La ville de Severodonetsk dans le Donbass est sous pression des forces russes. 1:28
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avec AFP , modifié à
L'invasion de l'Ukraine par la Russie atteint vendredi son 100e jour. L'offensive a permis à Moscou de s'emparer de 20% du territoire ukrainien selon le président du pays, Volodymyr Zelensky, et qui se concentre sur la région du Donbass, dans l'est de l'Ukraine, et sa ville stratégique de Severodonetsk. Europe 1 fait le point sur l'évolution de la situation.
L'ESSENTIEL

L'invasion de l'Ukraine par la Russie atteint vendredi son 100e jour, une offensive qui a permis à Moscou de s'emparer de 20% du territoire ukrainien et qui se concentre sur la région du Donbass (est) et sa ville stratégique de Severodonetsk. "Nous avons rencontré quelques succès dans la bataille pour Severodonetsk. Mais il est encore trop tôt. C'est la zone la plus difficile actuellement", a indiqué jeudi soir le président ukrainien Volodymyr Zelensky, évoquant une situation similaire aux alentours notamment à Lyssytchansk et à Bakhmout.

Les principales informations :

- L'Ukraine entre ce vendredi dans le 100ème jour des affrontements

- Zelensky a affirmé sa confiance en la "victoire", tandis que le Kremlin a souligné "certains résultats" dans la guerre

- Les soldats ukrainiens tentent de défendre Lougansk

- 20% du territoire contrôlé par les forces russes, selon Zelensky

- L'Ukraine dénonce un "Marioupol bis" à Severodonetsk

Volodymyr Zelensky dresse un bilan au 100e de guerre

"La victoire sera nôtre", a affirmé Volodymyr Zelensky dans une courte vidéo diffusée sur Instagram, au 100ème jour de l'invasion russe.

"Les représentants de l'Etat sont ici, défendant l'Ukraine depuis cent jours", déclare-t-il dans cette vidéo de 36 secondes, se filmant devant le bâtiment de l'administration présidentielle à Kiev aux côtés notamment de son Premier ministre, Denys Chmygal et du chef du parti présentiel, David Arakhamia.

Bannissement de la majeure partie du pétrole russe par l'Union européenne 

L'Union européenne a banni la majeure partie des importations de pétrole russe avec un embargo dans les six mois, dans son 6e paquet de sanctions contre Moscou afin de tarir le financement de la guerre contre l'Ukraine, après des négociations ardues en raison de la pression de la Hongrie.

Elle élargit aussi sa liste noire à une soixantaine de personnalités dont l'ex-gymnaste russe Alina Kabaeva, selon les sanctions publiées vendredi au journal officiel de l'UE. Visée en raison de son rôle dans "la propagande" du Kremlin, des médias lui prêtent une relation avec le président russe Vladimir Poutine que ce dernier a démentie.

Le chef de l'Eglise orthodoxe russe, le patriarche Kirill, que Bruxelles voulait sanctionner pour son soutien à la guerre a en revanche été épargné, en raison du refus du Premier ministre hongrois Viktor Orban au nom de la défense de la "liberté religieuse".

L'exclusion de la principale banque russe du système Swift, rouage essentiel des échanges bancaires internationaux, est également acté.

Cette nouvelle salve de sanctions est la plus forte contre Moscou après plus de trois mois d'offensive en Ukraine.

L'arrêt des importations par bateaux de pétrole brut aura lieu dans les six mois et celui des produits pétroliers dans les huit mois. L'approvisionnement par oléduc peut en revanche continuer "temporairement" mais sans fixation de date limite. Il alimente notamment trois pays sans accès à la mer, Hongrie, Slovaquie et République tchèque.

Une concession obtenue sous la pression de Viktor Orban, dont le pays dépend à 65% de sa consommation du pétrole bon marché acheminé par l'oléoduc Droujba.

L'embargo progressif concernera 2/3 des achats européens. L'Allemagne et la Pologne ayant décidé de leur propre chef d'arrêter leurs livraisons via Droujba d'ici la fin de l'année, les importations russes seront touchées à plus de 90%, font valoir les Européens.

L'ONU alerte sur les pertes liées à la guerre

La guerre en Ukraine "n'aura pas de vainqueur" a jugé vendredi le coordinateur de l'ONU dans le pays, au 100e jour de l'invasion russe. "Cette guerre n'a et n'aura pas de vainqueur", a affirmé Amin Awad dans un communiqué. "Nous avons besoin de paix. La guerre doit cesser", a-t-il exhorté, alors que les négociations entre Kiev et Moscou sont au point mort depuis plusieurs semaines.

L'Ukraine vers la "famille européenne" et la Russie "le rideau de fer"

L'Ukraine "avance" vers "la famille européenne", alors que la Russie elle "se rapproche d'une vie derrière le 'rideau de fer'", a estimé vendredi le Premier ministre ukrainien, Denys Chmygal, au 100e jour de l'invasion russe. "L'Ukraine avance avec confiance vers son objectif: vivre dans un pays démocratique, libre, au sein de la famille européenne", a estimé M. Chmygal dans un message sur Telegram.

La Russie, elle, "se rapproche de la vie derrière le rideau de fer et de l'isolement du monde développé", a-t-il fustigé. "Notre destin n'est que la liberté", a encore appuyé le Premier ministre ukrainien, affirmant que "l'Ukraine gagnera sans aucun doute" la guerre face au voisin russe. 

Kiev espère obtenir d'ici fin juin le statut officiel de candidat à une adhésion à l'Union européenne, même si les Vingt-Sept sont divisés sur cette question. Le président français Emmanuel Macron, président en exercice de l'UE, a estimé début mai qu'une adhésion de l'Ukraine prendrait "des décennies", et proposé dans l'intervalle la création d'une "communauté politique européenne" pour arrimer plus vite l'Ukraine à l'Europe.

La situation toujours préoccupante dans le Donbass

Concernant la région du Donbass dans son ensemble, il a indiqué que la situation n'avait pas "changé de manière significative dans la journée". Il avait fait savoir un peu plus tôt que la situation dans l'est était "vraiment difficile (...) Nous perdons de 60 à 100 soldats par jour, tués au combat, et quelque 500 sont blessés". "Aujourd'hui nous combattons et tenons chaque mètre de la région de Lougansk", a indiqué vendredi matin Serguiï Gaïdaï, gouverneur de ce territoire. "Et, malgré toutes les déclarations des Russes, nous célébrons son anniversaire sous le drapeau ukrainien".

"Depuis 100 jours, ils détruisent tout ce qui démarquait la région de Lougansk", a-t-il ajouté, affirmant que plus de 400 km de "routes aux standards européens" avaient été détruites ainsi que 33 hôpitaux, 237 cliniques rurales, près de 70 écoles et 50 maternelles. La veille, il avait affirmait que Severodonetsk, capitale administrative du Donbass, était "occupée à 80%" par les forces russes et que les combats font rage dans les rues.

Les forces russes contrôlent 20% du territoire ukrainien

Les forces russes contrôlent actuellement "environ 20%" du territoire ukrainien, soit près de 125.000 km2, a indiqué jeudi le président ukrainien. Avant l'invasion, les forces russes ou prorusses y contrôlaient 43.000 km2, depuis l'annexion de la Crimée et la prise d'un tiers du Donbass en 2014. Depuis le 24 février, elles ont notamment avancé dans l'est et au sud, le long des mers Noire et d'Azov, contrôlant désormais un corridor côtier stratégique reliant l'est russe à la Crimée.

Après l'échec de leur offensive-éclair pour faire tomber le gouvernement de Kiev, les forces russes se concentrent sur la conquête du Donbass où se joue désormais une guerre d'usure.

L'Ukraine voit en Severodonetsk un "Marioupol bis"

Les dirigeants ukrainiens ont ces derniers jours accusé Moscou de vouloir faire de Severodonetsk un "nouveau Marioupol". Ce port stratégique sur la mer d'Azov, conquis mi-mai après la reddition de plus de 2.000 combattants ukrainiens qui s'étaient retranchés dans l'aciérie Azovstal, a été largement détruit par le pilonnage russe. La pression russe reste également importante sur Donetsk, l'autre région du Donbass, notamment Sloviansk, à quelque 80 km à l'ouest de Severodonetsk. Les habitants de la région manquent notamment de gaz, d'eau et d'électricité, selon Kiev.

La Russie affirme avoir stoppé l'afflux de mercenaires étrangers

L'Ukraine attend des livraisons de systèmes de lance-missiles plus puissants promis par le président américain Joe Biden, en espérant que cela change le rapport de force sur le terrain. La Russie a affirmé jeudi avoir stoppé l'afflux de "mercenaires" étrangers voulant combattre aux côtés de l'armée de Kiev, à force de leur infliger de lourdes pertes ces dernières semaines.

Selon le ministère russe de la Défense, le nombre de combattants étrangers a été "quasiment divisé par deux", passant de 6.600 à 3.500, et un "grand nombre" d'entre eux "préfèrent quitter" le pays "le plus rapidement possible". Des lignes de chemin de fer dans la région de Lviv (ouest), où arrivent notamment les armes livrées à l'Ukraine par les pays occidentaux - aide dénoncée par Moscou - ont été bombardées.

Au moins un mort et plusieurs blessés dans des bombardements

Dans le sud, les Ukrainiens s'inquiètent d'une possible annexion des régions conquises par les forces russes, Moscou évoquant des référendums dès juillet. A Mykolaïv, près d'Odessa, les bombardements russes ont fait au moins un mort et plusieurs blessés dans la population civile, a fait savoir jeudi soir le commandement ukrainien de la région sud.

Sur le plan diplomatique, les pays de l'UE ont approuvé jeudi un sixième paquet de sanctions contre Moscou incluant un embargo, avec des exemptions, sur les achats de pétrole mais renoncé à inscrire sur la liste noire le chef de l'Eglise orthodoxe russe, le patriarche Kirill, sous la pression de la Hongrie.

"Un grand déficit pétrolier" envisagé en Europe

Le texte doit encore recevoir l'accord écrit de chaque Etat membre en vue de sa publication vendredi au Journal officiel pour permettre l'entrée en vigueur des mesures, a précisé la présidence française du Conseil de l'UE. "Les consommateurs européens seront les premiers à souffrir de cette décision. Non seulement les prix du pétrole mais aussi ceux des produits pétroliers augmenteront. Je n'exclus pas qu'il y ait un grand déficit de produits pétroliers dans l'UE", a déclaré le vice-Premier ministre russe chargé de l'Energie Alexandre Novak.

"Aucun signe" pour un arrêt de la guerre

Aux Etats-Unis, l'administration Biden a annoncé de nouvelles sanctions visant une série d'oligarques ou membres de "l'élite" de Moscou, dont la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova. "Je suis reconnaissant envers le président Biden, tous nos amis américains et la population des Etats-Unis pour leur soutien", a relevé Volodymyr Zelensky jeudi soir. Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg a estimé jeudi que les pays occidentaux devaient se préparer "à une guerre d'usure" sur le "long terme".

La guerre en Ukraine "pourrait se terminer demain, si la Russie mettait fin à son agression", avait déclaré mercredi Jens Stoltenberg lors d'une conférence de presse aux côtés du chef de la diplomatie américaine Antony Blinken. Mais "nous ne voyons aucun signe dans cette direction à ce stade", avait-il ajouté. La guerre menée par la Russie en Ukraine va durer encore "de nombreux mois", avait abondé Antony Blinken.