Au 84e jour de la guerre en Ukraine, le premier procès pour crime de guerre s'ouvre. 1:36
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avec AFP , modifié à
Au 84e jour de la guerre en Ukraine, l'opération d'évacuation des derniers soldats ukrainiens retranchés dans la ville stratégique de Marioupol se poursuit. Ce mercredi marque aussi l'ouverture dans la capitale ukrainienne du premier procès d'un soldat russe pour crime de guerre depuis l'invasion du pays.
L'ESSENTIEL

La reddition de soldats ukrainiens qui défendaient le site d'Azovstal à Marioupol, dans le sud-est de l'Ukraine, s'est poursuivie mercredi, selon Moscou dont les forces progressent lentement sur la ligne de front, dans la région du Donbass (Est). Le 84e jour de la guerre, marquée depuis le début de l'invasion russe le 24 février par de très nombreuses victimes civiles, est aussi celui du début à Kiev du procès d'un soldat russe jugé pour crime de guerre.

Les informations à retenir :

  • Le premier procès d'un soldat russe pour crime de guerre s'ouvre
  • La reddition des soldats ukrainiens se poursuit à Marioupol
  • La Suède et la Finlande soumettent ensemble leurs candidatures à l'Otan
  • La France va intensifier ses livraisons d'armes à l'Ukraine

959 combattants se sont constitués prisonniers

Sur le site d'Azovstal à Marioupol, "959 combattants (ukrainiens) dont 80 blessés se sont constitués prisonniers" depuis deux jours, a affirmé mercredi le ministère russe de la Défense, information non commentée par Kiev à la mi-journée. L'armée russe concentre ses efforts "sur le blocage de nos unités près d'Azovstal", avec des tirs d'artillerie et des frappes aériennes, a signalé l'état-major ukrainien.

"Dans la région d'Odessa, un autre missile a été lancé depuis les eaux de la mer Noire. (...) Selon les informations préliminaires, il n'y a pas de destructions importantes et de victimes", selon un communiqué d'un responsable du district Sud reproduit par les médias ukrainiens.

Un millier de militaires ukrainiens, dont leurs commandants, sont encore retranchés sur le site sidérurgique d'Azovstal de Marioupol, a affirmé mercredi un dirigeant séparatiste prorusse. Il y avait initialement "plus de 2.000 personnes" dans l'aciérie, a déclaré le dirigeant de la république autoproclamé du Donetsk Denis Pouchiline lors d'une rencontre avec la presse à Marioupol, à laquelle a participé l'AFP dans le cadre d'un voyage organisé par le ministère russe de la Défense.

L'Espagne rejette l'expulsion de ses 27 diplomates

L'Espagne "rejette" l'expulsion de 27 de ses diplomates en poste en Russie annoncée mercredi par Moscou en représailles aux expulsions de diplomates russes décidées dans la foulée de l'offensive russe en Ukraine, a indiqué dans un communiqué le ministère espagnol des Affaires étrangères. Début avril, Madrid avait décidé d'expulser le même nombre de diplomates russes représentant, selon le gouvernement espagnol, une "menace pour les intérêts du pays".

Sept personnes tuées à Donetsk

La guerre entre dans une "phase prolongée", a estimé mardi le ministre ukrainien de la Défense Oleksiï Reznikov. Sur la ligne de front dans la région de Donetsk, sept personnes ont été tuées et six blessées selon Kiev. Dans la région voisine de Lougansk, quatre personnes ont été tuées mercredi, a déclaré son gouverneur Serguiï Gaïdaï, évoquant aussi la découverte de deux corps dans le village de Pryvillia. Les forces russes tentent une percée près de Popasna et en direction de Severodonetsk, l'une des grandes villes de la région sous contrôle ukrainien, a-t-il ajouté, dénonçant "l'intensification des bombardements sur la population civile".

Les forces russes mènent des "offensives tout le long de la ligne de contact", a prévenu le ministère ukrainien de la Défense. L'Institut américain des études de la guerre (ISW) évoque une intensification des tirs d'artillerie sur les installations frontalières ukrainiennes dans les régions de Chernihiv et Sumy ces dernières semaines, dont 70 frappes pour la seule journée de mardi.

L'institut évoque des avancées limitées des forces russes dans le Donbass et la préparation d'une grosse bataille pour Severodonetsk. Les forces russes pourraient "redoubler d'efforts" pour cette bataille, "en partie pour devancer les critiques qui émergent" en Russie sur les erreurs commises lors de l'opération en Ukraine.

Le soldat russe jugé pour crime de guerre plaide coupable

Le premier soldat russe jugé pour crime de guerre en Ukraine depuis le début de l'invasion russe a plaidé coupable mercredi, reconnaissant l'ensemble des faits qui lui sont reprochés. Interrogé sur le fait de savoir s'il reconnaissait "sans réserve" l'intégralité de l'acte, comprenant les chefs d'accusation de crime de guerre et de meurtre prémédité, le sous-officier de 21 ans, Vadim Chichimarine, a répondu "oui". Il encourt la prison à perpétuité.

Près de trois mois après le début de l'invasion de l'Ukraine, le procès d'un soldat russe de 21 ans, accusé d'avoir abattu un civil de 62 ans fin février, s'est ouvert mercredi à Kiev vers 14 heures, heure locale. Il s'agit du premier procès pour crimes de guerre depuis le début du conflit. Le Kremlin a dit n'avoir "aucune information" sur le procès et le prévenu, assurant que les nombreuses accusations de crimes de guerre visant l'armée russe sont "des fakes ou des mises en scène".

Pour la procureure générale ukrainienne Iryna Venediktova, ce procès est "un signal clair". "Aucun bourreau (...) n'échappera à la justice", a-t-elle promis, disant avoir ouvert plus de 11.000 enquêtes pour crimes de guerre, au moment où les institutions internationales enquêtent également sur les exactions présumées commises par les troupes russes.

À La Haye (Pays-Bas), le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a annoncé déployer en Ukraine une équipe de 42 enquêteurs et experts, soit la plus importante mission en termes d'effectifs jamais envoyée sur le terrain par cette instance. Et Washington a annoncé mardi la création d'un "observatoire du conflit", doté initialement de six millions de dollars, pour "recueillir, analyser et partager largement les preuves des crimes de guerre" imputés à la Russie en Ukraine.

La Russie annonce l'expulsion de 34 diplomates français

La Russie a annoncé mercredi expulser 34 diplomates français, en représailles aux expulsions en avril par la France de 41 Russes, dans la foulée de l'offensive en Ukraine.

L'ambassadeur de France à Moscou a été convoqué mercredi au ministère russe des Affaires étrangères et s'est vu remettre une note signifiant que "34 collaborateurs des établissements diplomatiques français en Russie ont été déclarés 'persona non grata'", a indiqué la diplomatie russe dans un communiqué. Ils doivent quitter la Russie d'ici deux semaines, selon la même source.

Le groupe suisse Vetropack supprime 400 postes en Ukraine

Le groupe suisse Vetropack, spécialisé dans les emballages en verre, a annoncé mercredi la suppression de 400 postes en Ukraine après les dommages subis durant les combats par son usine basée à Gostomel, dans la région de Kiev. Cette coupe représente environ les deux tiers de ses effectifs sur ce site qui a subi d'importants dégâts, précise-t-il dans un communiqué. "Nous sommes pleinement conscients de l'impact de cette mesure sur notre personnel ukrainien mais ne voyons actuellement pas d'autre alternative", a expliqué son directeur général, Johann Reiter, cité dans le communiqué.

Cette usine a subi des dommages "considérables mais pas irréparables", a poursuivi le patron de ce groupe qui fabrique des bouteilles et des bocaux pour les boissons et aliments. "Nous estimons toutefois qu'une reprise immédiate de la production à Gostomel ne sera pas possible, même après la fin du conflit, actuellement encore imprévisible", a-t-il ajouté.

Un gymnaste russe suspendu pour son soutien à la Russie

Le gymnaste russe Ivan Kuliak a été suspendu par la Fédération internationale de gymnastique (FIG) pour avoir exprimé de manière ostentatoire son soutien à l'invasion de l'Ukraine par la Russie, a annoncé la fondation éthique de la FIG.

Lors d'une épreuve de Coupe du monde de gymnastique artistique de Doha début mars, au début du conflit armé en Ukraine, Ivan Kuliak, 3e de l'épreuve de barres parallèles, était monté sur le podium au côté du vainqueur ukrainien Illia Kovtun avec un maillot portant la lettre "Z" à la place du drapeau de son pays. La lettre "Z", présente sur certains des chars et véhicules russes en Ukraine, est devenue un symbole de soutien à l'invasion.

"Ivan Kuliak n'est pas autorisé à participer à quelque compétition que ce soit organisée sous l'égide de la FIG ou d'un de ses membres affiliés pendant un an à compter de la date de la décision", a déclaré la fondation éthique dans un communiqué publié mardi. Kuliak dispose de 21 jours pour faire appel. Il doit en outre rendre sa médaille de bronze et la somme d'argent correspondant à cette médaille (500 euros). 

La prise totale de Marioupol constituerait une avancée importante pour Moscou

La prise totale de Marioupol, une cité portuaire stratégique sur la mer d'Azov assiégée dès début mars par les Russes et chèrement défendue par les Ukrainiens au prix de vastes destructions, constituerait une avancée importante pour Moscou dans ce conflit. Elle lui permettrait de contrôler une bande de territoire allant de la péninsule de Crimée, que les Russes ont annexée en 2014, aux territoires du Donbass (est) déjà aux mains de séparatistes prorusses.

La Suède et la Finlande soumettent leurs candidatures à l'Otan

Alors que la guerre entre dans une "phase prolongée", selon les mots mardi du ministre ukrainien de la Défense Oleksiï Reznikov, la Suède et la Finlande soumettent ensemble mercredi leurs candidatures à l'Otan, après des décennies de non-alignement militaire.

Les demandes d'adhésion des deux pays nordiques seront remises au siège de l'alliance à Bruxelles au secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg mercredi à 08H00 (06H00 GMT) par les ambassadeurs suédois et finlandais. Le Parlement finlandais a ouvert mardi par un vote massif la voie à cette candidature, dans la foulée de l'annonce officielle la veille par la Suède de la sienne.

Alors que Vladimir Poutine a semblé mettre la sourdine lundi sur les menaces russes de représailles à une adhésion suédo-finlandaise, le principal obstacle semble désormais venir de l'intérieur de l'alliance : la Turquie, dont la ratification est impérative comme celle de chacun des 30 membres de l'Otan, a réaffirmé lundi son hostilité à l'entrée de la Suède et de la Finlande.

La Turquie opposée à l'intégration de la Finlande et la Suède

La Turquie, membre de l'Otan, s'oppose toutefois à leur intégration. Son président, Recep Tayyip Erdogan, a dit espérer que les autres Etats de l'organisation entendraient ses "inquiétudes", auxquelles Washington a estimé mercredi qu'il serait possible de "répondre", se déclarant "très optimiste" sur les discussions en cours à ce sujet.

En attendant que ce processus d'adhésion ne s'achève, "les Etats-Unis travailleront avec la Finlande et la Suède pour rester vigilants face à toute menace contre notre sécurité commune et pour décourager et faire face à toute agression ou menace d'agression", a martelé la Maison Blanche.

L'Est du pays reste l'objectif prioritaire des troupes russes

Sur le terrain des opérations militaires, huit personnes sont mortes et 12 ont été blessées dans un bombardement russe sur Desna, un village situé à une soixantaine de kilomètres au nord de Kiev connu pour abriter un grand camp d'entraînement militaire, d'après les secours locaux.

Une autre attaque russe a touché mardi matin une base militaire ukrainienne dans la région de Lviv (ouest) située à seulement 15 kilomètres de la frontière avec la Pologne, selon Maxim Kozitsky, le gouverneur de la région de Lviv. L'Est du pays reste toutefois l'objectif prioritaire des troupes russes depuis leur retrait des environs de la capitale ukrainienne fin mars.

Selon le ministre ukrainien de la Défense Oleksiï Reznikov, qui s'exprimait mardi devant les ministres de la Défense de l'Union européenne et le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg, "les principaux efforts du Kremlin se concentrent sur les tentatives d'encercler et de détruire le regroupement des forces armées ukrainiennes dans les régions de Donetsk et de Lougansk" (est), partiellement aux mains de séparatistes prorusses.

Le ministère ukrainien de la Défense a de son côté indiqué dans son rapport du soir mardi que les forces russes menaient des "offensives le long de la totalité de la ligne de contact" dans la région de Donetsk, et partiellement dans celle voisine de Lougansk. Mardi, sept civils ont été tués "par les Russes" et six autres blessés dans la région de Donetsk, a affirmé sur Telegram son gouverneur, Pavlo Kyrylenko.

La France va intensifier ses livraisons d'armes à l'Ukraine

Dans la région de Lougansk, les forces russes tentent une percée près de Popasna et en direction de Severodonetsk, l'une des grandes villes de la région sous contrôle ukrainien, a indiqué son gouverneur Serguiï Gaïdaï en faisant état de "l'intensification des bombardements sur la population civile". Le ministre de la Défense Oleksiï Reznikov a également appelé les alliés occidentaux de l'Ukraine à plus de coordination dans les livraisons d'armes à Kiev.

La France va intensifier ses livraisons d'armes à l'Ukraine "dans les jours et semaines qui viennent", a promis le président Emmanuel Macron à son homologue Volodymyr Zelensky.

Ce dernier a pris la parole dans un message vidéo pendant le gala d'ouverture du festival de Cannes pour dire qu'"il nous faut un nouveau Chaplin qui prouvera que le cinéma n'est pas muet" face à la guerre en Ukraine. "Je suis persuadé que le 'dictateur' va perdre", a-t-il ajouté, faisant allusion au président russe et au film de Charlie Chaplin.

Des dizaines de milliers de morts

Il n'existe aucun bilan global des victimes civiles du conflit. Rien qu'à Marioupol, les autorités ukrainiennes ont parlé il y a plusieurs semaines de 20.000 morts. Et les enquêteurs ukrainiens affirment avoir identifié "plus de 8.000 cas" présumés de crimes de guerre.

Sur le plan militaire, le ministère ukrainien de la Défense évalue les pertes russes à 28.300 hommes depuis le début de l'invasion le 24 février. C'est notoirement plus que selon les sources occidentales. Le Kremlin a, lui, tout juste admis des "pertes importantes". Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déclaré qu'environ 2.500 à 3.000 soldats ukrainiens avaient été tués et quelque 10.000 blessés. Aucun chiffre indépendant et fiable n'est disponible.

Six millions d'Ukrainiens ont fui

L'Ukraine a vu plus de six millions des siens fuir son territoire, dont plus de la moitié - 3,4 millions - vers la Pologne, selon le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) à Genève, qui relève toutefois que le flot de ces départs s'est considérablement tari au fil des semaines et s'est même inversé. Le solde global reste cependant encore largement négatif - avec 6,3 millions de départs pour 1,85 million de retour, selon les garde-frontières.

Vers une chute du PIB russe

Bruxelles a proposé mercredi "une nouvelle assistance macrofinancière exceptionnelle" aux Ukrainiens, d'un montant allant "jusqu'à neuf milliards d'euros en 2022". Volodymyr Zelensky s'est dit "reconnaissant de (ce) soutien à l'Ukraine" qui l'"aidera à remporter la guerre, surmonter les conséquences de l'agression russe et accélérer le processus d'adhésion à l'UE". La Commission a également présenté un plan de 210 milliards d'euros pour affranchir l'UE "le plus vite possible" des importations de gaz russe.

La banque française Société Générale a parallèlement annoncé avoir finalisé la cession de Rosbank, un poids lourd du secteur bancaire russe dans lequel elle était actionnaire majoritaire, au fonds d'investissement Interros fondé par l'oligarque Vladimir Potanine, un proche de Vladimir Poutine. Sous l'effet notamment des sanctions, l'économie de la Russie devrait subir cette année une contraction comprise entre 7,8% et 8,8%, a prédit mercredi son gouvernement.