Colère des agriculteurs : combien gagne, en moyenne, un exploitant en France ?

Une opération de blocage sur l'autoroute A64 entre Toulouse et Bayonne.
Une opération de blocage sur l'autoroute A64 entre Toulouse et Bayonne. © Frederic Scheiber / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP
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Romain Rouillard / Crédit photo : Frederic Scheiber / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP
Depuis plusieurs jours, les exploitants agricoles font entendre leur colère partout en France. Au cœur de leurs doléances, des normes, jugées étouffantes, mais aussi l'impact de l'inflation sur une activité déjà peu lucrative. Si des disparités existent, selon le type d'exploitation, le revenu moyen agricole peine à atteindre le Smic.

Les racines de leur colère sont assez multiples, mais convergent vers une souffrance commune : celle du manque de moyens. Depuis plusieurs jours, les agriculteurs font entendre leurs doléances aux quatre coins de la France, en conduisant leurs tracteurs jusque dans les villes ou en bloquant certains axes autoroutiers, notamment l'A64 qui relie Toulouse à Bayonne.

Les exploitants se disent étouffés par les normes auxquelles ils doivent se conformer, pointent du doigt la concurrence déloyale en provenance de certains pays non soumis aux mêmes règles qu'eux et dénoncent, de concert, un niveau de vie souvent insuffisant pour joindre les deux bouts. 

18% des ménages agricoles vivent sous le seuil de pauvreté

Selon des chiffres publiés par l'Insee en 2021, le revenu moyen annuel des ménages agricoles s'élevait à 52.400 euros. Une somme honnête, mais qui correspond à celle engrangée par l'ensemble du foyer et non par un seul agriculteur. D'ailleurs, l'Insee précise que seul un tiers de ces 52.400 provient de l'activité agricole, soit 17.700 euros.

Ce qui équivaut, chaque mois, à 1.475 euros brut, là où le Smic s'élève aujourd'hui à 1.766 euros. L'institut statistique précise également que la moitié des ménages agricoles doit se contenter d'un revenu annuel d'un peu plus de 22.000 euros, tandis que 18% d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté. 

Ces données cachent, par ailleurs, d'importantes disparités, selon le type d'exploitation considérée. Ainsi, les viticulteurs ou les céréaliers sont généralement bien mieux lotis que les éleveurs bovins dont les 10% des ménages les plus modestes doivent composer avec un niveau de vie inférieur à 10.000 euros par an. Dans cette catégorie, le taux de pauvreté grimpe jusqu'à 25%.

"Chez les céréaliers, il y a des hauts et des bas, car nous sommes sur des marchés mondiaux qui montent et qui baissent suivant les récoltes. Mais sur l'élevage, on est sur des marchés assez locaux qui sont assez peu mouvants. En ce moment, les prix se tassent et les coûts de production continuent à augmenter", éclaire Jean-Baptiste Moreau, agriculteur et ancien député. 

Un revenu moyen qui a dégringolé en 30 ans

À ces sommes brut, parfois modestes, il faut aussi déduire un certain nombre de charges et de coûts d'exploitation. "Il y a l'entretien et le coût du matériel. Surtout que l'on impose des tas de normes aux tracteurs, pour limiter la pollution, qui n'existent pas dans un certain nombre de pays dans le monde. Ça renchérit le coût à l'achat et aussi en réparation. Des coûts sans commune mesure avec nos voisins", pointe Jean-Baptiste Moreau. Sans compter le coût de la main d'œuvre, bien plus élevé en France que dans de nombreux pays européens.

Selon une note du ministère de l'Agriculture, publiée en janvier dernier, le revenu des agriculteurs a chuté de 40% en l'espace de 30 ans. Une dégringolade accrue ces derniers mois par l'inflation et l'explosion des tarifs de l'énergie. Ce mardi, Emmanuel Macron a demandé à son gouvernement d'apporter "des solutions concrètes" aux agriculteurs, tandis que la FNSEA, le premier syndicat agricole, a promis "un certain nombre d'actions" toute la semaine.