Début d’année offensif pour le Conseil constitutionnel. Alors que François Hollande venait adresser ses vœux rue de Montpensier, le président des Sages, Jean-Louis Debré, a adressé, lundi, un sérieux rappel à l’ordre de l’exécutif. Pas franchement l'habitude de la maison.
"Cette situation est préoccupante". "Le respect de la Constitution n'est pas un risque, c'est un devoir". Jean-Louis Debré est en colère. En 2013, "son" Conseil a invalidé plusieurs textes proposés par l’exécutif - telle l’emblématique taxe à 75% - mais, à chaque fois que la porte lui a été claquée au nez, le gouvernement est passé par la fenêtre pour faire adopter ses lois. "Il est bien sûr naturel et conforme à l'esprit de la Ve République qu'à la suite d'une censure, le gouvernement et le Parlement puissent chercher à atteindre l'objectif qu'ils s'étaient fixé par d'autres voies", a d’abord observé Jean-Louis Debré, avant de regretter qu’ "à plusieurs reprises au cours de ces derniers mois, des dispositions législatives ont été adoptées alors qu'elles contrevenaient directement à l'autorité de la chose jugée par le Conseil"."Cette situation est préoccupante", a conclu le président du Conseil constitutionnel lors de cette cérémonie réunie à huis clos.
Des accusations d’amateurisme. Jean-Louis Debré n’en est pas resté là. Ce très proche de Jacques Chirac a tout simplement invité le législateur à mieux travailler ses textes de loi. Des accusations d’amateurisme déjà entendues au moment de la taxe à 75%. Jean-Louis Debré a ainsi vivement fustigé des "lois aussi longues qu'imparfaitement travaillées" recelant "des dispositions incohérentes et mal coordonnées" et "gonflées d'amendements non soumis à l'analyse du Conseil d'Etat". Une dernière critique ? "Je n'évoque pas même le fait que, par instruction, le ministre du budget ait repris une mesure législative censurée par le Conseil", a encore tancé le premier des Sages.
La réponse de Hollande. Confronté à cette offensive du président du Conseil constitutionnel, le chef de l’Etat a joué profil bas, assurant avoir "demandé au gouvernement que la confection des projets de loi respecte" les recommandations du Conseil. "C'est une obligation que l'article 62 de la Constitution impose à tous les pouvoirs publics et qu'ils ont parfois tendance à oublier en reprenant des dispositions qui ont pourtant déjà été censurées", a-t-il concédé. Et de conclure : "la simplification est un devoir qui s'impose aussi au législateur" car "la loi doit veiller à être claire et intelligible". Le message est visiblement passé.