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Romain David
Au-delà du collège et du lycée, le décrochage scolaire menace les jeunes qui en ont fini le secondaire, en particulier ceux qui étudient sur les bancs de la fac où un sentiment d'abandon peut s'installer. 
LE TOUR DE LA QUESTION

Les chiffres sont préoccupants : en France, 100.000 jeunes quittent l'école sans diplôme chaque année, selon les données de l'OCDE. Un phénomène qui ne concerne pas seulement la formation initiale mais également les études supérieures, où il est toutefois plus difficile à mesurer. En 2010, 80.000 jeunes sont sortis sans qualification de l'enseignement supérieur, majoritairement des étudiants en BTS ou à l'université, selon un pointage réalisé par le Centre d'études et de recherches sur les qualifications.

Pour Maryse Esterle, sociologue, spécialiste du décrochage scolaire, cette rupture s'explique en partie par le fossé entre la fin du secondaire et le début des études secondaires, et notamment la différence du niveau d'attention accordée aux jeunes par le système éducatif. "Les étudiants, encore très jeunes, se retrouvent du lycée, où ils sont bien encadrés, à la fac où c'est le grand bain", pointe-t-elle au micro de Wendy Bouchard dans Le Tour de la question sur Europe 1.

>> De 9h à 11h, c’est le tour de la question avec Wendy Bouchard. Retrouvez le replay de l’émission ici

Un sentiment d'abandon. "J'ai quitté la fac au bout de trois mois, parce qu'il faut être très autonome", témoigne ainsi Jasmine. Âgée de 19 ans, cette jeune femme avait pourtant effectué une bonne scolarité au collège et au lycée. Mais elle assure avoir perdu le goût des études une fois arrivée sur les bancs de la fac. "On n'est pas surveillés, il n'y a pas vraiment d''absence'. Petit à petit, j'ai arrêté d'aller à l'amphithéâtre, j'ai pris de mauvaises habitudes, j'ai perdu la motivation et j'ai fini par ne plus y aller", explique-t-elle.

Un problème d'orientation. "Un certain nombre d'universités ont compris ce problème de décrochage et organisent les étudiants en classes avec des groupes d'une trentaine d'élèves suivis par des référents, pour leur permettre d'avoir un encadrement et une suite dans la motivation", relève Maryse Esterle. Mais pour cette spécialiste, l'orientation peut également être la source d'importantes désillusions. Entre l'image qu'un étudiant se fait de la filière pour laquelle il opte et la réalité des cours suivis, l'écart peut s'avérer particulièrement grand. "C'est un problème dans certaines filières où il y a une déperdition très importante", note-t-elle. Un problème qui apparaît parfois bien en amont, dès la troisième, "où des élèves vont choisir une filière professionnelle sans trop savoir de quoi il s'agit".

Des études mal appréhendées. Ce sentiment de déconvenue touche souvent les voies les plus demandées, sources de nombreux fantasmes. Notre spécialiste cite notamment la psychologie et la sociologie. "Ce sont des filières où énormément d'étudiants s'inscrivent et où il y a beaucoup de décrochage", explique-t-elle. "En psychologie […], les étudiants espèrent, dès le départ, avoir des données. Or, les études de psychologie sont assez austères et difficiles et renvoient peu aux entretiens psychologiques, ça vient longtemps après", détaille-t-elle. "En sociologie, souvent les étudiants pensent que ça va être facile mais pas du tout, c'est une science humaine avec son corpus théorique, assez rébarbatif au départ", ajoute Maryse Esterle.