Chaque matin, Yves Thréard nous livre son analyse politique à quelques semaines de l'élection présidentielle.
Fillon face à ses deux contradictions.
Les socialistes doutent depuis longtemps mais la droite commence à douter aussi : et si Fillon était éliminé du second tour de la présidentielle. Beaucoup, dans son camp, ont le moral en berne et sont inquiets de la tornade Macron. Alors certains grognent et lui reprochent mille choses. D’autres lui demandent de sourire un peu plus et de mettre du miel dans sa campagne. Ce à quoi, Fillon répond : "Ça m’en touche une sans faire bouger l’autre, comme disait Chirac". À cette sinistre ambiance s’ajoutent deux contradictions, sur le fond cette fois, qui me paraissent handicaper davantage Fillon pour rassembler large.
Lesquelles ?
Comment faire de la rigueur sans passer pour un anti social ? Et comment dire aux Français "je veux vous donner plus de libertés" quand beaucoup d’entre eux réclament, au contraire, plus de protections ?
La rigueur, c’est-à-dire moins de gabegie avec l’argent public. Et plus de libertés, c’est-à-dire moins de bureaucratie, moins d’État. C’est exactement ce que lui demandaient ses électeurs de la primaire : plutôt urbains, bourgeois, installés dans la vie et sans crainte dans la mondialisation.
Très bien, mais que dit-il aux autres, moins diplômés, plus modestes, moins connectés à la modernité ? Ils ont peur de voir les services publics disparaître, la sécurité sociale réduite et le chômage pour seul horizon. Ils redoutent d’être abandonnés, déclassés, délaissés et, pourtant, tous ne sont pas de gauche, loin s’en faut. La grande faiblesse de Fillon, elle est là.
Comment peut-il surmonter cette faiblesse ?
À lui de trouver la clef pour parler à ces deux France à la fois. Mais cette faiblesse paraît plus difficile à surmonter que la mauvaise humeur et les états d’âme des grognards et des pleureuses de la droite.