Que retenir du quinquennat de François Hollande ?

© AFP
  • Copié
Axel Roux
Le président laisse sa place à Emmanuel Macron à l'Elysée. L'occasion de dresser un dernier état des lieux de son action. 

Au terme de cinq années d’exercice du pouvoir, marquées par les pires attentats que la France ait connu, François Hollande aura été le président le plus impopulaire de la Vè République. De ses promesses de campagne à sa renonciation de briguer un second mandat, Europe 1 revient sur un quinquennat en demi-teinte.

La promesse trahie du Bourget

L’algarade a été l’un des marqueurs de sa campagne présidentielle. Le 26 janvier 2012, François Hollande harangue la foule : "Mon ennemi, c’est le monde de la finance." Derrière la formule coup de poing, le candidat socialiste s’engage à des réformes symboliques à gauche, cinq ans après le séisme économique déclenché par la crise des subprimes. A commencer par la réforme bancaire et financière, qui doit séparer les activités de dépôt de celles liées à la spéculation.

Pour quel résultat ? Très tôt dans son quinquennat, François Hollande abandonne l’idée de mener ce bras de fer face aux grandes banques françaises, sous les conseils de son secrétaire général adjoint d’alors, un certain Emmanuel Macron. Adoptée courant 2013, la loi de séparation et de régulation des activités bancaires restera une réforme a minima, réduisant son périmètre d’action à un peu moins de 1% des activités financières. La même logique conduira le gouvernement à reculer sur d’autres engagements, à l’image de la suppression des stock-options, l’encadrement des bonus, ou encore la limitation des salaires des patrons. Autant de renoncements vécus comme une "trahison" par l’aile gauche du PS.

Gallois

François Hollande, entouré d'Emmanuel Macron et de Louis Gallois, le 23 octobre 2013, lors d'une réunion sur l'innovation et la compétitivité à l'Elysée. @AFP

Le virage social-libéral

Après le "trop dit" sur la finance, le quinquennat de François Hollande sera marqué par le "non-dit" du tournant social-libéral. Élu dans une France sans croissance, François Hollande fait le pari d’agir vite, quitte à opérer un volte-face. Sur la base du rapport Gallois, qui plaide l’allègement des charges sur les entreprises pour relancer la compétitivité, il opte pour une relance économique basée sur l’offre. Un virage entamé fin 2012 avec le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), avant d’être achevé avec le pacte de responsabilité annoncé lors de ses voeux pour l’année 2014.  

Trois ans après, si la France se trouve dans une situation économique plus favorable qu’en 2012, l’augmentation du nombre de chômeurs reste le boulet du quinquennat.

Politiquement, François Hollande a payé cher ce contre-pied. Les choix fiscaux favorables aux entreprises provoquent une scission entre l’aile gauche et l'exécutif. Une crise renforcée par le départ d’Arnaud Montebourg, Aurélie Filippetti et Benoît Hamon du gouvernement, fin 2014. Une "fronde" sociale qui ne quittera plus le quinquennat et illustrée sur le pavé contre la loi Travail en fin de mandat.

Hollande, chef de guerre en Afrique

Mali

Dans les rues d'Ansongo, une ville du nord du Mali, lors d'une visite officielle de François Hollande, le 29 janvier 2013. @AFP

Affaibli sur la scène intérieure, les opérations extérieures ont donné l’occasion à François Hollande d’asseoir son rang de chef d’Etat. C’est notamment sur le continent africain qu’il a endossé les habits de "chef de guerre" pour ne plus les quitter. D’abord, lors de l'intervention française au Mali en janvier 2013, pour endiguer l’avancée des groupes djihadistes qui menaçaient de prendre le contrôle de tout le pays. Une intervention qui s’est achevée en juillet 2014, pour laisser place à une opération de lutte contre le terrorisme dans la zone du Sahel.

Ensuite en Centrafrique, où les forces françaises ont été déployées pour contenir un conflit inter-religieux menaçant de faire sombrer le pays dans le chaos. Cette opération s’est achevée à l'automne 2016.

Une France sous état d’urgence

Meurtri par une série d'attentats, le quinquennat Hollande bascule sous état d'urgence le 13 novembre 2015, après les fusillades qui ont fait 130 morts à Paris et à Saint-Denis. Le régime d’exception est par la suite devenue la règle, se prolongeant jusqu'après l'élection présidentielle. Théâtre d'atrocités, notamment dans la ville d'Alep, et lieu de départ de centaines de milliers de réfugiés en direction de l'Europe, la Syrie a constitué le fil rouge de ce quinquennat sanglant. D'une crise à l'autre, François Hollande a conservé les habits de "chef de guerre" endossés en Afrique, plaçant la France dans le rang des pays de la coalition internationale engagée contre l’Etat islamique.

Bataclan1280

François Hollande et Barack Obama, le 30 novembre 2015, devant le mémorial au Bataclan, à Paris. @AFP

Sur la scène intérieure, le débat sur la déchéance de nationalité, proposée au lendemain des attentats du 13-Novembre, achève de fracturer la gauche. L’épisode signe la démission du gouvernement de Christiane Taubira, artisane du mariage pour tous, l’une des mesures les plus symboliques à gauche. François Hollande a beau jeu d’enterrer cette mesure, la séquence est devenue un marqueur pour les déçus du hollandisme.   

La réussite de la COP21

C’est sans doute le succès diplomatique majeur de François Hollande. Fin 2015, la France réussit le pari de mettre d’accord 195 pays sur des objectifs chiffrés en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Jugé ambitieux, le texte issu de la COP21 acte la baisse de la consommation énergétique, une moindre dépendance aux énergies nucléaire et fossiles et met en place la taxe carbone.

COP21

Laurent Fabius et François Hollande, après la ratification des engagements de la COP21 par les pays membres. @AFP

Sur le plan écologique, le gouvernement de François Hollande a cependant reculé sur d’autres mesures, notamment dans le dossier nucléaire, en ne tenant pas sa promesse de fermer la centrale de Fessenheim.

Un PS en miette

Après des déroutes électorales répétées - "vague bleue" aux élections municipales, perte du Sénat en 2014, percée de la droite aux régionales de 2015 -, la  "synthèse" hollandaise a laissé la place à la "balkanisation" de la gauche.

Des politiques économiques et sociales décriées par l’aile gauche au passage en force de projets de loi par le 49.3 - loi Macron et loi Travail - François Hollande aura scindé en deux sa majorité présidentielle sans parvenir à briguer un second mandat.

À l’issue de son quinquennat, le PS ne s’est même pas qualifié pour le second tour de la présidentielle, vampirisé par Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon. Fort de ses 19,58 % des voix au premier tour, le leader de La France insoumise rêve que son mouvement devienne le principal parti d'opposition au gouvernement Macron. Au détriment d’un PS qui craquelle de toutes parts.

PS