Les agriculteurs poursuivent mardi leurs actions pour obtenir des "mesures concrètes". 4:24
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avec AFP / Crédits photo : ADRIEN NOWAK / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP , modifié à
Les agriculteurs poursuivent mardi leurs actions pour obtenir des "mesures concrètes", après des discussions toujours dans l'impasse avec le gouvernement de Gabriel Attal. Tôt dans la matinée, une agricultrice est décédée sur un point de barrage, sa fille et son mari sont grièvement blessés. Suivez notre direct.
L'ESSENTIEL

Les agriculteurs continuent de multiplier les actions mardi, avec de nouveaux blocages d'autoroutes, un mouvement endeuillé par la mort d'une exploitante dans l'Ariège, renversée par une voiture qui a foncé sur un barrage de manière non intentionnelle, selon les premiers éléments de l'enquête. Un "drame qui nous bouleverse tous", a réagi mardi le président Emmanuel Macron sur X, demandant au gouvernement d'apporter "des solutions concrètes" aux difficultés de la profession.

Les informations à retenir :

  • Les agriculteurs poursuivent mardi leurs actions pour obtenir des "mesures concrètes"
  • Une agricultrice est décédée après un accident sur un barrage routier dans l'Ariège
  • Il n'y aura "pas de levée des actions" tant qu'il n'y aura "pas de décisions concrètes" de l'exécutif, a déclaré le président de la FNSEA Arnaud Rousseau
  • L'A64 entre Toulouse et Bayonne est coupée à la circulation au niveau de Carbonne depuis jeudi
  • Depuis lundi, l'A62 est bloquée au niveau d'Agen dans les deux sens

Gabriel Attal a reçu la coordination rurale

Le deuxième syndicat agricole a plaidé auprès du Premier ministre des mesures d'urgence. La priorité, pour sa présidente Véronique Le Floc'h, est la mise en place de facilités de trésorerie pour les agriculteurs. "Il n'est plus possible, pour les agriculteurs, d'attendre, de faire les banquiers pour l'État, alors qu'ils n'ont rien demandé". La coordination rurale réclame également une année blanche par rapport aux échéances bancaires et l'abandon de la taxation sur le gazoil non routier (GNR). 

À Matignon, les consultations se poursuivent avec la réception de la Confédération paysanne, le troisième syndicat agricole. Mais l'heure n'est pas encore aux annonces pour le Premier ministre qui devraient dévoiler de premières mesures de court terme dans la semaine, probablement à l'occasion d'un déplacement, sur le terrain, auprès d'agriculteurs. 

Attal dénonce les "larmes de crocodile" des oppositions à l'égard des agriculteurs

Gabriel Attal a fustigé mardi les "larmes de crocodile" des oppositions à l'égard des agriculteurs qui multiplient les actions en France comme ailleurs en Europe, protestant notamment contre des charges financières et des normes environnementales jugées trop lourdes. "Parfois, vos larmes pour nos agriculteurs ressemblent à des larmes de crocodile, vraiment", a déclaré le Premier ministre lors de la séance des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale.

"A chaque fois que nos agriculteurs, que nos éleveurs familiaux, ont un projet d'extension de leur élevage" ou "qu'un projet est lancé (...) sur une retenue d'eau pour lutter contre la sécheresse, sur des investissements pour nos exploitations, ce sont vos amis qui s'y opposent", a-t-il énuméré en visant surtout Insoumis et écologistes. "A chaque problème, vous répondez par une norme. À chaque difficulté, vous répondez en général en pointant du doigt nos agriculteurs", a dénoncé Gabriel Attal.

Revenus des agriculteurs : les éleveurs bovins dénoncent les "ambiguïtés" du gouvernement

Les éleveurs de bovins ont reproché mardi au gouvernement des "ambiguïtés" en poussant pour une baisse du coût de l'alimentation des Français au risque de détériorer les revenus des agriculteurs, malgré des lois devant les protéger lors des négociations entre supermarchés et industriels.

La colère qui s'exprime ces derniers jours sur les barrages routiers est "malheureusement assez logique", a estimé Patrick Bénézit, le président de la Fédération nationale bovine (FNB), association spécialisée du syndicat majoritaire FNSEA. Alors que les éleveurs de vaches à viande figurent parmi les plus faibles revenus agricoles, il juge notamment que le gouvernement manque d'allant à faire appliquer les lois dites Egalim qui devaient assurer que les agriculteurs ne soient payés en deçà de leurs coûts de production.

Les occupants du véhicule visés par une OGTF

Selon une source proche de l'enquête à Europe 1, les occupants du véhicule qui a fauché une famille, sont de nationalité arménienne. Ils avaient déposé une demande d'asile en 2022 qui leur a été refusée. Ils avaient fait ensuite plusieurs recours, dont ils ont été déboutés en 2023. Ils sont depuis visés par une OGTF mais ne sont pas connus des forces de l'ordre pour troubles à l'ordre public.

Les occupants du véhicule impliqué placés en garde à vue

Les victimes - une agricultrice de 35 ans, son conjoint de 40 et leur fille de 14 ans, selon le préfet - ont été renversées mardi entre 5h30 et 6 heures sur un barrage routier d'agriculteurs à Pamiers. Les trois occupants de la voiture qui a foncé sur le barrage, "un couple et une de leurs amies, tous trois de nationalité étrangère" selon le parquet, de nationalité arménienne selon une précision du préfet, ont été placés en garde à vue dans le cadre d'une enquête ouverte notamment pour homicide involontaire aggravé.

"Les faits en cause ne paraissent pas revêtir un caractère intentionnel", a souligné le parquet, mettant en avant la très faible luminosité sur place "en pleine nuit", "sans éclairage public". Le véhicule, qui s'était engagé sur la RN 20 alors que l'accès en était interdit, a percuté un mur de paille qui était "recouvert d'une grande bâche noire", derrière lequel des manifestants se restauraient.

Jérôme Bayle, l'organisateur du blocus sur l'A64, a confié dans l'émission Pascal Praud et vous mardi qu'il connaissait l'agricultrice, prénommée Alexandra, décédée dans la nuit sur un point de barrage en Ariège. Sur Europe 1, il a concédé avoir reçu plusieurs coups de fil. "Je la connaissais très bien. À 6 heures, le téléphone n'arrêtait pas de sonner. Je n'aurais jamais pensé avoir cette terrible nouvelle", a-t-il déclaré, adressant ses condoléances à la famille de l'agricultrice.

Le père accidenté est "grièvement blessé" et sa fille, dans un état "préoccupant" a été "héliportée au centre hospitalier de Toulouse", toujours selon le parquet. "Dans le moment particulier que vit l'agriculture, ce genre de drame est difficile à vivre", a déclaré le président de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), Arnaud Rousseau, sur RMC. "L'ampleur de ce qui est en train de se préparer ne sera pas modifiée par ce drame", a-t-il souligné ensuite, ajoutant : "les combats continuent".

De nombreux axes bloqués par la mobilisation des agriculteurs

Au lendemain d'une réunion apparemment infructueuse avec le gouvernement, de nouveaux blocages ont lieu. Vers 4 heures, une trentaine de tracteurs ont bloqué la circulation sur l'A7 dans les deux sens, entre Lyon et Valence, à hauteur de Saint-Rambert-d'Albon, selon la préfecture de la Drôme. Dans le Sud-Ouest, les barrages de l'A64 à hauteur de Carbonne en Haute-Garonne et aux accès à la centrale de Golfech dans le Tarn-et-Garonne restaient en place et des perturbations étaient signalées sur les axes A62 et A20.

Deux nouveaux blocages sont apparus sur l'A64 à Pau et l'A63 à hauteur de Bayonne, selon la préfecture des Pyrénées-Atlantiques, l'accès à l'Espagne depuis l'A64 restant cependant ouvert. À Agen, des dizaines de tracteurs bloquent l'A62. Le trafic ferroviaire, un temps perturbé dans la zone par un dépôt de pneus sur les voies, a été rétabli. Des agriculteurs se sont massés devant la préfecture, où ils ont observé une minute de silence en hommage à l'agricultrice décédée.

En Dordogne, la circulation est perturbée à plusieurs endroits, près de l'aéroport de Bergerac et sur un accès à l'A89, selon la préfecture. Des convois de tracteurs convergent aussi vers Limoges et Poitiers, où des manifestations sont attendues. De "petites actions" ont également eu lieu dans l'est lundi soir, par exemple au péage de Saint-Avold ou à la frontière allemande à Sarrebrucke, selon la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA) Moselle, qui annonce plus d'actions mercredi. Dans la Somme et l'Oise, des actions sont prévues à partir de la mi-journée, selon des sources syndicales.

"Plus de dignité"

"Le drame de ce matin (...) nous ramène encore plus de dignité dans notre mouvement et remobilise certainement encore plus", a déclaré mardi le président de la FDSA Oise, Luc Smessaert. Lundi soir, le gouvernement a accueilli les syndicats majoritaires, sans annonce à la sortie. Arnaud Rousseau a dit attendre du Premier ministre et de son équipe des déclarations "qui fassent bouger les lignes sensiblement", évoquant une remise immédiate sur le gazole pour les tracteurs. Gabriel Attal veut "aller vite", "dans la semaine", a affirmé dans la foulée le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau.

Premier syndicat agricole français, la FNSEA, a remporté ces dernières années de nombreux arbitrages auprès du gouvernement, comme sur les taxes sur l'eau ou les pesticides, mais les agriculteurs se plaignent de crouler sous les normes et de ne pas gagner assez bien leur vie. Parmi les multiples revendications entendues : des simplifications administratives, pas de nouvelle interdiction de pesticides, arrêter d'augmenter le prix du gazole pour les tracteurs ou encore la pleine application de la loi censée obliger les industriels et les grandes surfaces à mieux payer les produits agricoles.

Le gouvernement craint un embrasement. Des Pays-Bas à la Roumanie en passant par la Pologne ou l'Allemagne, les agriculteurs multiplient les actions contre les hausses des taxes et le "Pacte vert" européen. Mardi, les ministres européens du secteur agricole se réunissent à Bruxelles.