Emmanuel Macron doit annoncer ce jeudi son "plan Eau". Le président de la République devrait dévoiler une cinquantaine de mesures pour préparer les territoires à affronter la sécheresse estivale et repenser l’usage de l’eau en France, afin d’en économiser davantage.
Un effort devrait être demandé à l’industrie, un secteur gourmand en eau à cause du refroidissement et du nettoyage des machines, deux usages pour lesquels l’eau usée traitée pourrait convenir. C’est en tout cas déjà le cas dans les pays voisins, puisque la législation européenne l’autorise. C’est en revanche interdit en France dans le cadre de l’agro-industrie.
Mais la plus importante usine du groupe Danone, située en Normandie à Ferrières-en-Bray, se dit prête à redonner une seconde vie à l’eau usée, issue en partie du lactosérum (le nom scientifique du "petit-lait") de ses yaourts et fromages, sans mettre en danger la santé humaine.
De l’eau usée pour refroidir et nettoyer les équipements
A l’intérieur de l’usine, des pompes entrelacées entourent d’immenses cuves en inox, pour conduire le yaourt jusqu’à sa mise en pot. "Ces pompes ont besoin d'être refroidies", explique Bruno Mauduyt, directeur de l’usine. "Sinon, les garnitures s'échauffent", poursuit-il. "Typiquement, j'aimerais qu'on puisse utiliser de l’eau usée pour rafraîchir ce genre d'équipements, et éviter de gâcher de l’eau potable."
Il souhaiterait faire de même avec les cuves, qui nécessitent plusieurs centaines de litres d’eau à chaque nettoyage. "Le dernier rinçage pourrait se faire avec de l'eau neuve, car cette eau serait en contact direct avec le produit", précise Bruno Mauduyt. "Mais pour les premiers rinçages, il n'y a absolument aucune contre-indication d’utiliser de l’eau grise."
Un recyclage de l’eau interdit par le code de la santé publique
A l’étranger, dans ses usines de fabrication de produits laitiers, Danone ré-utilise son eau. C’est en revanche interdit dans l’agro-industrie française. "On ne peut pas le faire en France parce que le code de la santé publique nous contraint à n'utiliser que de l'eau issue de milieu naturel au sein de notre outil de production", déplore-t-il.
"Pourtant, l'ensemble de nos outils de recyclage d'eau sont extrêmement bénéfiques pour l’environnement et sans aucunes conséquences sanitaires pour l'homme’, justifie le directeur de l’usine de Ferrières-en-Bray.
"Nous avons la solution et l’argent, il nous manque l’aval du gouvernement"
L'usine normande possède d’ailleurs sa propre station d’épuration. "A la sortie, comme vous pouvez le voir, on a une eau parfaitement limpide, propre à la consommation", s’enthousiasme Bruno Mauduyt en plongeant sa main dans la grande réserve d’eau qui se trouve derrière l’usine.
"Nous avons la solution technique et nous avons l'argent - puisque le coût d'utilisation serait nul après un investissement de 4 millions d’euros dans le système de recyclage -, donc aujourd'hui, on attend uniquement l'aval du gouvernement", affirme-t-il.
Le dispositif a déjà été expérimenté par Danone pendant trois mois et permettrait d’économiser 200 000 mètres cubes tous les ans, soit 30% de la consommation annuelle en eau potable de l’usine.