Coronavirus 1:38
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Élise Denjean et Louis de Raguenel , modifié à
L'obligation vaccinale pour les soignants entre en vigueur mercredi et ces derniers devront justifier d'au moins une dose du vaccin anti-Covid pour aller travailler. S'ils refusent, ce sera la suspension. Une mesure délicate pour l'exécutif, alors que quelque 300.000 soignants ne sont toujours pas vaccinés.
DÉCRYPTAGE

C'est un tournant dans la politique vaccinale française contre le Covid-19 : dès mercredi, les soignants devront avoir reçu une dose s'ils veulent continuer à travailler, comme l'avait annoncé Emmanuel Macron en juillet dernier. Si cette mesure ne met pas dans l'embarras une partie majeure des soignants, elle suscite pourtant la contestation de quelques-uns d'entre eux, qui se refusent à recevoir une injection. Pour le gouvernement, il s'agit de "temporiser" pour s'éviter une fronde.

Quels sont les niveaux de vaccination chez les soignants ?

Selon les derniers chiffres du ministère de la Santé, le taux de couverture vaccinale dans les établissements de santé atteint désormais 89%, comme la part de soignants vaccinés dans les Ehpad. Les bons élèves restent les soignants libéraux : 95% d'entre eux ont reçu leur première injection. On frôle les 100% chez les médecins généralistes et chez les spécialistes.

Il existe une exception : 10% des sages-femmes ne sont pas vaccinées. Les taux de vaccination sont encore plus élevés ce mercredi puisque les derniers chiffres disponibles datent de dimanche soir. En deux jours, beaucoup de soignants ont reçu - en urgence - leur première dose.

Des problèmes liés à cette mesure sont-ils constatés localement ?

Il ne reste que très peu de réfractaires à la vaccination mais cela peut malgré tout poser des problèmes dans certains établissements. Il y a quelques exemples de problèmes liés à cette mesure. À Montélimar par exemple, l'hôpital va être obligé de reprogrammer des opérations. Là-bas, une centaine de soignants refusent le vaccin et en particulier trois anesthésistes, qui sont des postes cruciaux.

"Compte tenu des difficultés, nous avons lancé un SOS général", explique Henri Osman, président des médecins de l'hôpital de Montélimar. "Pour le moment, on a eu un anesthésiste qui peut se détacher pour la semaine prochaine, sachant qu'il nous faut au minimum quatre anesthésistes sur place." Dans cet hôpital, le DRH reçoit déjà les personnels de santé qui refusent de se faire vacciner pour discuter de la suite au-delà de leur suspension.

L'exécutif va-t-il temporiser ou sanctionner les réfractaires ?

Alors que quelque 300.000 personnels soignants n'avaient reçu aucune dose mardi soir, l'exécutif ne sera sans doute pas aussi ferme qu'il le prétend. Le gouvernement joue en effet un numéro d’équilibriste : face aux caméras, Olivier Véran, le ministre de la Santé, va afficher fermeté et sanctions, en rappelant que les réfractaires étaient prévenus. Concrètement, il y aura dans un premier temps la mise en scène de quelques sanctions ou au contraire de soignants qui ont fini par se faire vacciner.

De l’autre côté, à l'Élysée, on temporise. "On n’a pas très envie de montrer les sanctions, d'autant que l'épidémie est en train de reculer", explique un conseiller du chef de l'État. Au sein de l’exécutif, on n’oublie pas que les soignants ont été fortement mobilisés pendant la crise et qu’ils sont mal rémunérés. Pas la peine d’en rajouter une couche, en somme.

Par ailleurs, le gouvernement pourrait-il lever les contraintes ?

L'exécutif regarde de près la situation au Danemark : le pays a décidé en début de semaine de lever toutes les contraintes, et même de se débarrasser du pass sanitaire. D'ailleurs, dans une dizaine de jours, les principaux acteurs de la gestion de la crise sanitaire en France feront le point. Ils pourraient envisager de lever certaines restrictions. Dans ces conditions, pourquoi imposer des sanctions si certaines contraintes peuvent-être levées ?

Enfin, il y a un sujet vraiment politique. Alors que Marine Le Pen essaie de s’installer en défenseur des libertés, la consigne de l’Elysée à plusieurs ministres est claire : pas question de faire passer Emmanuel Macron pour un président liberticide.