COP21 : concert de louanges pour la diplomatie française

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G.S. avec AFP
Organisation minutieuse, suivi des pays, navettes diplomatiques innombrables, l'accord sur le climat tient beaucoup à la qualité de la diplomatie tricolore.

"C'est assez irréel pour une COP (...). Ils ont été très efficaces", souligne Tasneem Essop, du WWF, habituée des conférences sur le climat. "C'est la diplomatie la plus habile que j'ai vue depuis plus de deux décennies que j'assiste à ces réunions", a renchéri Al Gore, prix Nobel de la paix 2007 et lui aussi de toutes les Cop. Organisation minutieuse, suivi attentif des pays, navettes diplomatiques innombrables : la France, à la manœuvre de la COP21 depuis deux ans, a su tirer les leçons du fiasco de Copenhague pour réussir à Paris, où un accord vient d'être trouvé sur le climat.

Une "task force" au Quai d'Orsay. Des sandwiches à la tenue des débats, la présidence française a eu droit à un concert de louanges au long de cette conférence, et à la fin, à une longue standing ovation, entrecoupée de remerciements des délégués. "J'ai mobilisé notre réseau diplomatique (le 2e au monde, ndlr), mis à profit mes contacts internationaux, organisé des réunions internationales, choisi une équipe", a expliqué le ministre des Affaires étrangères Laurant Fabius, depuis son bureau sans fenêtres du Bourget.

Cheville ouvrière du processus : Laurence Tubiana, universitaire et négociatrice respectée, s'entoure de juristes, diplomates, ingénieurs. Une "task force" s'installe au Quai d'Orsay, une autre au ministère des Finances. Il faut embarquer dans le projet les diplomates français, pas les plus familiers de cette question. "Les ambassades sont au contact des gouvernements, voient où sont les blocages", explique Laurence Tubiana. "Il faut aller sur place aussi, et y retourner encore".

 

Fabius COP21 Cop 21

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"Une grande diplomatie". "Cela rappelle que la France est une grande diplomatie", souligne Camille Grand, directeur de la Fondation pour la recherche stratégique. "Des conférences de cette ampleur il y en a une ou deux par décennie, et c'est une manoeuvre compliquée à mener. C'est un succès pour Laurent Fabius qui s'est impliqué, pour François Hollande qui a porté ce sujet au niveau des chefs d'Etat".

François Hollande s'est mobilisé notamment sur la question des financements aux pays du Sud. Laurent Fabius ira lui 12 fois en Chine, 4 fois en Arabie saoudite, autant en Inde... En pleine crise syrienne, avant la COP, il retourne en Inde, en Afrique du Sud, au Brésil. Il a aussi fallu ancrer la confiance des petits pays, alors que l'on vise un accord universel, incluant les pays du Sud souvent soupçonneux que l'accord ne se fasse dans leur dos. Seyni Nafo, du groupe Afrique, salue la "transparence" des Français: "aucune arrogance ni prétention". Pour Laurent Fabius, "une raison de l'échec de Copenhague est que la préparation n'avait pas été suffisante".

"Sentir l'électricité dans l'air". Autre leçon danoise, l'idée de faire venir les chefs d'Etat à l'ouverture de la conférence, non à la fin. Une fois obtenue l'accord du Chinois - qui "en entraîne beaucoup d'autres" - les invitations ont été lancées. Résultat, 150 chefs d'Etat à la tribune. "Quand je discute avec les négociateurs, je leur rappelle 'votre patron a dit qu'il fallait arriver à un résultat'", commente Laurent Fabius. "Il y a une méthode pour présider les réunions", poursuit-il: "il faut être à l'écoute, sentir s'il y a de l'électricité dans l'air, faire qu'elle s'exprime. Et fixer des délais. Après, il y a un moment un peu compliqué qui consiste à savoir terminer une négociation". "Et toujours être courtois, la courtoisie consistant aussi à ce que la nourriture soit bonne", ajoute-t-il: "je m'en suis occupé aussi." "Napoléon disait qu'une armée marche à l'estomac", souligne l'Américain Daniel Reifsnyder, "c'est la même chose pour des armées de négociateurs."