AAA : la "vraie" rigueur se précise

Le Premier ministre François Fillon n'a jamais caché les difficultés de la France mais a toujours préféré "l'austérité" à "la rigueur". Pour les économistes, il est temps d'entamer de profondes réformes pour mener une "vraie" politique de rigueur.
Le Premier ministre François Fillon n'a jamais caché les difficultés de la France mais a toujours préféré "l'austérité" à "la rigueur". Pour les économistes, il est temps d'entamer de profondes réformes pour mener une "vraie" politique de rigueur. © Maxppp
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Au-delà des échéances électorales, les économistes sont formels : il va falloir agir et vite.

La perte du triple A dont bénéficiait la France provoque de vives réactions parmi les politiques. Mais les économistes se montrent beaucoup moins surpris : l’annonce de Standard & Poor’s intervient bien après les nombreuses alertes qu’ils avaient lancées. La dégradation de notre note souveraine sanctionne une croissance atone mais surtout l'absence de réformes pour inverser la tendance. Pour les économistes, la France est désormais sommée de faire des choix pour réaliser de vraies économies. Échéance présidentielle ou pas.

"L’heure a sonné de régler ces comptes"

La perte du triple A est tout sauf une surprise pour l’économiste Yves Thibault de Silguy. "Cette mesure était largement attendue, je dirais normale depuis que les Américains ont été dégradés cet été. Elle était donc inéluctable", a décrypté Yves Thibault de Silguy, ancien commissaire européen, samedi sur Europe 1.

La France "a vécu pendant 30 ans au-dessus de nos moyens et il arrive un moment où l’heure a sonné de régler ces comptes. On ne peut pas continuer à financer son train de vie en faisant de la dette : aujourd’hui, on paie les comptes", a-t-il ajouté.

Agir pour ne pas s’enfoncer encore d’avantage

Non seulement la France a perdu son AAA, mais elle a été placée pour les mois à venir sous surveillance négative, "ce qui veut dire que nous entrons dans une période électorale qui va se dérouler sous le regard et la pression des marchés et des agences de notation", a rappelé l’ex-banquier et économiste Jean Peyrelevade, samedi sur Europe 1.

"Si nous donnons le sentiment que nous n’abordons pas nos problèmes de fond, nous serons à nouveau dégradés dans des délais relativement brefs", prévient-il, avec pour conséquences une nouvelle hausse des taux d’intérêt "d’ici un mois, un mois et demi" et le risque pour la France d’entrer dans un cercle vicieux.

La solution passe par une vraie rigueur

Les candidats doivent donc s’attaquer au problème et l’intégrer dans leur programms, sans succomber à la tentation de multiplier les réformes "cosmétiques". "Il va falloir faire des choix", résumait le banquier et éditorialiste Marc Fiorentino, vendredi soir sur France 5.

Cette situation, "on la combat comme ont fait les Canadiens, les Allemands ou les Suédois, c’est-à-dire par une politique de redressement qui passe par une vraie rigueur mais une rigueur intelligente", a renchéri l’économiste Nicolas Baverez, samedi sur Europe 1.

Le défi est de taille : "il faut trouver 120 milliards d’économies d’ici à 2016, mais il faut le faire à 80% par des baisses de dépenses publiques, par des privatisations et il faut le faire en préservant la croissance", a-t-il ajouté. Des réformes qu'a entrepris l'Allemagne entre 2003 et 2005, lorsque le chancelier Gérard Schröder lançait "l'Agenda 2010" : un ensemble de réforme impopulaires mais qui avaient été menées en période de croissance économique.