Gaza : l'ONU s'alarme pour les civils avant l'offensive attendue sur Rafah

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avec AFP // Crédit photo : SAID KHATIB / AFP
L'offensive israélienne sur la ville de Rafah signerait le "glas" des programmes d'aide humanitaire, selon le secrétaire général de l'ONU, António Guterres. L'armée a présenté un plan d'évacuation des civils des zones de combats vers le nord de la bande de Gaza, alors que ces zones sont toujours sous le feu israélien. 
L'ESSENTIEL

Le secrétaire général de l'ONU a averti lundi que les programmes d'aide humanitaire à la bande de Gaza prendraient fin en cas d'offensive sur la ville surpeuplée de Rafah, d'où Israël veut faire sortir les civils pour vaincre définitivement le Hamas. Rafah continue de subir des frappes. Pendant ce temps, les pays médiateurs (Qatar, Égypte et États-Unis) continuent de négocier avec les deux parties pour obtenir un compromis en vue d'une trêve. 

Les principales informations : 

  • Une offensive sur la ville de Rafah "sonnerait le glas de nos programmes d'aide" humanitaire, selon Antonio Guterres 
  • 2,2 millions de personnes sont menacée d'une "famine de masse" dans la bande de Gaza, selon l'ONU
  • La "victoire totale" sur le Hamas ne serait qu'une question de "quelques semaines", selon Benjamin Netanyahu
  • Les pourparlers en vue d'une trêve se poursuivent au Qatar 
  • 130 otages sont toujours retenus à Gaza, selon Israël 

Une aide humanitaire "totalement insuffisante"

L'offensive "ne serait pas seulement terrifiante pour plus d'un million de civils palestiniens qui s'y abritent; elle sonnerait également le glas de nos programmes d'aide", a prévenu António Guterres, à l'ouverture de la 55e session du Conseil des droits de l'homme à Genève. Adossée contre la frontière fermée avec l'Égypte, dans le sud de Gaza, Rafah est l'unique point d'entrée de l'aide humanitaire qui reste "totalement insuffisante", a-t-il souligné, pour le petit territoire palestinien, assiégé par Israël depuis le début de la guerre le 7 octobre contre le Hamas.

En Cisjordanie, le gouvernement de l'Autorité palestinienne a remis sa démission lundi au président Mahmoud Abbas, qui exerce un pouvoir limité sur ce territoire occupé depuis 1967 par Israël. De nombreux pays tentent de dissuader le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu de lancer une offensive à Rafah, où sont massés, selon l'ONU, près d'un million et demi de Palestiniens.

Alors que des pourparlers en vue d'une trêve se poursuivent au Qatar, Benjamin Netanyahu a annoncé une prochaine opération terrestre contre cette ville qu'il présente comme le "dernier bastion" du Hamas, quatre mois après le début de l'offensive au sol lancée le 27 octobre dans le nord de Gaza puis étendue progressivement vers le sud. Benjamin Netanyahu a assuré dimanche que la "victoire totale" sur le Hamas ne serait alors qu'une question de "quelques semaines", soulignant qu'une trêve ne ferait que "retarder" cette offensive.

 

"De la place" pour les civils "au nord de Rafah", selon Netanyahu

L'armée a présenté lundi au cabinet de guerre "un plan pour l'évacuation des populations des zones de combat dans la bande de Gaza, ainsi que le plan d'opérations à venir", selon le bureau du Premier ministre. Benjamin Netanyahu avait précisé dimanche qu'il y avait "de la place" pour les civils "au nord de Rafah, dans les zones où nous avons terminé le combat". Ces zones restent pourtant sous le feu israélien. Un correspondant de l'AFP a signalé plusieurs frappes aériennes nocturnes sur Rafah, sur Khan Younès, à quelques kilomètres plus au nord, et à Zeitoun, près de Gaza-ville, dans le nord.

Le Hamas a annoncé lundi que 90 personnes avaient été tuées en 24 heures à travers le territoire, dont 15 membres d'une même famille à Gaza-ville. La guerre a éclaté le 7 octobre quand des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza ont lancé une attaque sans précédent sur le sud d'Israël, qui a entraîné la mort d'au moins 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.

Durant l'attaque, quelque 250 personnes ont été enlevées et emmenées à Gaza. Selon Israël, 130 otages y sont encore retenus, dont 31 seraient morts. En représailles, Israël a juré d'anéantir le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, qu'il considère, de même que les États-Unis et l'Union européenne, comme une organisation terroriste. L'offensive israélienne a fait 29.782 morts à Gaza, en grande majorité des civils, selon le Hamas.

"Nous mourrons de faim"

Dans la bande de Gaza frappée par une catastrophe humanitaire majeure, 2,2 millions de personnes, selon l'ONU, soit l'immense majorité de la population, sont menacées d'une "famine de masse". L'aide internationale entre au compte-gouttes depuis l'Égypte, soumise au feu vert d'Israël, et son acheminement vers le nord est presque impossible en raison des destructions et des combats.

Le bureau de Benjamin Netanyahu a aussi annoncé lundi que le cabinet de guerre avait approuvé un plan de fourniture d'aide humanitaire "qui empêchera les pillages", sans plus de détails. Des Palestiniens de Gaza ont raconté à l'AFP être forcés de manger des feuilles, du fourrage pour le bétail, voire d'abattre des animaux de trait pour se nourrir alors que les rares convois d'aide atteignant le nord sont pillés par la population.

"Nous mourrons de faim", a lancé à l'AFP Abdallah Al-Aqra, 40 ans, réfugié à Gaza-ville. Il a affirmé que l'armée avait tiré dimanche "sur les gens affamés qui tentaient d'avoir de la farine" apportée par un camion d'aide.

 

Un "terrain d'entente" sur un possible accord portant sur la libération des otages

Les pays médiateurs, Qatar, Égypte et États-Unis, tentent pendant ce temps de négocier avec les deux parties un compromis en vue d'une trêve. Le conseiller à la sécurité nationale de la Maison-Blanche, Jake Sullivan, a évoqué dimanche un "terrain d'entente" sur les "contours" d'un possible accord portant sur la libération des otages et "un cessez-le-feu temporaire" lors d'une récente réunion à Paris entre des représentants d'Israël, des États-Unis, de l'Égypte et du Qatar.

D'après une source du Hamas, les discussions portent sur la première phase d'un plan élaboré en janvier par les médiateurs, qui prévoit une trêve de six semaines associée à une libération d'otages et de prisonniers palestiniens détenus par Israël, ainsi que l'entrée à Gaza d'une importante quantité d'aide humanitaire. Mais Israël exige la libération de tous les otages lors de cette pause et a prévenu qu'une trêve ne signifierait pas la fin de la guerre.

Le Hamas réclame de son côté un cessez-le-feu complet, le retrait des troupes israéliennes de la bande de Gaza et la levée du blocus imposé par Israël depuis 2007. La guerre à Gaza a aussi ravivé les tensions à la frontière entre Israël et le Liban, où les échanges de tirs sont quotidiens entre l'armée israélienne et le Hezbollah libanais, allié du Hamas. Lundi, des frappes israéliennes ont visé pour la première fois depuis le début de la guerre des objectifs du Hezbollah dans l'est du Liban, tuant deux combattants du mouvement pro-iranien. Le Hezbollah a annoncé avoir tiré en représailles 60 roquettes sur une base militaire israélienne dans le plateau du Golan occupé.