Comment Karine Tuil s'est inspirée de faits réels pour son roman "Les choses humaines"
"Les choses humaines" est un film d'Yvan Attal bientôt en salles. Ce long-métrage est une adaptation du livre éponyme de Karine Tuil. Invitée de "Ça fait du bien" mardi, la romancière raconte comment elle a puisé dans la réalité pour inventer son intrigue de scandale sexuel dans la bourgeoisie intellectuelle française.
Culture et incertitude riment toujours en ces temps de coronavirus, mais le film Les choses humaines devrait sortir en salles fin 2021. Ce long métrage d'Yvan Attal est une adaptation du roman du même nom de Karine Tuil, prix Goncourt des lycéens 2019 . Cette histoire de scandale sexuel dans une famille de la bourgeoisie intellectuelle parisienne est plus que jamais d'actualité. Mardi, dans l'émission Ça fait du bien , Karine Tuil raconte comment elle s'est inspirée de faits réels.
Sa principale inspiration est américaine. Karine Tuil a été marquée par l'affaire du viol dans l'université de Stanford . "J'avais été choquée par la réaction du père du jeune homme jugé coupable, qui avait dit 'On ne va pas détruire la vie de mon fils, sous-entendu de mon fils qui a brillamment réussi jusqu'à présent, pour 20 minutes d'action'. Et ces mots, '20 minutes d'action', racontent pour moi quelque chose de notre société", estime-telle. "C'est-à-dire le contraste entre la façon dont les victimes vivent une agression sexuelle et la façon dont ceux qui commettent l'acte le vivaient aussi."
Une violence sexuelle et de classe sociale
On retrouve donc ce déséquilibre de perception dans son roman. "Dans mon livre, le père est convaincu que son fils n'a rien fait et que ce n'est finalement qu'une petite liaison, que la fille s'est laissée faire. Parce que pour lui, ce n'est rien. Alors que pour cette fille, qui vient en plus d'un milieu juif pratiquant, le sexe est important."
L'intrigue des Choses humaines se déroule en France mais Karine Tuil a aussi repris de l'affaire du viol de Stanford l'idée du contraste des milieux d'origine entre le violeur et la victime. "Elle, elle est d'abord tétanisée par l'audience. Elle vient d'un milieu simple, n'a pas fait de brillantes études. Elle a effectivement du mal à s'exprimer. Et lui, il a les codes", explique-t-elle.
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"La confrontation des univers est quelque chose que je trouve très intéressant. Moi, je suis fille d'immigrés et c'est vrai que quand je suis arrivée dans le milieu éditorial, milieu quand même assez proche du milieu politique, j'ai découvert un univers que je ne connaissais pas, avec des codes particuliers."
La récente affaire Olivier Duhamel lui a malheureusement donné le sentiment que sa fiction rejoignait la réalité, sans ce que cela la surprenne pour autant. "Il y a d'ailleurs quelque chose que raconte Camille Kouchner dans son livre et qui m'a intéressée, c'est le contraste qu'il y a parfois entre les idéaux que vous prônez et la façon dont vous vivez votre propre vie", explique Karine Tuil, prenant pour exemple ces politiques qui vantent les mérites de l'école publique et de la mixité sociale, tout en mettant leurs enfants à l'École alsacienne. "C'est quelque chose de fréquent. Ce n'est pas un cliché", observe-t-elle.
"Le rôle de l'écrivain n'est pas de porter un jugement"
Mais l'hypocrisie qui l'a le plus inspirée est bien celle du rapport à la sexualité. "D'un côté, cette sexualité libre revendiquée. De l'autre, il y a une façon de vivre sa sexualité qui peut prêter à confusion, et des dérapages. On l'a vu notamment avec l'affaire DSK", indique la romancière.
Jean Farel, son personnage principal, a sa femme de 27 ans sa cadette. Il la trompe avec une autre, Françoise, avant d'avoir une maîtresse encore plus jeune. Et, pendant ce temps, il participe à des parties fines sans que personne n'en sache rien. "Ce personnage est un mélange de beaucoup d'hommes que j'ai pu rencontrer ou observer", confie la romancière.
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Mais il ne s'agit pas pour Karine Tuil de porter un jugement. "Je pense que ce n'est pas le rôle de l'écrivain, c'est au lecteur d'avoir sa propre grille de lecture", théorise-t-elle. "D'ailleurs, dans le livre, Jean Farel considère qu'il est correct vis-à-vis des femmes. Il dit toujours 'Je veux qu'elles soient consentantes. J'essaye de ne pas déraper'." L'écrivaine ajoute : "Ce qui m'intéresse, c'est de raconter les travers de notre société."
Le film d'Yvan Attal devrait sortir fin 2021, avec à l'affiche Yvan Attal, Charlotte Gainsbourg, Benjamin Lavernhe et Judith Chemla.