnel ne peut être démis ou démissionner. De fait, les anciens présidents de la République, à l’instar de Jacques Chirac et de Valéry Giscard d’Estaing, sont nommés membres de droit à vie de l’institution.

"La seule chose qui peut contraindre un membre du Conseil constitutionnel à quitter temporairement sa place est lorsqu’il occupe une fonction politique», résume Me Eolas. C’est pourquoi, entre 1988 et 2004, Valéry Giscard d’Estaing, membre de droit au Conseil constitutionnel depuis 1981, n’a pas siégé au sein de l’institution. Durant cette période, il occupait en effet la fonction de président du conseil régional d’Auvergne. Les "Sages" avaient alors décidé de le mettre en congé, mais en aucun cas de le démettre de ses fonctions.

Dans le cas de Jacques Chirac, c’est davantage son état de santé qui pourrait lui ôter son droit à siéger parmi les "Sages".  Jacques Chirac, qui souffre de troubles neurologiques, a d’ailleurs décidé en mars dernier de ne pas siéger durant la procédure judiciaire engagée contre lui. Une fois la condamnation prononcée, il pourrait choisir de siéger à nouveau au Conseil constitutionnel. "Mais vu son état de santé, il devrait être convenu qu’il ne viendra plus jamais y siéger", commente Me Eolas.

Chirac menacé de perdre sa Légion d'honneur ?  En mai 1995, lors du premier acte de sa cérémonie d'investiture comme président de la République, Jacques Chirac avait été reconnu comme grand maître de la Légion d'honneur et la dignité de Grand-Croix lui avait été alors conférée de "plein droit".

Interrogé par Europe1.fr, Me Eolas assure que cette distinction n’est aucunement remise en cause. "Jacques Chirac peut être déchu de sa légion d’honneur que s’il  écope d’au moins un an de prison ferme", explique l’avocat. Toutefois, selon l’article R92 du code de la Légion d’honneur, l’ancien président peut faire l’objet d’un blâme où d’une suspension.

"Il est peu probable que le conseil de l’ordre se saisisse du cas de Jacques Chirac. La tradition d’indulgence en France veut que l’ancien président ne soit pas embêté avec cette affaire. Ces deux mandats de président et ce qu’il a fait pour la France va sans doute prévaloir sur sa condamnation", estime Me Eolas.

D’autres statuts remis en cause ? "Rien d’autres n’est remis en cause", assure Me Eolas. Ainsi, Jacques Chirac ne perd pas les avantages dont il bénéficie en tant qu’ancien président. "Protection, chauffeurs, secrétaire, retraite, sa condamnation ne change rien", poursuit l’avocat.

Une image égratignée ? La seule conséquence de cette condamnation est donc symbolique. "Ces deux ans de prison avec sursis viennent clairement entacher son image. Cela entache sa biographie qu’il aurait souhaitée plus glorieuse. Les hommes politiques ont à cœur de se construire une légende dorée, la sienne est à présent un peu moins reluisante", résume Me Eolas.

A l’annonce de la condamnation, de nombreux politiques ont tenu à souligner les qualités de l’homme plutôt que ses démêlés avec la justice. Ainsi, pour François Fillon, cette condamnation ne vient pas altérer l’image de l’ancien président. "C'est une décision qui à mon sens ne viendra pas altérer la relation personnelle qui existe entre les Français et Jacques Chirac. C'est une relation dont chacun a pu constater au cours des dernières années qu'elle était extrêmement forte", a-t-il commenté jeudi. Un discours partagé par de nombreuses personnalités de la classe politique. François Hollande a d’ailleurs exprimé "une pensée pour l’homme", après la condamnation.

Selon le dernier sondage Ifop du mois de décembre, Jacques Chirac reste d’ailleurs la personnalité préférée des Français.