Cette crise sanitaire, Mathieu Kassovitz l'associe à "une espèce de justice divine" qui doit nous pousser à la réflexion et à un changement global. 6:22
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Pauline Rouquette
Chaque semaine pendant le confinement, Frédéric Taddeï interroge des invités non plus "En Balade", mais par téléphone, pour leur demander comment ils vivent cette période si particulière. Confiné avec ses enfants, l'acteur et réalisateur Mathieu Kassovitz espère que cette crise mènera à une prise de conscience globale sur l'avenir de la planète et les limites de notre modèle économique.
INTERVIEW

Au départ, l'annonce du confinement avait plutôt été une bonne nouvelle pour Mathieu Kassovitz. "Je suis quelqu'un de très casanier, je travaille souvent à la maison et me suis dit 'ça va être encore mieux, personne ne va me déranger, je vais pouvoir écrire et créer'". L'acteur et réalisateur dit avoir vite déchanté. "Je regardais le plafond toute la journée, ça m'a vraiment mis un coup au moral".

>> Pendant le confinement destiné à ralentir la propagation de l'épidémie de coronavirus, Frédéric Taddeï réinvente En Balade avec et interroge, à distance, des personnalités sur la manière dont ils et elles vivent cette période. Retrouvez toutes ses émissions en podcast et en replay ici 

"Une espèce de justice divine"

Confiné avec ses enfants, "dans une belle maison avec de l'espace", le héros de la série Le bureau des légendes estime vivre le confinement "comme un riche". La cinquième saison de la série est sortie le 6 avril, et elle fait, selon lui, écho à la situation que les Français et le monde entier vivent aujourd'hui. "C'est une série assez anxiogène dans le sens où l'on vous monter le dessous des cartes, et dans notre quotidien actuel, on est vraiment dans ce dessous des cartes", pose-t-il. "C'est comme si ce monde, qui ne touche que certaines personnes concernées, tout d'un coup s'est renversé sur l'ensemble de la civilisation".

Ce chamboulement, Mathieu Kassovitz l'associe à "une espèce de justice divine" qui doit nous pousser à la réflexion et à un changement global. "J'espère que l'on va se rendre compte que l'on est sur une toute petite planète, que l'on est tous connectés les uns aux autres et qu'il suffit de pas grand chose pour que tout bascule", exprime-t-il. Optimiste et convaincu que notre génération peut et doit marquer l'histoire du monde, l'acteur ajoute que "si l'on est capable de réagir à ça, peut-être que l'on pourra influencer de manière plus forte nos dirigeants qui ont eux-mêmes dû être fortement choqués dans leurs convictions".

"Ils étaient tous au courant !"

Les dirigeants, ceux-là même qui, selon Mathieu Kassovitz, ne pouvaient pas ne pas savoir. "Ils étaient tous au courant", dénonce-t-il, évoquant l'hypothèse d'une pandémie comme un risque connu, voire couru d'avance. "Les auteurs de science-fiction en ont fait leur sujet depuis des décennies ; il y a des dossiers sur les bureaux disant que les pandémies sont un futur obligatoire auquel il faut se préparer", poursuit-il.

Alors pourquoi ne pas s'être préparé ? "Parce qu'ils ne prennent pas les choses au sérieux, de la même façon qu'ils ne se préparent pas aux problèmes climatiques parce qu'ils ne les prennent pas au sérieux", abonde Mathieu Kassovitz, qui estime que le manque d'anticipation des gouvernements face au Covid-19 est avant tout lié au modèle économique de nos sociétés. "C'est très difficile de concevoir tout un système économique où l’argent est fait pour la préservation de la vie et de l'ensemble de ce qui fait nos libertés", estime-t-il, ajoutant que l’économie basée sur le capitalisme ne fonctionne en rien. "Quand la machine ne fonctionne plus, on commence à réfléchir différemment".

En effet, le réalisateur de La Haine en est persuadé : "On fait partie d’une époque qui va marquer l’histoire du monde dans les prochains siècles", assure-t-il, espérant que les Français sortiront grandis de cette expérience. "On est tous anxieux mais très autonome, et on est conscient que l'on peut se gérer nous-mêmes ; on n'a pas besoin de la police, pas besoin de l’État, on arrive à comprendre les problèmes par nous-mêmes", assène-t-il. "Maintenant, voyons comment on en sort en communauté".