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Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.

Deux histoires d’ours aujourd’hui qui parlent de notre rapport compliqué à la vie sauvage. La première se déroule en Slovénie. Le pays a pris une décision surprenante. Il autorise l’abattage de 230 ours bruns.

Une décision annoncée par le ministère des Ressources naturelles et des Affaires territoriales jeudi dernier et que raconte le quotidien slovène Delo. Une décision qui heurte, mais qui est, selon le ministère, "nécessaire" pour assurer la "santé et la sécurité des citoyens".

Il y en a tant que cela en Slovénie ?

Les ours bruns s’y portent bien. Le pays est 25 fois plus petit que la France, il comptait environ 1100 ours au printemps dernier. Il y en a 76 dans les Pyrénées, de part et d’autre de la frontière. Des ours qui, d’ailleurs, viennent de Slovénie, où on a été les chercher pour les réintroduire.

Selon les autorités slovènes, il faut ramener la population  d'ours  à 800, nombre d’équilibre qui permet coexistence gérable entre les ours et les êtres humains. Après cela, il se rapprochent trop de habitations, des routes ou des troupeaux, surtout les jeunes ours. Cela pose des problèmes de cohabitation.

L’ours est pourtant une espèce protégée !

Oui. En Europe hors Russie, il y aurait environ 15 400 individus répartis dans  22 pays, et ils sont effectivement protégés.  Mais cela n’exclut pas la régulation - comme d’ailleurs pour les loups. Elle se fait dans des règles précises, pas au hasard.

Ca paraît cruel, mais cette régulation est autorisée si trois conditions sont remplies : que l'intervention ne nuise pas à la conservation de l'espèce, qu'il s’agisse de prévenir de graves dommages à la santé et la sécurité des personnes et , enfin, qu'il n'y ait pas d'autre option satisfaisante. Le ministère dit qu’il a examiné d'autres options, la réinstallation des ours dans d'autres zones naturelles ou leur maintien en captivité. Mais ils sont trop nombreux. En 2022, la Slovénie avait autorisé l’abattage de 222 ours bruns, 238 avaient en fait été tués, une 15aine dans des accidents.

La décision slovène entre en résonnance avec une autre histoire d’ours, qui s’est déroulée de l’autre côté de la frontière avec l’Italie.

Une histoire qui suscite les passions en Italie. Dans le Trentin, un jeune joggueur de 26 ans a été tué dans les bois le 5 avril par une ourse connu sous le nom de code JJ4. Une ourse issue d'un couple venu de Slovénie, qui a déjà attaqué deux personnes il y a trois  ans, et qui avait eu la vie sauve parce qu’elle élevait deux oursons.

Les autorités locales ont demandé que l’ours soit abattu. Les associations de protection animale s’y opposent, demandent à ce qu’il soit déplacé. Pour l’instant la décision est suspendue par la justice.

Les problèmes de cohabitation se multiplient dans cette petite région italienne du Trentin. Le paradoxe, c’est que c’est le fruit d’une réintroduction qui a trop bien marché. Dans les années 90, quand elle a été lancée, elle devait aboutir à une population d’une cinquantaine d’ours ; ils sont le double. Et se produit exactement ce que redoutent les autorités slovènes quand les ours deviennent trop nombreux.