Sa fille a été violée en soirée étudiante : "Elle a fait une tentative de suicide"

  • Copié
Léa Beaudufe-Hamelin , modifié à
La fille de Marie a fait une tentative de suicide après avoir été violée par un de ses amis lors d’une soirée étudiante. Au micro d’Olivier Delacroix, sur "La Libre antenne" d’Europe 1, Marie raconte comment elle et son mari ont accompagné leur fille qui ne voulait d’abord pas leur en parler.
TÉMOIGNAGE

La fille de Marie a été violée par un de ses amis lors d’une soirée étudiante. Ce n’est que trois semaines plus tard que ses parents l’ont appris, après qu’elle a fait une tentative de suicide. Au micro de "La Libre antenne", sur Europe 1, Marie raconte le parcours de reconstruction de sa fille qui commence à aller mieux, un an après les faits. Elle invite aussi les parents à davantage éduquer les garçons autour de la notion de consentement.

"Notre fille de 20 ans a été violée lors d’une soirée étudiante par un de ses amis. Elle ne nous en a pas parlé. Nous avons été mis au courant par une de ses amies trois semaines après, parce qu’elle a fait une tentative de suicide. Elle est à plusieurs centaines de kilomètres de notre maison. Nous sommes allés la voir immédiatement. J’étais totalement désemparée. J’étais incapable de l’aider, incapable de comprendre le fait qu’elle ait souhaité mourir et incapable de comprendre cette souffrance énorme qu’elle a dû ressentir pendant ces trois semaines où elle ne nous a pas demandé d’aide.

" Elle se sent coupable, pas victime "

Quand on est arrivés, elle nous a dit qu’elle ne porterait pas plainte. Elle était catégorique. Elle se sent coupable, pas victime. Il fallait qu’on fasse des choses avec elle, mais qu’on ne parle surtout pas de ça. Après, elle a réussi à en parler. J’ai cru comprendre qu’il était amoureux d’elle. Je suis très en colère qu’elle ait eu envie de mourir. Je ne veux pas du tout minimiser l’acte, bien sûr que ce n’est pas acceptable qu’un garçon continue quand une fille ne veut pas. Ma fille n’a pas dit non, elle n’a pas réussi à le prononcer. 

Les choses ont changé. Quand je regarde 40 ans en arrière, je pense que ma première relation sexuelle n’était pas du tout voulue. Je n’ai rien dit, comme ma fille. Le lendemain, je n’étais pas bien, mais ma vie a continué. J’ai l’impression de minimiser, mais je ne veux pas minimiser. Ce n’était pas la même époque. J’ai continué à vivre normalement, pourquoi ça ne s’est pas passé comme ça pour elle ? Pourquoi a-t-elle risqué de mourir ?

" Il ne faut pas réclamer qu’elle parle "

Il s’est écoulé presqu'un an. Elle commence à aller mieux et à ressortir. On commence à voir le bout du tunnel. Je suis sûre qu’elle va s’en sortir. Il y a eu le confinement et les vacances scolaires. Je pense qu’elle va être amenée à revoir ce garçon. Elle m’a dit qu’il avait cherché à reprendre contact avec elle, parce qu’il est visiblement épris d’elle. Ça ne se fera jamais, mais j’aimerais tellement pouvoir le rencontrer et lui dire le mal qu’il lui a fait. A-t-il seulement conscience de ce qu’il a fait ?

Bien qu’on se soit sentis impuissants et dévastés, à force de patience, d’amour, d’être toujours à son écoute à n’importe quelle heure de la nuit, on s’en sort. On voyait ça sans issue, on se disait qu’elle ne pourrait plus jamais revivre comme avant. Son papa a joué un rôle très important. Moi, j’avais trop de colère en moi. Je voulais qu’elle me parle, mais il ne faut pas réclamer qu’elle parle. Je pense qu’il a su moins faire état de son inquiétude et de sa souffrance. Pourtant, je sais que c’était très difficile pour lui.

Je pense que c’est aussi la faute des parents vis-à-vis des garçons. On a toujours peur pour nos filles, on les met en garde. Mais on ne parle jamais à nos garçons du fait qu’ils n’ont pas le droit de coucher avec une fille lorsqu’elle ne veut pas. Il faut que les parents intègrent cette valeur dans leur éducation. Je ne l’ai pas fait pour mes garçons qui ont 30 ans. Ça doit être quelque chose dont on parle en famille. Il faut que ce soit une évidence pour eux."