Un propriétaire peut-il être "complice" du tapage nocturne de ses locataires ?

Peut-on être "complice" de tapage nocturne ? (photo d'illustration).
Peut-on être "complice" de tapage nocturne ? (photo d'illustration). © GERARD JULIEN / AFP
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Roland Perez
A la suite d'un récent arrêt de la Cour de cassation, l'avocat et chroniqueur d'Europe 1, Roland Perez, s'intéresse aux problèmes de voisinage. Désormais, la personne occupant officiellement un logement, qu'il soit son locataire ou son propriétaire, pourrait être jugé complice des nuisances sonores perpétrées par d'autres sous son toit.

La Cour de cassation vient de rendre un arrêt qui pourrait faire parler, concernant les troubles de voisinage causés par le bruit et le tapage nocturne. Il dispose en effet que la personne à l'origine du tapage n'est pas la seule responsable... Le propriétaire, ou en tout cas l'habitant officiel du lieu d'où le bruit émane, est également responsable à titre de complice. Et cette décision pourrait bien faire jurisprudence.

L'occupant doit "user de son autorité"

Tout commence par la plainte d'un voisin pour tapage nocturne. Le bruit vient de l'appartement d'à côté, où l'enfant de la famille habitante donne une fête. En cette heure avancée de la nuit, la persistance des rires, cris et hurlements pousse le voisin à appeler la police. Celle-ci, une fois sur place, se contente de relever le nom de l'occupant en titre de l'appartement. En revanche, elle ne cherche pas à savoir qui sont précisément les fauteurs de bruit.

Aucune des personnes visiblement à l'origine des nuisances ne va être inquiétée. Seul le père de famille, occupant officiel de l'appartement, va devoir se présenter à la justice. Il est jugé comme complice des personnes présentes sous son toit et à l'origine du tapage. Il les aurait laissés faire du bruit sans user "de son autorité de propriétaire et de père de famille pour empêcher et faire cesser le bruit", dit la Cour de cassation.

Complicité involontaire

L'homme en question a soutenu que pour être complice, il fallait intentionnellement et directement concourir à l'infraction. En d'autres termes, il aurait fallu en être conscient et agir personnellement. Malheureusement pour lui, la Cour a considéré qu'il suffisait d'avoir laissé faire les autres.

Avant 1994, la complicité d'une contravention n'existait pas dans le code pénal. En effet, écoper d'une contravention procède rarement d'un comportement volontaire. Depuis cette date, la complicité d'un acte involontaire a été rendue possible. En l’occurrence, s'il est démontré que le propriétaire ou l'occupant officiel de l'appartement s'est abstenu d'intervenir pour faire cesser le tapage alors qu'il le pouvait, il peut être déclaré coupable du bruit.

Si le propriétaire de l'appartement ou son locataire n'avait pas été là au moment où le bruit s'est déclaré, il n'aurait en revanche pas été tenu responsable.