Alger, Algérie crédit : RYAD KRAMDI / AFP - 1280 1:51
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Nour Chahine, correspondant en Algérie, édité par Marthe Ronteix , modifié à
Les rues d'Alger ont été remplies de klaxons pour célébrer le renoncement d'Abdelaziz Bouteflika à briguer un cinquième mandat à la tête de l'Algérie. Mais les habitants restent méfiants et attendent de voir la suite des événements.
REPORTAGE

Après l'annonce d'Abdelaziz Bouteflika de son renoncement à briguer un cinquième mandat à la tête de l'Algérie, lundi soir, la joie et la méfiance s'entremêlent dans les rues d'Alger. Car si les habitants ont fêté la nouvelle avec un concert de klaxons, ils savent que rien n'est encore gagné.

"Le peuple a gagné". Dès cette annonce, le centre de la capitale s'est rempli de monde venu célébrer la nouvelle. "Le peuple a gagné, la tête de la pyramide s'en va", se réjouit un Algérois au micro d'Europe 1. Une partie des Algériens manifestent dans les rues depuis trois semaines. Ils réclamaient que le président, au pouvoir depuis 20 ans et diminué physiquement depuis un AVC en 2013, ne se représente pas à sa propre succession.

Dans une longue lettre adressée à ses concitoyens lundi soir, Abdelaziz Bouteflika assure qu'"il s’agit de satisfaire une demande pressante que vous [les Algériens] avez été nombreux à m’adresser dans votre souci de lever tout malentendu quant à l’opportunité et à l’irréversibilité de la transmission générationnelle à laquelle je me suis engagé."

"Ce n'est pas encore fini". Malgré cette victoire, une partie de la population reste méfiante quant à la suite des événements. "On est là pour fêter une première victoire. Mais attention, il faut rester vigilant, ce n'est pas encore fini", temporise un autre. "Je suis très contente mais on attend [de voir] la suite, s'il y a un vrai changement ou pas", renchérit une troisième.

Salim, un avocat de 36 ans, n'est pas dupe. Il a le sentiment qu'il s'agit d'une nouvelle manipulation. "Ce sont des scènes de liesse qui devraient vraiment se calmer parce que ce n'est pas une victoire, c'est une évidence. Bouteflika n'existe plus depuis sept ans, c'est une mafia qui est derrière et qui essaye de manipuler le peuple. Et ils pensent que le peuple est assez idiot pour croire à toutes leurs magouilles parce que le combat vient à peine de commencer."

Une manœuvre pour prolonger son mandat ? Le président a également annoncé un remaniement ministériel - le ministre de l'Intérieur devient Premier ministre -, l'organisation d'une "conférence nationale", chargée de réformer le système politique et d'élaborer un projet de Constitution d'ici fin 2019, et un report de l'élection présidentielle qui devait se dérouler en avril prochain. Une dernière décision qui ne satisfait pas. 

"Il n'a pas le droit de reporter les élections", assure un manifestant au micro d'Europe 1. "Il a le droit de se retirer mais c'est à nous de décider en tant que citoyens ce que nous devons faire." D'une élection anticipée, le président Bouteflika est passé au prolongement de son mandat. "Du pareil au même", selon les premières réactions à Alger.