Terrorisme : pourquoi il est impossible de chiffrer le nombre exact d'occidentaux dans la mouvance djihadiste
Si l'attaque de Manhattan désigne l'Ouzbékistan comme un nouveau foyer de radicalisation, les estimations quant au nombre de Français ayant rallié les rangs du groupe Etat islamique restent toujours plus importantes.
L’auteur de la tuerie de New York venait d’Ouzbékistan , un pays de l’Asie centrale qui s’impose de plus en plus comme foyer de djihadistes. Une menace trop sous-estimée, estimait mercredi l’expert Wassim Nasr sur France Inter . "On a tendance parfois ici, en Occident, à se concentrer sur les djihadistes occidentaux qui ne représentent que 2 ou 3% de la mouvance djihadiste globale. Un des plus gros contingents de l'EI est d'Asie centrale", a-t-il déclaré. Mais en vérité, ce chiffre ne veut pas dire grand-chose, car personne n'est capable d'évaluer "la mouvance djihadiste globale", tant le terrorisme est devenu mouvant et multiforme. Le département d’État américain est incapable, par exemple, d’évaluer les effectifs d’une vingtaine d’organisations qui sont sur sa liste des mouvements terroristes. Une liste non exhaustive, évidemment, car il existe désormais des centaines d'organisations terroristes.
Les contingents étrangers de l'EI. Ainsi, sur les 25.000 victimes des 11.000 attentats qui ont eu lieu en 2016 dans le monde entier, selon le rapport annuel du renseignement américain - pour la plupart en Irak, en Afghanistan, au Nigéria et en Syrie -, 36% des morts sont le fait du groupe Etat islamique. Du côté des troupes de l'organisation, elles sont désormais évaluées de 10.000 à 15.000 combattants, après être montée jusqu’à 70.000, alors constitués de groupes locaux et de 40.000 combattants venus de l'étranger. L’un des plus gros contingents venait d’Asie centrale : quelque 5000 combattants selon différentes sources. Mais le nombre d’Européens recensés était tout aussi important. Si on estime entre 500 et 1.500 le nombre d'Ouzbeks qui auraient rallié le drapeau de l’État Islamique, le nombre de Français grimpe à 2.000 .
Une influence grandissante en Asie. Mais l'Ouzbékistan est aussi une région qui inquiète les observateurs : la pauvreté, les régimes politiques autoritaires et des frontières poreuses avec l’Afghanistan, où sept camps d'entrainement djihadiste ont récemment ouvert, constituent un terreau favorable à la radicalisation. Si la jeunesse musulmane est poussée au départ, elle s’intègre mal à l’étranger. Les attaques terroristes conduites à Istanbul, Saint-Pétersbourg, Stockholm et New York par des terroristes originaires d'Asie trahissent bien l’influence qu’a pris l’État Islamique dans cette région.
La langue, facteur de rapprochement par-delà les nationalités. Néanmoins l’inquiétude des services français par rapport aux retours des occidentaux reste légitime, sachant qu'elle se double aussi d’une crainte concernant la francophonie. Car les réseaux se construisent aussi sur la langue. Or, en plus des 2.000 Français, près de 3.000 Tunisiens, 1.800 Marocains, mais aussi des Algériens ont combattu en Syrie. Ils sont aujourd’hui autant de menaces potentielles.