Le Nord placé en "alerte sécheresse" : "Les sols sont de plus en plus fragiles"

L'hydrologue Emma Haziza sur Europe 1
Pour l'hydrologue Emma Haziza, "il ne faut pas attendre dix ans" pour tenter d'endiguer les sécheresses. © Europe 1
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Thibaud Le Meneec
Invitée sur notre antenne mercredi soir, l'hydrologue Emma Haziza alerte sur le risque de voir les épisodes de sécheresses se multiplier à l'avenir sans adaptation de nos habitudes.
INTERVIEW

Le département du Nord est "en alerte sécheresse", et ce jusqu'au 30 juin. Une décision qui déclenche plusieurs mesures de restriction de l'utilisation de l'eau pour les particuliers, professionnels et collectivités. Surtout, elle intervient très tôt dans l'année, selon Emma Haziza, hydrologue et experte en adaptation face au changement climatique invitée d'Europe 1, mercredi soir. "On est au mois d'avril", qui est "une période normalement de recharge où on n'a pas de déficits marqués" car "on est dans une phase où on va préparer l'été. Là, ce n'est pas le cas", explique-t-elle.

Pour autant, cette alerte n'est pas étonnante si l'on regarde l'état hydrique des dernières années en France : "Il y a une variabilité annuelle au niveau des déficits de pluie de plus en plus marquée, entre inondations et sécheresses, qui deviennent notre quotidien."

"Cela a vraiment commencé en 2014, avec une situation qui a évolué d'un coup et a marqué des sécheresse record", poursuit la spécialiste, pour qui "on peut s'attendre à ce que 2019 soit encore une année qui sera marquée par des états de sécheresse. Les sols sont de plus en plus fragiles et vulnérables, parce que les sécheresses remobilisent les sols en profondeur."

Un "scénario-fiction" devenu réalité

À l'avenir, les épisodes tels que celui que connaît actuellement le Nord devraient se multiplier, pronostique l'expert. "Le scénario-fiction des camions-citernes qui arrivent dans une ville n'est plus un scénario-fiction. L'été dernier, c'est ce qu'il s'est passé", appuie Emma Haziza. "Ça peut revenir."

D'où l'intérêt de mettre en place une nouvelle stratégie face à ce risque : "On met en place tout un tas d'actions pour protéger les ressources. Puisque ça va devenir notre quotidien, il faut réfléchir autrement nos modes agricoles, nos manières de construire les bâtis. Plus on démarrera tôt, mieux ce sera. Il ne faut pas attendre dix ans, parce qu'on ne fera plus que subir et on aura peut-être moins de solutions", conclut la spécialiste.