Manipulation : qu'est-ce que la technique du pied dans la porte ?

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Gauthier Delomez , modifié à
Réunis dans l'émission "Bienfait pour vous", le mentaliste Viktor Vincent et le co-auteur du "Petit traité de manipulation à l'usage des gens honnêtes", Robert Vincent-Joule, évoquent l'art de la manipulation, et notamment la technique du pied dans la porte qui peut se pratiquer dans la rue.

Vous en avez peut-être été victime sans vous en rendre compte. La technique du pied dans la porte est une technique de manipulation qui peut se pratiquer dans la rue. Dans l'émission Bienfait pour vous, aux côtés de Viktor Vincent, mentaliste et auteur du livre Les clés de la manipulation, Robert-Vincent Joule, co-auteur du Petit traité de manipulation à l'usage des gens honnêtes, détaille les tenants et les aboutissants de cette technique facile à reproduire.

"C'est de loin ma préférée parce qu'elle nous permet d'obtenir ce que l'on souhaite sans qu'on n'ait même à le demander, en formulant une demande implicite", annonce d'abord Robert-Vincent Joule au micro de Julia Vignali et Mélanie Gomez.

L'expérience du "billet perdu"

Pour illustrer sa pensée, Robert-Vincent Joule raconte une expérience qu'il a réalisée à Aix-en-Provence dans les Bouches-du-Rhône il y a quelques années, et connue sous le nom de "billet perdu". "Voilà quelqu'un qui perd un billet de 10 euros, c'est un expérimentateur. La personne qui voit le billet tomber est un sujet naïf, son comportement est observé. J'ai eu la tristesse de constater que la probabilité que la personne dise à l'expérimentateur qu'il a perdu son billet est relativement faible : seuls 20% des gens avertissent le sujet de la perte de son billet", a constaté Robert-Vincent Joule.

Sa technique de manipulation va permettre de relever ce taux. "Dans un premier temps, on va obtenir un petit acte, si peu coûteux que personne n'aurait l'idée de le refuser. En l'occurrence, on va lui demander un petit renseignement. C'est quelqu'un d'autre qui prend une ruelle, un Anglais, et qui dit au sujet qu'il a perdu son chemin. Il obtient un service de la part de quelqu'un, et cette personne qui a rendu service continue son chemin."

Le professeur à l'université d'Aix-Marseille poursuit l'expérience : "200 mètres plus loin, un autre expérimentateur perd son billet de banque. La personne (qui a rendu un premier service) est témoin de cette perte de billet. Cette fois, ce n'est plus 20 mais 40% (qui avertissent le sujet)", relate-t-il. Pourquoi ? "En rendant service dans un premier temps, une petite lampe s'allume dans la tête et dit 'Toi, tu es serviable'", répond Robert-Vincent Joule.

De 20% jusqu'à 90% de réussite

L'expérience peut même aller plus loin, pour aboutir à un taux de réussite jusqu'à 90%. "En augmentant le coût de l'acte préparatoire, on fait briller davantage cette lampe", souligne l'auteur du Petit traité de manipulation à l'usage des gens honnêtes. "On leur demande le chemin, et on fait semblant de ne pas comprendre. La personne répète, et en répétant, la vie lui montre qu'elle est vraiment serviable. Lorsqu'elle va être témoin de la perte du billet, ce n'est plus 40 mais 55%" de réussite.

"On peut faire mieux", enchaîne Robert-Vincent Joule. "Cette fois, je l'amène à se déplacer de 50 mètres pour mettre l'Anglais dans la bonne direction. La lampe brille un peu plus, c'est 70%, et si on ajoute la chance de tomber sur quelqu'un de serviable, on arrive à 90%", remarque-t-il. Ce passage de 20% à 90% de chances "ne tient à strictement rien, ni à la personnalité des gens, ni aux valeurs, mais au fait d'avoir été amené par les circonstances à réaliser un acte préparatoire plus ou moins coûteux".