EDITO - "Entre la direction de l'OM et les supporters, le mépris d’un côté, les insultes de l’autre"

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Virginie Phulpin , modifié à
Pour Virginie Phulpin, notre éditorialiste sport, les graves incidents qui ont eu lieu à la Commanderie résultent d’un pourrissement de la situation entre la direction de l’OM et les supporters. 
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Au lendemain des graves incidents qui ont eu lieu à la Commanderie, le centre d'entraînement de l'Olympique de Marseille, le propriétaire Frank McCourt a réaffirmé son soutien au président Jacques-Henri Eyraud, cible principale de la colère des supporters. Mais le club va désormais devoir retrouver un peu de sérénité pour finir tant bien que mal une saison totalement chaotique. Pour Virginie Phulpin, notre éditorialiste sport, ces faits inadmissibles résultent d’un pourrissement de la situation entre la direction de l’OM et les supporters. 

"Ce sont aujourd’hui des camps opposés l’un à l’autre, et chacun fait comme si l’OM lui appartenait. La direction et l’actionnaire principal parce que ce sont eux qui mettent l’argent. Et les supporters parce qu’ils représentent l’âme du club. Et entre les deux, le vide. Le mépris d’un côté, les insultes de l’autre. Personne ne se parle, et la situation pourrit. Vous ajoutez à ça des fans privés de tribunes à cause de la crise sanitaire, une tension générale dans le pays face aux incertitudes, des mauvais résultats sportifs, des finances dans le rouge, et vous obtenez un cocktail explosif. En fait toute manifestation de supporters peut dégénérer aujourd’hui à Marseille. Ca part au quart de tour. Surtout qu’il y a toujours des petits malins pour exciter les troupes et les inciter à commettre l’irréparable. L’effet de groupe faisant le reste.

Normalement, les supporters ont des droits et des devoirs. Le problème, c’est qu’en se laissant gangréner par des irresponsables violents, ils oublient qu’ils ont des devoirs. Et la direction, en les malmenant à chaque prise de parole, oublie qu’ils ont des droits. Résultat, on arrive à ces scènes d’émeutes, pour du football. Bon sang on est en pleine pandémie, en pleine crise, et on doit en plus assister à une attaque rangée plutôt que de voir un match de foot. Il y a quand même un léger problème quelque part. 

La situation ne s’arrangera pas sans une vraie remise en question de part et d’autre

Sur le plan purement sportif, l’entraîneur André Villas Boas évoquait déjà son départ l’été prochain. Là, s’il faisait ses valises maintenant, qui pourrait lui en vouloir ? Il est coach de Ligue 1, pas casque bleu. Et les joueurs qui étaient déjà mauvais ces derniers temps, pas sûr que ce genre d’attaque les libère sur le terrain. Donc oui, les supporters vont devoir faire amende honorable, ce qui s’est passé est grave, il n’y a pas de débat là-dessus. Mais la direction de l’OM ne peut pas non plus rester sur la même ligne. Quand le président Jacques-Henri Eyraud réagit hier en pointant du doigt l’OM des magouilles, je cite, il joue plus les pompiers pyromanes que les sauveurs.

Quant à l’actionnaire principal Frank Mc Court, il compare l’attaque du centre d’entraînement à l’envahissement du Capitole à Washington. Mais enfin, les mots ont un sens. Et cette comparaison hasardeuse n’en a pas. Non, la Commanderie ne représente pas la démocratie d’un pays. Il va quand même falloir s’intéresser à l’histoire de l’OM, au rôle des supporters, et associer les grands anciens du club au projet. On ne peut pas gérer l’Olympique de Marseille comme une succursale française d’une multinationale américaine. Sinon, le chaos de samedi se reproduira".