Tous les mardis, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son "Voyage en absurdie".
Les vétérinaires en ont plein les bottes. Ils tiennent aujourd’hui une conférence de presse, organisée par leur ordre. Au menu : explications détaillées sur la Dermatose nodulaire contagieuse et aussi alerte : ils ont été durement malmenés depuis le début de l’épizootie des bovidés.
Voici ce que m’a dit un vétérinaire à qui je demandais comment ça allait parmi ses confrères : “Je parlerai d’une certaine angoisse. Angoisse d’être confronté à un foyer au sein de notre clientèle. Mais aussi une angoisse de se retrouver pris à partie, insulté, menacé par des messages haineux notamment sur les réseaux sociaux.” Dans l’épouvantable épizootie de DNC, des vétérinaires ont été physiquement menacés, agressés. On l’a vu en Savoie, dans le Sud Ouest. On le voit sur les plateaux de télé ces derniers jours
Les vétérinaires sont les victimes inattendues d’une défiance vis à vis de l’autorité, révélée une nouvelle fois par cette crise
De toute forme d’autorité. L’Europe, l’Etat, le gouvernement, la gendarmerie, la science, tout est remis en cause en bloc dans cet épisode. Les vétérinaires sont emportés dans ce rejet de toutes les structures. Ils voient leur expertise, leur connaissances niées
Et c’est un contre-sens majeur
Personne de sensé ne peut croire que les vétérinaires euthanasieraient des animaux s’ils n’étaient pas sûrs que c’est une nécessité. C’est une tâche difficile, douloureuse, mais pour laquelle ils pèsent le bénéfice et le risque. Pour sauver la France de l’élevage, il ne faut pas laisser la maladie s’installer. Ils savent ce qu’elle fait aux troupeaux à long terme. Des animaux qui meurent, qui ne se remettent jamais vraiment, qui ne produisent plus de lait, qui ne se reproduisent plus
Les Humains ignorent ce qu’ils doivent aux vétérinaires pour leur propre santé.
Les interactions entre les humains et le monde animal produisent le meilleur – le compagnonnage, l’élevage – et le pire : les maladies qui se transmettent ou affectent les filières économiques. Les vétérinaires sont aux premières loges pour observer la grippe aviaire des oiseaux migrateurs, la peste porcine chez les sangliers, la tuberculose des cerfs, ou détecter des maladies émergentes. Rouages essentiels de ce qu’on appelle” la santé globale” : celle des humains, des animaux, des plantes, de l’environnement. Tout est lié.
On a assez de vétérinaires ?
Ils sont un peu plus de 22 000. La France a été très en retard sur leur formation. Elle rattrape lentement. Mais on a quand même un problème. Les trois quarts des vétérinaires sont spécialisés dans les chiens et chats. 15% seulement sont des vétérinaires ruraux. Ils sont trop peu nombreux, et quand il faut vacciner massivement, comme maintenant, ça pose problème. S’ils devaient être malmenés encore dans cette épizootie, moins bien traités que des chiens, on ira vers un découragement général. Il nuira aux agriculteurs, aux animaux, et à terme, à nous tous.