Rony Brauman : entre le voile et la kippa, "il y a deux poids, deux mesures"

Rony Brauman
Rony Brauman
  • Copié
A.D , modifié à
Que penser du port de la kippa ? Rony Brauman, ancien président de Médecins sans frontières et professeur à l'université de Manchester était l'invité de David Abiker, ce samedi dans C'est arrivé cette semaine.
INTERVIEW

A Marseille, lundi, un adolescent de 15 ans frappait un enseignant qui portait la kippa. "Quand on agresse une personne au nom des signes d’appartenance religieuse, c'est indiscutablement un acte d'hostilité envers la religion. Donc on retrouve bien la question de l’antisémitisme", commente Rony Brauman, professeur à l'université de Manchester, au micro de David Abiker, samedi, dans C'est arrivé cette semaine. L'intellectuel s'interroge cependant sur la signification sociale du port de la kippa, "non pas pour la personne qui la porte – parce que je n’ai aucun soupçon à mettre sur elle -, mais socialement, est-ce qu’on affirme simplement une affiliation religieuse ou autre chose ? Moi, mon impression, c’est que l’on affirme autre chose, à savoir une affiliation politique. Il y a une double signification aujourd’hui qui est attachée au port de la kippa ». 

"Une affiliation politique", mais à quoi ? "On affirme une affiliation politique, un signe de fidélité à l'Etat d'Israël - après tout pourquoi pas -, mais aussi, et c'est plus problématique, un signe allégeance à la politique de l'Etat d'Israël", pense Rony Brauman.

Exhibition de signe religieux. S'il ne "prête pas à cet ado une analyse politique", le spécialiste s'étonne "que la République, dans sa vision laïcarde, qui refoule les signes religieux hors de l'espace public, exhibe cette fois ce signe. Quand une femme voilée se fait attaquer, il s'agit d'écarter ces signes religieux. C'est différent quand c'est un homme avec kippa qui se fait agresser. 

Est-ce à dire qu'il y a deux poids, deux mesures ? "Oui, je pense qu'il y a deux poids, deux mesures. Cela me semble être un fait objectif, une réalité indiscutable. On peut s'interroger sur les raisons de ce deux poids, deux mesures mais on ne peut pas s'interroger sur son existence."

"La République défend ce symbole plus que n'importe quel autre ?", demande David Abiker. "Oui, et les parlementaires qui sont arrivés à l'Assemblée nationale avec une kippa (Claude Goasguen et Meyer Habib) font aussi partie de ces gens qui ont sifflé quand la mère d'une victime de Merah est arrivée au parlement avec un foulard, poursuit le professeur. Par ailleurs, ces parlementaires sont comme des amis intimes de Benjamin Netanyahou, le Premier ministre israélien. Ils le professent sans cesse. Ils sont des amis d’Israël, pas de la communauté juive. D'ailleurs, je ne sais même pas ce qu'est la communauté juive. Je me demande ce que les gens penseraient si des institutions musulmanes se faisaient les représentantes d'un Etat islamique en France."