Pourquoi Emmanuel Macron relance l'épineux dossier de la réforme des retraites

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Louis de Raguenel et Nicolas Beytout
Alors qu'on pensait la réforme enterrée jusqu'à la présidentielle, Emmanuel Macron est tenté de s'intéresser de nouveau, et plus rapidement que prévu, aux retraites. Une façon pour lui d'aller chasser sur les terres de la droite comme de la gauche, préparant ainsi le terrain de sa campagne électorale.
ANALYSE

Ça s'en va et ça revient... un peu plus vite que prévu. Selon Les Echos, Emmanuel Macron est bel et bien tenté de réformer les retraites. Alors qu'on croyait le dossier refermé jusqu'à l'élection présidentielle, puisque sa réouverture était conditionnée à la disparition du coronavirus, le chef de l'État est prêt à abattre cette carte. Ni Matignon, ni Bercy, ni le ministère des Affaires sociales pourtant en charge du dossier n'étaient prévenus. À ce stade, il n'est cependant toujours pas question d'une réforme de l'âge de départ, ni d'âge pivot, ni même encore de durée de cotisation. Pas de "grande" réforme, donc.

Aller draguer la droite... et la gauche

En réalité, Emmanuel Macron envisage de s’attaquer à un sujet extrêmement symbolique et donc à forte portée politique : la suppression des régimes spéciaux. Il devrait en parler mercredi au conseil des ministres, même si pour le moment rien n’est tranché définitivement. Cette accélération est très politique, le chef de l'État gardant en tête l'idée qu'il faut parler à une droite qui l'attaque beaucoup en ce moment. Et essayer de prouver à cette droite, une fois de plus, qu’il la comprend.

Mais avec Emmanuel Macron, le fameux "en même temps" n'est jamais loin. Selon nos informations, si le chef de l’Etat envisage donc de supprimer les régimes spéciaux, il prévoit dans le même temps d’instaurer une retraite minimum de 1.000€. Mesure qui s'adresse plutôt à son côté gauche. Plutôt astucieux politiquement, mais cela se heurte au front du refus syndical et à la très grande prudence du patronat. Celui-ci ne manquera pas de souligner que la suppression des régimes spéciaux ne s'appliquant qu'aux nouveaux embauchés, elle ne produira pas d'effets avant une trentaine d'années, tandis que l'augmentation des pensions, elles, pèsera immédiatement sur les comptes publics.

Montrer que c'est un président actif

Par ailleurs, c'est une occasion pour le président d'enrichir son bilan, alors que son action de réformateur a été diminuée par les gilets jaunes, puis sérieusement entravée par le Covid-19. Une attitude raccord avec le personnage, qui a déjà fait montre de son appétit pour l'action permanente et le besoin de montrer qu'il agit là où ses prédécesseurs avaient mis leur mandat sur pause, le temps de la campagne électorale.

Avec de telles mesures avant tout symboliques, le président est bel et bien en campagne électorale. Et l’objectif politique d’Emmanuel Macron reste le même qu’au premier jour : essayer de fracturer le plus possible la droite et la gauche, qui de leur côté crient au cynisme.