"Le traitement des Kanaks a été le pire de tous les occupants de nos colonies", pour René Dosière

René Dosière 1280 5:42
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Ugo Pascolo , modifié à
René Dosière, rapporteur du statut de la Nouvelle-Calédonie en 1998 revient sur le drame d'Ouvéa et sur la construction de la nation calédonienne, alors qu'Emmanuel Macron y est en déplacement. 
INTERVIEW

"On a tiré les leçons d'Ouvéa". Invité d'Europe 1 Bonjour vendredi, René Dosière, ancien député PS, spécialiste de la Nouvelle-Calédonie et rapporteur du statut de la Nouvelle-Calédonie en 1998 fait le point sur le statut de ce territoire français, 30 ans après la prise d'otages d'Ouvéa, et alors qu'Emmanuel Macron est sur place, à quelques mois seulement d'un référendum sur l'indépendance de cette dizaine d'îles.

"Le pire traitement". "Ouvéa a complètement renversé la vapeur de la Nouvelle-Calédonie", explique René Dosière. "'On ne s'est plus engagé vers une guerre civile, comme c'était le risque, mais sur une période de 30 ans pendant laquelle on s'est préoccupé du développement et de la restauration de l'identité kanak". "Il faut rappeler que le traitement des Kanaks a été le pire de tous les occupants de nos colonies", lance le spécialiste. "Le premier bachelier kanak a eu son diplôme en 1962 ! Mais tout ça, c'est terminé". 

De la colonie à la "petite nation". Alors que l'on commémore les 30 ans de "l'assaut des 19" dans la grotte d'Ouvéa, où des indépendantistes tenaient des gendarmes en otage, est-ce un mauvais timing pour le voyage d'Emmanuel Macron ? "Je pense que le président, qui représente l'autorité de la République, a toute sa place en Calédonie", estime l'expert au micro d'Europe 1. "L'Etat est partenaire du processus de développement de la Nouvelle-Calédonie : on a les indépendantistes, les anti-indépendantistes et l'Etat au milieu sur lequel chacun s'appuie", analyse René Dosière.

 

"Depuis l'accord de Nouméa [qui prévoit un transfert de certaines compétences de la France vers la Nouvelle-Calédonie, ndlr] il y a 20 ans, la Nouvelle-Calédonie n'est plus une colonie, mais une petite nation. L'assemblée locale a un pouvoir législatif, il y a des domaines comme la fiscalité, dans lesquels le Parlement français ne peut plus intervenir", rappelle l'ancien député PS. 

Une "petite nation" à l'intérieur de la "grande nation française". Pour autant, le référendum qui doit statuer sur l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie n'est pas une fin en soit mais une étape. "Dans l'esprit des Français, quand on dit 'indépendance', on voit 'rupture', comme la guerre d'Algérie", explique l'expert. "Mais là, il ne s'agit pas du tout de ça : les indépendantistes ne veulent pas rompre avec la France". "C'est une étape dans la construction d'une nation calédonienne dans laquelle tout le monde sera accepté", détaille-t-il. "C'est une démarche nouvelle regardée partout dans le monde (...), c'est quelque chose de tout à fait nouveau : une petite nation qui se construit pour l'instant à l'intérieur de la grande nation française".