Le bilan d'Emmanuel Macron sur l'immigration est jugé insuffisant par certains de ces conseillers. 3:12
  • Copié
Louis de Raguenel, édité par Antoine Terrel , modifié à
Plusieurs conseillers de l'exécutif interrogés par Europe 1 pointent les insuffisances de la politique migratoire d'Emmanuel Macron. Ils évoquent notamment les expulsions souvent non exécutées et une trop grande porosité des frontières selon eux. 
ANALYSE

Depuis l'attaque au commissariat de Rambouillet, la question migratoire est revenue au centre du débat politique. L'extrême-droite et une partie de la droite insistent en effet pour établir un lien direct entre terrorisme et immigration et profitent de la séquence pour attaquer le bilan d'Emmanuel Macron en la matière. Mais l'action du président de la République n'est pas seulement contestée par l'opposition. Au sein du gouvernement, plusieurs conseillers interrogés par Europe 1 se montrent dubitatifs sur la politique migratoire mise en place depuis quatre ans.

Le constat est cinglant, selon eux : la politique migratoire d’Emmanuel Macron est un échec du quinquennat. Et ils poursuivent : "Nous nous étions engagés à accueillir moins de personnes en France, mais mieux." Or, 2019 a été une année record en termes de titres de séjour délivrés.

Un système de protection sociale attractif

Au moment d'expliquer les raisons de ce qu'ils considèrent comme un échec, ces conseillers évoquent tout d'abord la générosité de la protection sociale en France et de son système de santé, unique au monde. Une thèse qui reste discutée par les experts. Selon une étude de l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes) et de l'université de Bordeaux, publiée en 2019, seulement 10% des sans-papiers invoquaient la santé comme motif de migration. Et seul un migrant en situation irrégulière sur deux, éligible à l'Aide médicale d’État, en profite effectivement pour accéder aux soins.

Des expulsions souvent non exécutées

Les conseillers de l'exécutif mécontents soulignent également avec amertume que 96% des personnes déboutées de leur demande d’asile ne quittent pas le territoire après examen de leur dossier. Elles formulent souvent un recours et restent en France, ce qui est parfaitement légal pendant le temps d'examen de ce recours.

Mais s'agissant des obligations de quitter le territoire français aussi, pour les clandestins ou des personnes en fin de droit, 85% des expulsions ne sont pas exécutées. Dans les faits, sur 120.000 personnes concernées en 2019, moins de 19.000 expulsions ont été effectives. 

Troisième raison, toujours selon les sources d'Europe 1 : alors que l'Algérie, le Maroc et la Tunisie représentent les trois premières nationalités en nombre de demandes de titre de séjour, ces pays refusent de reconnaître environ la moitié des ressortissants que la France cherche à expulser.

Des frontières jugées trop poreuses

Autre facteur : le poids des étudiants étrangers qui viennent en France. Ces derniers représentent 30% des 276.000 titres de séjour délivrés en 2019. Mais ils ne repartent pas toujours à la fin de leurs études, et on se retrouve parfois dans la situation où certains pays en développement réclament auprès des autorités françaises le retour de ces étudiants pour servir leur pays.

Enfin, les conseillers interrogés par Europe 1 mettent en cause une supposée porosité des frontières françaises. C’est pour cela que les effectifs de police dédiés à leur surveillance vont augmenter. Et alors que la France présidera l’Union européenne dès le début de l’année 2022, Emmanuel Macron entend bien profiter de cette opportunité pour réformer l’espace Schengen.