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C’est officiel, cinq équipes sud-africaines vont intégrer les coupes d’Europe de rugby dès la saison prochaine. Et ce n'est pas vraiment une bonne nouvelle pour l'éditorialiste Virginie Phulpin qui considère que s'il faut "internationaliser le rugby", "on aurait pu attendre la coupe du monde 2023 en France pour voir les stars sud-africaines fouler nos terrains".
EDITO

Dès la saison prochaine, cinq équipes sud-africaines vont intégrer les coupes d’Europe de rugby. Si cela devrait attirer de plus en plus de spectateurs et permettre aux Européens de découvrir les stars sud-africaines du ballon ovale, ce n'est pas vraiment une bonne nouvelle pour l'éditorialiste Virginie Phulpin.

"Les supporters du Stade rochelais ont bien fait de se réunir à 35.000 sur le port pour fêter leurs champions d’Europe comme il se doit il y a quelques jours. Il fallait en profiter, parce que ce seront les derniers véritables champions d’Europe. On va pouvoir inventer le pendant inverse de la phrase culte de l’OM "à jamais les premiers". Là, c’est "à jamais les derniers".

"On dirait les pires penchants du foot"

La saison prochaine, je ne sais pas comment on appellera les vainqueurs, mais Champions d’Europe, ça n’ira plus. Champions Nord-Sud, champions du méridien de Greenwich peut-être. Même si ça ne colle pas tout à fait, ce sera plus exact que de parler d’Europe avec cinq équipes sud-africaines. Je dois être un peu réac, mais une coupe d’Europe, je trouve ça pas mal entre des clubs européens.

Et puis pourquoi dénaturer une compétition comme ça ? Alors oui, j’ai bien compris. Il s’agit d’attirer un nouveau public, d’internationaliser le rugby, de faire en sorte que le public européen voit plus souvent les stars sud-africaines championnes du monde en titre. Mais en fait, ça va surtout finir par dégoûter tout le monde ces petits arrangements avec les valeurs. On dirait les pires penchants du foot, et ça n’est pas un compliment. Les stars sud-africaines, on aurait pu attendre la coupe du monde 2023 en France pour les voir fouler nos terrains. Ça aurait gardé le côté exceptionnel d’un Mondial.

Les clubs français ne sont pas tous ravis de l’arrivée des Sud-Africains

Ils vont jouer plus, alors qu’on ne cesse de dire que les calendriers sont déjà surchargés, ils vont faire plus de kilomètres, passer du temps dans l’avion plutôt que de récupérer de manière optimale entre deux matches. Donc il y aura sans doute plus de blessures. Et en tout cas plus de fatigue, ça c’est certain. Qu’on ne vienne pas se plaindre pendant la coupe du monde que les joueurs sont usés et qu’ils ne donnent pas le meilleur d’eux-mêmes.

À force de les essorer, au bout d’un moment, il n’y a plus de jus. Tout ça pour une compétition hybride qui va perdre de son sens. Et puis l’EPCR, en gros l’équivalent de l’UEFA en rugby, se targue d’avoir des engagements environnementaux importants. Et c’est vrai. Fin mars, par exemple, elle a organisé une collecte de déchets dans les Calanques marseillaises. Pour nettoyer et sensibiliser à la pollution des plages et de la mer.

Il va falloir en organiser combien, des collectes, pour compenser le bilan carbone de ces coupes d’Europe et d’Afrique du Sud ? Lénaïg Corson, une des meilleures joueuses du XV de France féminin, est très engagée pour la planète, elle participe aux projets RSE du rugby français, c'est-à-dire la contribution du rugby français aux enjeux environnementaux. Et là, elle est assez interloquée. Je crois qu’on peut la comprendre."