Un sondage publié en juillet révèle qu’une jeune femme sur six ne porte jamais de soutien-gorge. 1:28
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Léa Leostic
Pendant le confinement, la tendance du "no bra", c’est-à-dire ne plus porter de soutien-gorge, a pris de l’ampleur. Camille Froidevaux-Metterie, philosophe et professeure de sciences politiques, est revenu sur ce phénomène dimanche au micro d’Europe 1. Elle estime que cela a permis aux femmes de développer un rapport plus libre à leur corps, même si de nombreux diktats perdurent.
INTERVIEW

Le soutien-gorge est-il en train de perdre du terrain ? La tendance "no bra" (sans soutien-gorge) a pris de l’ampleur pendant le confinement. Un sondage de l’Ifop publié au mois de juillet révélait qu’une jeune femme sur six ne portait jamais de soutien-gorge. La proportion est quatre fois supérieure à celle mesurée avant le confinement (4%). "Le confinement a permis aux femmes de se débarrasser des regards qui pèsent sur elle dès qu’elles sortent dans l’espace public", analyse Camille Froidevaux-Metterie, philosophe et professeure de sciences politiques, dimanche matin au micro d’Europe 1. "Cette expérimentation a permis aux femmes de développer un rapport plus libre à leur corps. C’est peut-être un des rares effets positifs du confinement", poursuit-elle.

 

Se débarrasser des normes et des injonctions

Inventé au 19e siècle, le soutien-gorge a pourtant d’abord été un outil d’émancipation et de libération pour le corps des femmes, car il les libéraient du corset. "Mais il y a eu un tournant à la fin des années 90, avec l’invention des push-up, des soutiens-gorge rembourrés, qui se sont imposés. Ils ont 'recorseté' le corps de la femme, puisqu'ils ont pour objectif d’uniformiser les seins des femmes, de les rendre tous conformes à un certain idéal alors qu’il y a une infinité de forme de sein", développe Camille Froidevaux-Metterie, autrice du livre Seins : enquête d’une libération.

Alors pourquoi la tendance du "no bra" a-t-elle pris de l’ampleur pendant le confinement ? "Enlever son soutien-gorge rejoint une aspiration globale à se débarrasser des normes et des injonctions. […] Se libérer du soutien-gorge, c’est assumer ses seins comme ils sont. Cela participe à l’envie d’une plus grande liberté et sérénité des femmes vis-à-vis de leur propre corps", répond Camille Froidevaux-Metterie.

Des diktats continuent de peser sur les femmes

"Les femmes sont tiraillées entre, d’un côté, une grande liberté, tout à fait inédite à l’échelle de l’histoire, et d’un autre, une série de diktats qui continuent de peser sur les femmes. Il y a aussi encore trop de gens qui considèrent que le corps des femmes est un corps à disposition, et notamment les seins. Beaucoup pensent que les seins sont faits pour les enfants et l’allaitement, et pour les hommes et la vie amoureuse et sexuelle", conclut la philosophe.