Pouvoir d'achat, écologie, démocratie... Ce qu'il faut retenir du débat des européennes

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Mardi, Matthieu Belliard et Laurence Ferrari ont animé le deuxième débat "Demain, quelle France dans quelle Europe ?" diffusé sur Europe 1 et CNews.

Six responsables politiques et une question : "Demain, quelle France dans quelle Europe ?" Mardi soir, dès 20h45, Matthieu Belliard pour Europe 1 et Laurence Ferrari pour CNews ont animé le deuxième débat des européennes.

À moins de trois semaines des élections, Nathalie Arthaud, tête de liste Lutte ouvrière, François Asselineau, président et tête de liste de l'UPR, Jean-Christophe Lagarde, tête de liste UDI, Florian Philippot, tête de liste des Patriotes, Fabien Roussel, secrétaire national du PCF et Guillaume Balas, numéro trois sur la liste Génération.s, sont venus exposer leur vision pour le pays et l'Union européenne. Il a d'abord été question de pouvoir d'achat et d'écologie, puis d'intégration européenne et d'immigration. Un premier débat avait rassemblé, le 10 avril dernier, sept autres chefs et représentants de partis (LR, LREM, EELV, Debout la France, PS, RN et France insoumise). Il avait alors permis de clarifier les positions de chacun

Les informations à retenir : 

  • Europe 1 et CNews organisaient leur deuxième débat des européennes mardi soir, à partir de 20h45
  • Six représentants de partis (Lutte ouvrière, UPR, Génération.s, UDI, Les Patriotes et PCF) ont débattu pendant 2h30
  • Ils ont d'abord abordé la thématique du pouvoir d'achat, avant de s'intéresser à l'écologie, à l'Union européenne et à l'immigration

La gauche plaide pour l'accueil des migrants

Interrogés sur la question de l'immigration, les candidats se divisent rapidement en deux camps distincts. D'un côté, Florian Philippot fustige l'accueil en général, estimant qu'il y a trop d'immigration légale comme illégale. Un peu plus mesuré, Jean-Christophe Lagarde estime néanmoins qu'on ne peut accueillir ouvertement que les réfugiés politiques. "Nous devons bien sûr accueillir ceux qui sont menacés politiquement. Mais pas climatiquement, ni socialement, ni économiquement, car je pense que c’est irréalisable. Vous considérez en réalité que toutes les Nations doivent avoir porte ouverte. Est-ce que l'Europe est responsable de toutes les misères ? Je ne crois pas", explique-t-il.

De l'autre, les candidats de gauche ont pris fait et cause pour l'accueil des migrants. "Je défends la liberté de circulation et d'installation totale", explique Nathalie Arthaud. "Du point de vue de ces femmes et ces hommes, ça change quoi de mourir sous les bombes ou de faim ? En quoi c'est une menace que ces gens viennent pour travailler dur ? Moi je pense qu'ils s'intégreront dans le mouvement ouvrier, dans leur camp." Pour Fabien Roussel, "Frontex doit être mis au service de ceux qui fuient leur pays. Il faut que la Méditerranée ne soit plus un cimetière". Quant à Guillaume Balas, il martèle que "oui, il faut accueillir des migrants" et abroger le règlement de Dublin. "On ment aux européens en parlant d'invasion migratoire et de grand remplacement. Nos impôts servent à payer des centres de rétention en Libye, au Soudan ou encore en Turquie. On vole, on pille, on tue avec nos impôts parce qu'on ne veut pas recevoir chez nous. On donne 6 milliards à Erdogan parce qu'on refuse d'accueillir les migrants qui arrivent. Cette politique migratoire est une approche de vieux continent riche en déclin."

François Asselineau, comme sur tous les autres sujets, refuse de se prononcer au niveau européen puisqu'il ne souhaite plus appartenir à l'Union européenne. 

Quelle vision de l'Europe ?

Au moment d'aborder la gestion européenne et la vision que chacun des représentants politiques a de l'Union, Jean-Christophe Lagarde s'est retrouvé bien seul sur le plateau. Seul à défendre la construction actuelle de l'institution. "L'Europe fédérale est un mot qui n'existe pas, l'Europe n'est pas un Etat et je ne souhaite pas qu'il en devienne un. C'est un instrument pour affirmer des politiques d'indépendance. Si vous voulez lutter contre le réchauffement climatique, cela sert à quoi de le faire tout seul dans son coin ?", a-t-il expliqué.

De l'autre côté de l'échiquier politique, Florian Philippot et François Asselineau militent pour une sortie pure et simple de l'Union européenne. Entre les deux, le PCF et Génération.s penchent pour une renégociation très dure des traités. "Ces traités nous ont fait horriblement de mal", explique Fabien Roussel. "Il faut les réécrire complètement et mettre d'autres objectifs. Un des chiffres clefs des traités européens écrits à la main par les grands patrons, les marchés financiers et la banque, c'est respecter les 3% de déficit public. Nous proposons un autre chiffre : 0% de fraude fiscale. Nous proposons de menacer d'exclure de l'UE les pays qui sont de véritables paradis fiscaux comme l'Irlande, les Pays-Bas, le Luxembourg."

Pour Guillaume Balas, le problème n'est pas l'Union européenne mais "qui la dirige". "Il faut absolument qu'il y ait un mouvement de révision des traités, mais on ne peut pas entendre la révision des traités pour faire des choses. Je propose que les prochains parlementaires européens disent qu'ils ne voteront rien tant qu'il n'y aura pas des changements fondamentaux. Les parlementaires européens sont les représentants de la nation européenne et doivent dire que ce sont eux qui décident du budget, des règles sociales, sans être bloqués par les Etats nations. C'est eux qui nous bloquent en permanence."

Comment favoriser la démocratie de proximité ?

Les représentants politiques sur le plateau détaillent leurs propositions pour améliorer le fonctionnement démocratique en France, mais aussi, pour certains, en Europe. Pour Fabien Roussel, diminuer le nombre de parlementaires n'est pas la solution. "La question, c'est de changer les députés" pour ne plus avoir une majorité présidentielle qui suit le gouvernement les yeux fermés. Le député PCF s'oppose également aux fusions de communes et veut, au contraire, leur "donner plus de moyens". Pour Jean-Christophe Lagarde aussi, la baisse du nombre de parlementaires est "démagogique" et la France a plutôt besoin de plus de décentralisation. 

Guillaume Balas, lui, propose pour la France d'entrer dans une 6e République, et en Europe de créer "un lobby citoyen" avec "30% de personnes tirées au sort, 30% de représentants d'ONG et 30% de syndicalistes qui auront pour mission d'observer si nos mandats de députés sont bien tenus, qui interviennent quand un lobbyiste voit un député et qui permettent au député européen de discuter avec la société civile". 

Pour Florian Philippot en revanche, "il ne peut y avoir de démocratie réelle dans un système qui nous a pris tout notre pouvoir, qui s'appelle l'Union européenne". Le leader des Patriotes défend un référendum d'initiative citoyenne (RIC) "déclenché par 500.000 signatures" et la "proportionnelle intégrale à tous les scrutins". François Asselineau, lui aussi, défend un RIC "en toute matière" qui permettrait de poser aux Français la question d'un Frexit.

Plan d'investissement ou livret E pour financer la transition écologique

Les responsables politiques en plateau se divisent sur les solutions à apporter pour financer la transition écologique. Pour Guillaume Balas et le mouvement Génération.s, il faut débloquer 500 milliards d'euros par an au niveau européen. Fabien Roussel, lui, veut modifier les traités européens afin que l'argent de la Banque centrale européenne puisse être utilisée à cette fin. Le représentant du PCF s'oppose à Guillaume Balas sur le nucléaire, puisqu'il estime qu'il faut continuer de s'en servir pour produire de l'électricité peu chère, tandis que le représentant de Génération.s rappelle qu'en investissant dans le nucléaire, on risque de négliger la transition écologique.

Fidèles à leur ligne eurosceptique, Florian Philippot et François Asselineau, eux, conçoivent la politique énergétique au niveau national seulement. "Pourquoi faudrait-il être ligoté avec les pays de l'Union européenne ?" demande ainsi le second. "Le numéro un mondial [de la transition énergétique], c'est la Suisse et elle n'est ni dans l'Union européenne, ni dans l'euro. La France devrait avoir une politique nationale de la transition énergétique." Ce qui fait bondir Nathalie Arthaud. "S'il y a un problème qui nécessite d'enlever ses œillères nationales, c'est quand même l'écologie."

Jean-Christophe Lagarde, de son côté, évoque l'idée d'un livret E, sur le même modèle que celui du livret A. "Imaginez-vous 450 millions d'européens qui, en plaçant leur épargne, financent la rénovation énergétique ou le développement de l'hydrogène", décrit-il. 

Des solutions diverses pour augmenter le pouvoir d'achat 

Interrogés sur leurs propositions pour augmenter le pouvoir d'achat des Français, les six responsables politiques dévoilent plusieurs pistes. D'abord, celle de l'augmentation des salaires, défendue notamment par Nathalie Arthaud et Fabien Roussel. "Il faut les augmenter de façon conséquente", défend la leader de Lutte Ouvrière. "On peut être ouvrier, employé, aide-soignant, gardien de sécurité, le travail ne paie pas. On peut travailler dur et ne pas gagner sa vie. Le salaire ne permet même plus de se loger correctement et de mettre de l'essence dans sa voiture. Il y a de l'argent, quand on voit qu'ils [les grands groupes] trouvent de quoi augmenter les dividendes." Pour le PCF, Fabien Roussel demande "une hausse du Smic de 20% et une hausse généralisée des salaires", qui pourrait être exigée des PME en accompagnant ces dernières, notamment "avec des aides publiques".

Jean-Christophe Lagarde, lui, plaide pour actionner le levier de la fiscalité, par exemple en abaissant le taux de CSG des travailleurs qui ne sont pas à temps plein. Guillaume Balas, de son côté, estime qu'il faut "faire baisser la TVA sur les produits de première nécessité". En outre, le candidat de Génération.s espère pouvoir agir au niveau européen avec "un dividende universel européen" : "Toutes les entreprises cotées en bourse, on prendrait un petit pourcentage pour financer une allocation pour les citoyens européens", détaille-t-il. Ce qui permettrait, selon lui, d'aller vers "une convergence des salaires" en Europe. 

François Asselineau et Florian Philippot, eux, estiment qu'on ne peut agir concrètement sur le pouvoir d'achat sans sortir de l'Union européenne. "Les Français ont perdu collectivement 56.000 euros par personne depuis le passage à l'euro", assène le premier en citant un rapport d'un think tank allemand. Pour le leader des Patriotes, l'Union européenne appauvrit les citoyens français en empêchant tout protectionnisme. "Des pays plus petits que la France, comme la Corée du Sud, la Suisse ou le Canada (qui est grand géographiquement mais a un PIB plus petit que la France) se protègent. La France ne le peut pas à cause de l'Union européenne."