Les rues de plusieurs villes marocaines se sont embrasées après la mort tragique d'un vendeur de poisson, vendredi.
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Ariane Lavrilleux et M.B. , modifié à
Le décès de Mohcine Fikri, broyé par une benne à ordures, a réveillé la colère des marocains du Rif, qui manifestent pour dénoncer l'injustice dans le pays.

Sa mort atroce a ravivé des plaies mal cicatrisées. Vendredi soir, Mohcine Fikri, vendeur de poisson dans la ville marocaine d'Al Hoceima, est décédé, broyé par une benne à ordures. Il s'était jeté dedans pour récupérer une cargaison d'espadons que la police venait de lui confisquer, la pêche de cette espèce étant interdite. Depuis le drame, les manifestations se multiplient au Maroc pour dénoncer une bavure des forces de l'ordre, qui auraient directement actionné la benne.

Des manifestants qui demandent "justice". Limitée, au départ, au centre ville d'Al Hoceima, la contestation s'est étendue durant le week-end à Casablanca, Rabat et Marrakech. "On est tous en colère, choqués par la mort de Mohcine Fikri", témoigne ainsi Mohammed El Yakhloufi, étudiant en thèse de mathématiques à Al Hoceima. De tous les rassemblements, le jeune homme demande, comme ceux qui manifestent avec lui, "que le responsable, celui qui a donné l'ordre de broyer, passe devant la justice". 

"Après 2011, rien n'a changé". Au-delà du cas particulier de Mohcine Fikri, les manifestants dénoncent le manque de considération des pouvoirs publics marocains. Al Hoceima est en effet une ville située dans la région du Rif, longtemps délaissée sous le règne de Hassan II, qui fut aussi l'un des principaux foyers de la contestation lors du mouvement du 20-Février, la version marocaine des Printemps arabes en 2011. "Après 2011, rien n'a changé", regrette Mohammed El Yakhloufi. "Le Rif est particulièrement exposé aux injustices. On vole notre dignité. On veut faire valoir nos droits, c'est tout."

Le pouvoir tente d'éteindre le feu. Pour l'instant, la police a choisi de rester en retrait et de ne jamais intervenir pendant des manifestations qui demeurent donc extrêmement calmes. Pour tenter d'éviter un embrasement, le roi Mohammed VI a tout de suite envoyé son ministre de l'Intérieur, lequel a promis une enquête. Mais ces paroles n'ont, pour l'instant, pas du tout convaincu les manifestants, de plus en plus nombreux dans la rue.