ÉDITO - Droits TV : "Aujourd’hui, le vrai patron du football français, c’est Maxime Saada et Canal+"

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Virginie Phulpin, édité par
Maxime Saada, dans les colonnes du "Figaro", a annoncé mardi soir que Canal+ rendait ses droits de la Ligue 1 avant un appel d'offres global. Pour notre éditorialiste Virginie Phulpin, cela correspond à la dernière étape de la prise de pouvoir des diffuseurs dans le football français, ce qui est une mauvaise chose.
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Le feuilleton à rebondissements des droits TV du football français se poursuit. Canal+ a annoncé mardi qu'il restituait ses droits de la Ligue 1 (deux matches par journée) à la Ligue de football professionnel, en demandant un nouvel appel d’offres. En gros, la chaîne considère que le produit ne vaut plus grand chose et veut le payer moins cher. C’est ce qui ressort de l’interview de Maxime Saada, le président du directoire de Canal+, au Figaro. Pour l'éditorialiste sport d'Europe 1, Virginie Phulpin, cela prouve que le football ne peut pas vivre uniquement des droits TV.

"Avec cet épisode, on se rend bien compte que le diffuseur a droit de vie ou de mort sur le football français. Et c'est la conséquence de la cupidité de la Ligue en 2018, lors du précédent appel d'offres. Les clubs vont payer le prix fort pour avoir cédé aux mirages d’un championnat à un milliard d’euros, et pour avoir fait reposer leur avenir uniquement sur un diffuseur qui s’est avéré mauvais payeur.

Aujourd’hui, le vrai patron du football français, c’est Maxime Saada. Le président du directoire de Canal+ n'a pas digéré la façon dont la chaîne, diffuseur historique du foot, a été traitée par la Ligue de football professionnel. Il ne fait pas dans les sentiments. Son constat est sévère : le passage éclair de Mediapro a fait perdre toute valeur à notre championnat, dit-il en substance.

Le rapport de forces s'est inversé

C'est dur de regarder les choses en face, mais là-dessus, Maxime Saada a raison. Téléfoot n’a jamais rassemblé beaucoup de téléspectateurs. Soit on ne voit pas les matches, soit on les regarde en streaming illégal. Notre foot est devenu invisible, donc forcément il ne vaut plus grand-chose.

Pendant ce temps-là, Canal+ a diversifié son offre sportive et ça marche. En fait, le rapport de forces s’est inversé. La Ligue a fait comme si les chaînes de télévision avaient besoin du championnat de France de football pour vivre et s’est comportée en diva. Sauf que c’est exactement le contraire qui se produit. À ne compter que sur les droits TV sans se remettre en question à aucun moment, c’est le football qui est à la merci des diffuseurs. Les chaînes font la pluie et le beau temps. Et en l’occurrence, le temps est plutôt à l’orage.

Un "pay per view" inégalitaire

La principale inquiétude concerne les petits clubs de Ligue 1. Quand on a un modèle économique qui ne repose que sur le diffuseur, ô surprise, un PSG-OM comptera toujours plus qu’un Dijon-Nîmes, forcément. Et on s’en rend bien compte au détour des phrases de Maxime Saada dans Le Figaro.

Le dirigeant parle du manque d’attractivité du championnat. Selon lui, la Ligue 1 ne génère pas suffisamment de recettes pour faire vivre tous les clubs. Sa solution pour éviter l’écran noir entre le moment où Canal+ va rendre ses droits et l’aboutissement du nouvel appel d’offres, c’est le pay per view. Chacun pourra acheter un match à la demande et l’argent sera ensuite redistribué à la Ligue et donc aux clubs. C’est une vraie menace pour les petits clubs qui n’ont pas l’audience de Lyon ou du PSG. Cela prouve qu’on est arrivé au bout du chemin. Si on veut défendre le football français dans son ensemble, on ne peut pas compter uniquement sur les diffuseurs. Ils n’ont pas les mêmes priorités."