Escroquerie au "faux Le Drian" : 7 et 11 ans de prison pour les deux principaux prévenus

Gilbert Chikli a été condamné dans l'affaire du "faux Le Drian".
Gilbert Chikli a été condamné dans l'affaire du "faux Le Drian". © Benoit PEYRUCQ / AFP
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avec AFP , modifié à
Le tribunal correctionnel de Paris a condamné mercredi à 7 et 11 ans d'emprisonnement deux hommes, considérés comme les cerveaux d'une escroquerie qui a consisté à se faire passer pour le ministre Jean-Yves Le Drian auprès de riches personnalités.

Sept membres d'une même bande étaient soupçonnés d'avoir pris part à une vaste escroquerie en se faisant passé pour le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. Ils auraient extorqué 55 millions d'euros auprès de plusieurs personnalités. Gilbert Chikli, 54 ans, a été condamné le plus lourdement mercredi, avec une peine de dix ans à laquelle s'ajoute une peine complémentaire d'un an pour "prise du nom d'un tiers". Il a aussi été condamné à deux millions d'euros d'amende. Son co-prévenu de 35 ans, Anthony Lasarevitsch, a été condamné à sept ans d'emprisonnement et à une amende d'un million d'euros. 

Les cinq autres hommes, âgés de 27 à 49 ans, étaient poursuivis pour des complicités à différents degrés. L'un d'entre eux a été relaxé et les quatre autres condamnés à des peines allant de 15 mois avec sursis à cinq ans de prison. "C'est un scandale !", s'est emporté Gilbert Chikli dans le box, à l'énoncé du jugement. "Vous devriez avoir honte !" Le tribunal a considéré que ces deux hommes, qui ont vigoureusement contesté les faits pendant leur procès en février, étaient bien derrière une vaste arnaque qui a coûté 55 millions d'euros à trois personnes.

Masque et costume de ministre

L'escroquerie a consisté, entre 2015 et 2017, à appeler des personnalités en se présentant comme Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense. Il est devenu depuis ministre des Affaires étrangères. Les escrocs demandaient une aide financière d'urgence pour des opérations secrètes de l'Etat français (lutte contre le terrorisme ou libération d'otages en Syrie) tout en promettant un remboursement immédiat de la Banque de France. Dans certains cas, ils n'ont pas hésité à organiser des vidéoconférences, enfilant un costume et un masque du ministre et s'asseyant derrière un bureau soi-disant installé dans le sous-sol du ministère.

Les enquêteurs ont listé plus de 150 personnes et organisations contactées : le roi du Maroc, le président du Gabon, les patrons de Total et de Vinci, les Apprentis d'Auteuil ou encore l'archevêque de Paris. Le tribunal est resté en deçà des réquisitions de la procureure Alice Chérif, qui avait requis lors du procès 10 et 14 ans de prison et deux millions d'euros d'amende à l'encontre de ce "duo". 

Albert II après Le Drian

Gilbert Chikli est connu de la justice française comme un pionnier de l'escroquerie dite au "faux président", selon laquelle un usurpateur se fait passer au téléphone pour un patron auprès de ses salariés, dans le but de se faire transférer de l'argent. En 2015, il a été condamné, alors qu'il était en fuite en Israël, à sept ans de prison pour avoir escroqué plusieurs grandes entreprises. Son histoire a inspiré un film sorti la même année : "Je compte sur vous" de Pascal Elbé. A l'été 2017, Gilbert Chikli a été interpellé aux côtés d'Anthony Lasarevitsch en Ukraine. L'enquête a montré qu'ils semblaient préparer une autre arnaque consistant, cette fois, à usurper l'identité d'Albert II de Monaco : le tribunal les a aussi condamnés pour ces faits.