La famille d'un blessé porte plainte pour tentative de meurtre. 1:44
  • Copié
avec AFP , modifié à
La famille d'un homme entre la vie et la mort depuis la manifestation de samedi dans les Deux-Sèvres a porté plainte contre X pour "tentative de meurtre et entrave volontaire à l'arrivée des secours". Le parquet de Niort a indiqué ne pas avoir pu "déterminer l'origine de la blessure" avant de se dessaisir au profit de celui de Rennes.

La famille d'un homme entre la vie et la mort depuis la manifestation "antibassines" interdite samedi dans les Deux-Sèvres a porté plainte pour tentative de meurtre et entrave aux secours, alors que les autorités défendent l'action des forces de l'ordre. Il s'agit des parents d'un manifestant de 32 ans, originaire de Toulouse, victime d'un traumatisme crânien autour du chantier d'une retenue d'eau à Sainte-Soline, où de violents affrontements ont eu lieu avec les gendarmes.

Il a été blessé "par une grenade GM2L", déclarent dans un communiqué ses parents. Ils reconnaissent que leur fils est "fiché S" et "a eu des problèmes judiciaires", "comme la plupart des gens qui se battent contre l'ordre établi", ajoutent-ils en défendant "son honneur".

Un délai de prise en charge dénoncé

Le parquet de Niort a indiqué ne pas avoir pu "déterminer l'origine de la blessure" avant de se dessaisir au profit de celui de Rennes en raison de sa compétence militaire. Le délai de prise en charge de ce manifestant à Sainte-Soline est dénoncé par les organisateurs et des observateurs de la Ligue des droits de l'Homme (LDH), pour qui les autorités ont entravé l'intervention des secours - ce qu'elles démentent.

"Le Samu a indiqué ne pouvoir intervenir pour secourir un blessé en état d'urgence vitale, dès lors que le commandement avait donné l'ordre de ne pas le faire, dans une conversation téléphonique à laquelle ont assisté trois avocats de la LDH", écrivait celle-ci dès dimanche.

Un appel rendu public

Cet appel enregistré, dont le contenu a été rendu public mercredi par les organisateurs, est au coeur de la polémique. Il implique un médecin et une avocate de la LDH qui, depuis un village voisin, étaient en lien avec des personnes au contact des blessés, dont celui en urgence vitale. "On n'a pas l'autorisation d'envoyer des secours (...) parce que c'est considéré comme étant dangereux", répond le Samu à l'avocate lors de cet échange, imputant la décision au "commandement sur place".

Depuis samedi, les autorités justifient le délai d'intervention des secours par la nécessité, pour les gendarmes, d'assurer leur sécurité. C'est à cette fin que les forces de l'ordre ont pu, "pour certaines géolocalisations et dans certaines périodes de temps, indiquer qu'un envoi d'ambulance n'était pas possible dans l'immédiat", assure la préfecture des Deux-Sèvres. La LDH lui oppose que la zone où se trouvait le blessé était "totalement calme depuis plusieurs dizaines de minutes" au moment de la conversation téléphonique, entamée à 14h50 samedi tandis qu'un médecin militaire se rapprochait de la victime.

Un "retour relatif au calme" observé ce mercredi

Selon la gendarmerie, un "retour relatif au calme" était constaté depuis 14h20 autour de la bassine, soit 30 minutes avant l'appel, avant une brève reprise des heurts entre 15h23 et 15h27. D'après la préfecture, un premier appel aux pompiers avait signalé le blessé à 13h49. Déclenché à 14h01, un Smur de Charente, que les gendarmes ont renoncé à escorter jusqu'au bout face à "l'hostilité" de certains manifestants, a rejoint la victime à 14h57 ; elle a été héliportée vers l'hôpital de Poitiers à 16h34. "Non, les secours n'ont pas été empêchés par les forces de l'ordre", a répété mercredi au Sénat le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin.

De 6.000 à 8.000 personnes selon les autorités, 30.000 selon les organisateurs, ont manifesté samedi. Dans deux rapports, préfecture et gendarmerie ont justifié l'action des forces de l'ordre face à 800 à 1.000 manifestants "radicaux". Selon eux, la riposte a été ciblée et proportionnée mais la LDH dénonce "un usage immodéré" de la force sur l'ensemble des manifestants, dès qu'ils ont approché la réserve d'eau. Les organisateurs ont dénombré 200 blessés, dont un autre resté dans le coma mais sans pronostic vital engagé désormais.

D'après la chronologie et les chiffres officiels, les affrontements ont duré 1H20 environ et 5.015 grenades lacrymogènes ont été tirées, soit environ une par seconde. La gendarmerie a eu recours aussi à 89 grenades de désencerclement de type GENL, 40 dispositifs déflagrants ASSR et 81 tirs de LBD.

Gérald Darmanin a engagé la dissolution du mouvement des Soulèvements de la Terre, l'un des organisateurs avec le collectif "Bassines non merci" et le syndicat agricole Confédération paysanne. Ces derniers ont appelé à se rassembler devant toutes les préfectures jeudi à 19H00 "pour la fin des violences policières".